Pourquoi tant d’épidémies sont originaires d’Asie et d’Afrique ?

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La nouvelle épidémie de coronavirus essuyée actuellement ne sera pas la dernière, avertissent des experts. Tant que nous continuerons d’ignorer les liens entre les maladies infectieuses et la destruction du monde naturel, l’humanité sera toujours exposée.

Bien que des épidémies soient apparues tout au long de l’histoire de l’humanité, elles semblent désormais de plus en plus nombreuses. Au cours des 20 dernières années, les coronavirus ont en effet à eux seuls provoqué trois épidémies majeures dans le monde. Et plus inquiétant encore, les émergences de ces agents pathogènes semblent de plus en plus rapprochées. Comment l’expliquer ?

« C’est comme lorsque vous démolissez une vieille grange et que la poussière s’envole »

Prenons l’exemple du SARS-CoV-2, qui nous préoccupe actuellement. Pour beaucoup, le marché de la faune de la ville de Wuhan, en Chine – qui vendait un large éventail d’animaux sauvages vivants – est considéré comme le parfait creuset viral. Des chercheurs ont également suggéré que les pangolins pouvaient avoir joué les intermédiaires entre les chauves-souris (considérées comme le réservoir du virus) et les humains.

Mais il faut bien comprendre que ce n’est ici que la partie d’un problème beaucoup plus large : la destruction continue des écosystèmes par l’humanité, qui nous rapproche plus que jamais de la faune.

Interrogé par The Independent, David Quammen, auteur du best-seller de 2012, Spillover : Animal Infections and the Next Human Pandemic, l’explique de la manière suivante :

« Nos écosystèmes très diversifiés sont remplis de nombreuses espèces d’animaux sauvages, de plantes, de champignons et de bactéries. Toute cette diversité biologique contient des virus uniques. Lorsque nous abattons des forêts tropicales, que ce soit pour construire des villages, des camps miniers, ou pour capturer des animaux sauvages, nous nous exposons à ces virus ».

« C’est comme lorsque vous démolissez une vieille grange et que la poussière s’envole, ajoute l’écrivain. Lorsque vous démolissez une forêt tropicale, les virus s’envolent également ».

L’Homme, qui empiète sur ces habitats fauniques, se transforme ainsi en hôte. Et notre monde étant aujourd’hui régi par les échanges internationaux, les agents pathogènes sont finalement capables de se propager rapidement sur la planète.

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Crédits : emmagrau/Pixabay

Un problème de proximité

C’est la raison pour laquelle il y a tant de maladies originaires d’Asie et d’Afrique. Car il y a, dans ces régions qui abritent 60% de la population mondiale, une urbanisation de plus en plus intensive opérée depuis plusieurs décennies. À titre d’exemple, selon la Banque mondiale, près de 200 millions de personnes se sont déplacées vers les zones urbaines d’Asie de l’Est au cours de la première décennie du 21e siècle.

« Cette migration à grande échelle signifie que les terres forestières sont détruites pour créer des zones urbaines, explique le Dr Kuchipudi, virologue à la Penn State University. Les animaux sauvages porteurs de virus, contraints de se rapprocher des villes et villages, rencontrent alors inévitablement des animaux domestiques et des humains ».

Pour prendre l’exemple des chauves-souris, « responsables » des épidémies Hendra en 1994, Nipah en 1998, SRAS en 2002, MERS (syndrome respiratoire du Moyen-Orient) en 2012 ou encore Ebola en 2014, ces animaux ne sont en réalité pas le problème. En effet, les chauves-souris contribuent à promouvoir la biodiversité et la santé de leurs écosystèmes. Elles sont donc très importantes. Le problème survient en revanche lorsque nous entrons en contact avec elles.

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Shi Zhengli, photographiée lors d’une « chasse aux virus » en 2004. Crédits : Wuhan Institute of Virology

Il faut par ailleurs souligner l’importance des hôtes intermédiaires. En Asie et en Afrique, de nombreuses familles dépendent en effet de l’élevage pour survivre. Malheureusement, à cause du manque de moyens, les bovins, les poulets et les porcs, qui peuvent être porteurs de maladies infectieuses transmises par des animaux sauvages, sont bien souvent en contact étroit les uns avec les autres. Et l’Homme n’est jamais bien loin.

Cette proximité joue également un rôle clé dans la façon dont un pathogène pourrait émerger et se propager entre les espèces.

Ainsi la réglementation sur la vente et la consommation d’animaux sauvages peut contribuer à atténuer les risques de transmission des maladies infectieuses, mais il y a en réalité un problème de proximité beaucoup plus large à résoudre. L’humanité, si elle veut continuer à s’étendre, va devoir se donner les moyens de préserver le monde naturel, au risque de voir émerger d’autres agents pathogènes potentiellement dévastateurs pour notre espèce.

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