Qu’est-ce que la supraconductivité ? Et pourquoi est-elle importante ?

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Spectroscopie laser pour déclencher des réactions chimiques dans des expériences de supraconductivité à température ambiante. Crédit : Lauren Petracca

À des températures très basses, certains matériaux ont la capacité de conduire l’électricité sans aucune résistance, ce qui signifie que le courant peut y circuler indéfiniment sans perdre d’énergie. On parle alors de supraconductivité. Cette propriété a des implications potentiellement révolutionnaires dans de nombreux domaines. Où en est la recherche ? Nous faisons le point.

Qu’est-ce que la supraconductivité ?

La supraconductivité est un phénomène physique fascinant qui se produit lorsqu’un matériau est refroidi à une température proche du zéro absolu (-273,15 °C). Ce phénomène a été découvert pour la première fois en 1911 par le médecin hollandais Heike Kamerlingh Onnes qui a obtenu la supraconductivité du mercure en le refroidissant à -268,95 °C. Dans ces conditions, il devient alors possible de conduire l’électricité sans aucune résistance.

Le phénomène de supraconductivité est étroitement lié à la mécanique quantique qui décrit le comportement de la matière à l’échelle microscopique. Selon cette théorie, les électrons qui constituent les atomes et les molécules peuvent avoir des niveaux d’énergie « discrets », ce qui signifie qu’ils ne peuvent pas avoir n’importe quelle quantité d’énergie, mais seulement des quantités spécifiques.

Lorsque le matériau est refroidi à une température suffisamment basse, les électrons peuvent alors s’apparier en paires de Cooper. Ces paires sont liées par une force d’attraction électrique, appelée force d’appariement qui résulte de l’interaction des électrons avec les vibrations du réseau cristallin du matériau. Une fois ces paires formées, elles peuvent se déplacer dans le matériau avec une résistance nulle, ce qui signifie que l’électricité peut se déplacer sans aucune perte d’énergie. C’est ce qui rend la supraconductivité si intéressante : elle permet de produire de l’électricité avec une efficacité maximale et de transporter l’énergie sur de longues distances sans perte de puissance.

La résistance électrique

Avec les matériaux actuels, lorsqu’un courant électrique est émis, une partie de son énergie est convertie en chaleur et dissipée dans le matériau. Ce phénomène est connu sous le nom de résistance électrique. Celle-ci est causée par l’interaction des électrons avec les atomes du matériau. Plus le matériau est dit « résistif », plus les collisions se produisent et plus la perte d’énergie est importante. Certains matériaux sont d’excellents conducteurs électriques et ont une résistance très faible. C’est le cas de métaux tels que l’argent, le cuivre et l’aluminium. La supraconductivité n’implique en revanche aucune résistance du tout.

En outre, la supraconductivité présente également des propriétés magnétiques intéressantes, car les matériaux supraconducteurs peuvent expulser un champ magnétique lorsqu’ils sont refroidis à une température suffisamment basse, ce qui permet de créer des aimants très puissants sans pertes d’énergie.

L’un des principaux inconvénients à l’utilisation des matériaux supraconducteurs est néanmoins que leur capacité à conduire l’électricité sans résistance est limitée à des températures très basses, ce qui rend leur utilisation onéreuse et difficile à mettre en œuvre dans des applications pratiques. Il existe également des limites physiques à la quantité de courant électrique qu’un matériau supraconducteur peut transporter avant de perdre sa supraconductivité.

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Vers une utilisation à température ambiante ?

Pour les raisons évoquées plus haut, la supraconductivité à température ambiante est considérée comme le Saint Graal de ce domaine de recherche. Elle pourrait en effet permettre une utilisation pratique de la supraconductivité dans de nombreux domaines sans avoir besoin de refroidir les matériaux à des températures extrêmement basses. Une telle percée pourrait alors transformer presque toutes les technologies utilisant l’énergie électrique, ouvrant de nouvelles possibilités pour votre téléphone, les trains à lévitation magnétique ou encore les futures centrales électriques à fusion, pour ne citer que quelques exemples.

Des décennies de recherche intensive ont permis de faire quelques avancées en ce sens. L’un des développements les plus prometteurs est l’utilisation de matériaux à base de fer pnictide, qui ont été découverts en 2008. Ces matériaux ont montré des propriétés supraconductrices à des températures relativement élevées (jusqu’à 56 K, ou -217,15°C). On était encore loin de la température ambiante, mais cela représentait une amélioration significative par rapport aux matériaux supraconducteurs traditionnels qui ont des températures proches du zéro absolu.

Plus récemment, des équipes de chercheurs ont fait encore mieux en proposant des formules permettant une supraconductivité -23°C, ou même 14,5°C en laboratoire. Cependant, tout n’est pas encore gagné. Si effectivement d’énormes progrès ont été réalisés côté températures, cette nouvelle approche nécessite encore des pressions monumentales, et donc des instruments adaptés. Trouver un moyen de créer des matériaux supraconducteurs à des pressions beaucoup plus faibles sera donc essentiel pour le produire en quantités suffisantes et à un coût raisonnable.