Changement climatique : quand les scientifiques ont-ils alerté pour la première fois ?

changement climatique
Svante Arrhenius. Source : Greenlane

Les scientifiques ont conscience du changement climatique et des dangers qu’il représente depuis un certain temps. Mais quand ont-ils mis en garde l’humanité pour la première fois ?

Il y a quelques mois, un effort d’analyse intégrant un éventail de plus de 88 000 études confirmait et prolongeait des résultats similaires obtenus en 2019 : le consensus sur l’origine humaine du changement climatique était évalué à plus de 99,9 %. Si une partie du grand public et des politiques reste persuadée qu’un débat persiste toujours au sein de la communauté scientifique, le dossier sur l’origine humaine du changement climatique est désormais clos chez les experts du climat.

Nous savons que les humains s’interrogent depuis longtemps sur le sujet, mais concrètement, quand avons-nous pris conscience pour la première fois du changement climatique ?

Les travaux de Svante Arrhenius

Selon l’historien Spencer Weart, du Center for History of Physics de l’American Institute of Physics de College Park (Maryland), les premiers débats documentés sur le changement climatique remonteraient à la Grèce antique (1200 av. J.-C à 323). Toutefois, ces interrogations ne se concentraient que sur les régions locales. « Les gens se demandaient si l’assèchement des marais ou le fait d’abattre les forêts pourrait apporter plus ou moins de pluie dans la région« , détaille le chercheur à LiveScience.

Ce n’est que bien plus tard, en 1896, que la question s’est véritablement posée. Selon Weart, le scientifique suédois Svante Arrhenius (1859-1927) devint en effet la première personne à imaginer que l’humanité pouvait changer le climat à l’échelle mondiale. Le chercheur avait alors publié ses calculs, soulignant que l’ajout de CO2 dans l’atmosphère pourrait réchauffer la planète.

Pour ces travaux, Arrhenius s’était appuyé sur les recherches de Joseph Fourier (1768-1830) qui avait à son époque émis l’hypothèse que la Terre serait beaucoup plus froide sans atmosphère. Il s’était également inspiré de John Tyndall (1820-1893) et d’Eunice Newton Foote (1819- 1888). Tous deux avaient démontré séparément que le dioxyde de carbone et la vapeur d’eau emprisonnaient la chaleur, suggérant au passage qu’une atmosphère pourrait faire de même.

Les prévisions d’Arrhenius sur le changement climatique étaient en grande partie exactes, mais d’après l’historien, son travail n’était pas largement accepté. À l’époque, on reconnaissait simplement l’idée que les humains pouvaient influencer le climat mondial. La belle affaire. D’ailleurs, beaucoup considéraient également ce réchauffement comme bénéfique.

changement climatique
Debout à partir de la gauche : Nernst, Streintz, Arrhenius, Hiecke. Assis à partir de la gauche : Aulinger, Ettingshausen, Boltzmann, Klemencic, Hausmanninge. Crédits : Université de Graz

Le changement climatique est ensuite devenu progressivement une préoccupation

Tout s’est ensuite accéléré dès les années 50, environ soixante ans après les travaux d’Arrhenius. À l’époque, une étude signée Roger Revelle (1909-1991) et publiée dans la revue Tellus en 1957 avait révélé que l’océan n’absorberait pas tout le dioxyde de carbone libéré dans les émissions de carburant industriel de l’humanité. De fait, le chercheur soulignait que les niveaux de dioxyde de carbone dans l’atmosphère pourraient par conséquent augmenter de manière significative.

Trois ans plus tard, Charles Keeling (1928-2005) a publié une étude distincte qui révélait, preuve à l’appui, une augmentation annuelle des niveaux de dioxyde de carbone dans l’atmosphère terrestre. Dès lors, les scientifiques ont commencé à s’inquiéter de l’impact que les émissions d’origine humaine pourraient avoir sur le climat et beaucoup ont appelé à l’action dès la fin des années 70.

C’est ainsi que s’est déroulée en 1979 la première conférence mondiale sur le climat. Un peu plus tard, en 1987, vingt-quatre pays signaient le protocole de Montréal sur la protection de la couche d’ozone. L’année suivante sera marquée par la création du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC) qui publie depuis régulièrement des rapports. Enfin, la même année, les pays du G7 reconnaissaient la nécessité de développer des stratégies dans le domaine des changements climatiques dans le cadre de la conférence de Toronto.

Pendant ce temps, d’autres études ont commencé à mettre en évidence le changement climatique comme une menace potentielle pour les espèces et les écosystèmes du monde entier. Les mises en garde se sont ensuite poursuivies dans les années 1990 et 2000, malgré l’opposition des entreprises de combustibles fossiles et autres idéologues opposés à toute action gouvernementale.