Ce que nous apprend la première découverte d’ambre en Antarctique

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Un minuscule morceau d'ambre retrouvé piégé dans du lignite du Crétacé au large des côtes de l'Antarctique. Crédits : Institut Alfred Wegener / V. Schumacher

Récemment, une découverte rare et précieuse a été réalisée en Antarctique : des fragments d’ambre fossile vieux de 90 millions d’années. Ils ont été retrouvés dans un bassin sédimentaire au large des côtes. Cette résine fossilisée, d’une taille minuscule, mais d’une importance scientifique capitale, offre un aperçu inestimable de la vie sur un continent qui était à l’époque radicalement différent de l’Antarctique glacé que nous connaissons aujourd’hui.

Un fossile exceptionnel

L’équipe de chercheurs dirigée par le Dr Johann Klages, de l’Institut Alfred Wegener, a récemment effectué une expédition pour forer le fond marin près de l’île Pine, située à environ 74 degrés de latitude sud. C’est là qu’ils ont mis à jour des fragments d’ambre translucides pris dans une couche de lignite (un type de charbon humide) de seulement cinq centimètres d’épaisseur. Ce lignite a révélé des morceaux d’ambre datant de 92 à 83 millions d’années, indiquant qu’ils proviennent probablement d’une forêt marécageuse riche en conifères.

Rappelons qu’il y a 90 millions d’années, au cours de la période du Crétacé, l’Antarctique était bien loin de l’image stéréotypée d’un continent gelé et désertique. À cette époque, le climat était beaucoup plus chaud qu’aujourd’hui. L’absence de courant circumpolaire antarctique, qui n’existait pas encore, avait en effet entraîné des conditions climatiques très différentes, favorisant la croissance de vastes forêts. Elles étaient principalement composées de conifères et elles offraient un habitat propice à de nombreuses espèces de dinosaures et de mammifères.

Une hypothèse sur la préservation de cet ambre est qu’il pourrait avoir été formé en réponse à un incendie de forêt. Les arbres auraient libéré de la résine pour se protéger avant qu’elle ne soit rapidement recouverte par l’eau, la protégeant des rayons UV et permettant ainsi sa fossilisation. Ce scénario pourrait expliquer pourquoi l’ambre retrouvé est resté clair et translucide, indiquant qu’il n’a pas été soumis à des températures trop élevées qui auraient pu le faire fondre.

Notez enfin que l’extrême localisation de la découverte fait également de ces fragments d’ambre les plus méridionaux jamais trouvés. Il s’agit donc d’un ajout précieux à la collection de fossiles retrouvés dans d’autres parties du monde, notamment en Australie.

Les défis de l’analyse et des hypothèses intéressantes

L’ambre est souvent un excellent moyen de préserver des traces de l’écosystème d’une époque donnée, notamment des insectes, des plantes et parfois même des restes d’animaux. En se fossilisant dans l’ambre, ces organismes sont en effet piégés dans un état exceptionnel de conservation. Ainsi, les fragments d’ambre découverts en Antarctique pourraient contenir des informations cruciales sur les espèces qui peuplaient ce continent à l’époque.

Malheureusement, l’analyse de ces fragments d’ambre n’a pas été sans difficulté. En raison de leur petite taille, de seulement 0,5 à 1 millimètre de diamètre, les chercheurs ont en effet dû broyer une partie du lignite pour extraire les morceaux d’ambre. Cela a rendu l’analyse complexe, réduisant les chances de découvrir des formes de vie parfaitement conservées à l’intérieur. Cependant, des traces intéressantes, comme des fragments d’écorce d’arbres, ont été détectées.

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Des fragments de ce que l’on pense être de l’écorce d’arbre emprisonnés dans l’un des morceaux d’ambre.
Crédits : Johann P. Klages

Cette découverte marque une avancée importante pour la paléontologie et la compréhension des écosystèmes préhistoriques. Bien que de nombreuses questions restent sans réponse, comme les détails précis de l’évolution des forêts antarctiques, chaque nouvel échantillon d’ambre découvert permet aux scientifiques de reconstituer petit à petit l’histoire géologique et biologique de notre planète. L’équipe de Klages espère, à travers l’étude de ces fragments, en apprendre davantage sur l’écosystème de la forêt de l’époque en étudiant les traces de vie qu’elle aurait pu contenir.