SpaceX n’aurait jamais pu creuser autant d’écart avec ses concurrents si les ingénieurs de la société n’avaient pas réussi, en 2016, l’exploit de faire atterrir leur booster de Falcon 9 en mer. Voici pourquoi.
L’importance de revenir en mer
Il y a un peu plus de cinq ans, le 8 avril 2016, SpaceX réussissait un exploit : faire atterrir un booster de Falcon 9 sur une plateforme en mer, au large de la Floride (la vidéo est visible en fin d’article). Le jalon de 2015, avec ce premier atterrissage réussi sur la terre ferme, près de la rampe de lancement, était déjà exceptionnel, mais celui-ci l’était peut-être plus encore.
D’une part, parce que ce toucher était naturellement plus compliqué sur le plan technique (les mouvements de l’océan sont à considérer). Et d’autre part, parce que sans cette capacité d’amerrissage, SpaceX ne pourrait proposer ses prestations actuelles.
Vous l’avez probablement remarqué, au cours d’un lancement, une fusée s’incline progressivement, passant d’une orientation verticale à l’horizontale alors qu’elle se prépare à libérer son deuxième étage sur une trajectoire orbitale.
À ce stade, il vous faut alors des tonnes de carburant pour espérer inverser le cap et revenir vers le site de lancement. Pour faire des économies, il est en réalité beaucoup plus intéressant de suivre un arc parabolique pour atterrir à des centaines de kilomètres du site de lancement. Ensuite, vous vous débrouillez pour revenir.
Les données de performance vous le confirmeront. Une fusée Falcon 9 qui atterrit sur un drone en mer peut en effet soulever environ 5,5 tonnes de charge utile en orbite de transfert géostationnaire, contre seulement 3,5 tonnes pour une fusée atterrissant sur le site de lancement.

Un avantage concurrentiel de taille
Concrètement, si SpaceX n’avait pas compris comment faire atterrir ses boosters sur des plateformes en mer, la société aurait éliminé environ 40% de ses capacités de levage, ce qui aurait supprimé les avantages inhérents à la réutilisation de ses fusées.
C’est pourquoi SpaceX privilégie les amerrissages dans l’Atlantique depuis cinq ans. Notez qu’il y a près de dix ans, Blue Origin avait breveté ce concept d’atterrissage. SpaceX avait alors contesté ce brevet devant les tribunaux et avait obtenu gain de cause.
Depuis, la société a réussi à clouer près de soixante amerrissages avec ses premiers étages de Falcon 9. Et depuis le début de l’année 2021, tous les lancements ont été opérés avec des boosters vétérans (ayant déjà volé plusieurs fois). De cette manière, la société enchaîne les missions à des coûts considérablement réduits.
Blue Origin, de son côté, n’a pas encore lancé une seule fusée orbitale et encore moins réussi à en faire atterrir une. Jeff Bezos a bien modernisé et nommé un navire de récupération, nommé Jacklyn, mais il est peu probable que celui-ci rattrape une fusée avant 2023, au plus tôt.