Chaque seconde, des particules invisibles traversent nos corps sans que nous en ayons conscience. Ces particules, appelées muons, sont produites dans les hautes couches de l’atmosphère par des interactions entre les rayons cosmiques et les atomes. Pourtant, un mystère intrigue les scientifiques depuis plusieurs années : il y a beaucoup plus de muons à la surface de la Terre que ce que prévoient les théories actuelles. Une étude propose une solution intrigante basée sur un phénomène exotique : le condensat de gluons.
Trop de muons sur Terre : un mystère cosmique
Chaque seconde, des particules invisibles, appelées muons, traversent notre corps sans laisser de trace. Ces particules subatomiques, produites dans les hautes couches de l’atmosphère terrestre, résultent d’une chaîne d’événements déclenchée par les rayons cosmiques. Dans le détail, ces rayons qui voyagent depuis les confins de l’Univers à des vitesses proches de celle de la lumière percutent les atomes d’azote, d’oxygène et d’argon de l’atmosphère. Ces collisions engendrent une cascade de particules, incluant des pions et des kaons, qui se désintègrent pour former des muons. Ces derniers sont étonnamment stables et atteignent facilement la surface de la Terre malgré leur courte durée de vie.
Cependant, un mystère intrigue les scientifiques : il y a beaucoup plus de muons à la surface de la Terre que ce que prévoient les théories actuelles. Les modèles basés sur la physique des particules et les données des accélérateurs, comme ceux du CERN, sous-estiment le flux observé. Pour certaines plages d’énergie (entre six et seize exaélectronvolts), le nombre de muons est supérieur de 30 à 60 % aux attentes. Cette énigme des muons intrigue depuis des années et constitue un défi majeur pour les physiciens.
Une nouvelle piste : le condensat de gluons
Pour expliquer l’excès de muons, une équipe de chercheurs chinois propose une idée fascinante : les collisions initiales dans l’atmosphère seraient bien plus complexes qu’on ne le pensait. Selon eux, un phénomène appelé condensat de gluons pourrait se produire lors de ces impacts à très haute énergie.
Pour comprendre cette hypothèse, il faut d’abord savoir ce qu’est un gluon. Les gluons sont des particules qui jouent un rôle similaire à celui de la colle. Ils maintiennent ensemble les quarks, les constituants fondamentaux des protons, des neutrons et d’autres particules appelées hadrons. Toutefois, contrairement à d’autres forces comme l’électricité, l’interaction forte (responsable de cette « colle ») est extraordinairement complexe. Les gluons eux-mêmes portent une charge liée à la force forte, ce qui les rend capables d’interagir entre eux, ce qui crée des configurations incroyablement denses et dynamiques.
Lors de collisions à des énergies extrêmes, ces gluons pourraient alors se regrouper en un état condensé où ils sont extrêmement nombreux et concentrés dans un petit espace. Ce condensat influencerait la manière dont les particules secondaires (comme les pions et les kaons) se forment, ce qui augmenterait significativement leur nombre. Résultat : plus de pions et de kaons se désintégreraient en muons, expliquant ainsi l’excès observé.
Les chercheurs ont calculé que ce processus pourrait doubler, voire décupler la production de certaines particules impliquées dans la formation des muons, notamment les quarks dits étranges. Ces résultats théoriques pourraient ainsi résoudre l’énigme des muons tout en ouvrant une nouvelle fenêtre sur la physique des hautes énergies.