Celles et ceux qui ont la chance dāavoir un jardin le savent. Les autres aussi, dāailleurs. Lāherbe fraĆ®chement coupĆ©e, Ƨa sent rudement bon. Mais que sentons-nous vraiment lorsque nous respirons ce parfum enivrantā? Et pourquoi lāaimons-nous autantā?
La réponse à une agression
Nous respirons en rĆ©alitĆ© ce que nous appelons des « substances volatiles des feuillesĀ Ā», aussi appelĆ©es GLV (en anglais Green Leaf Volatiles). Il sāagit de composĆ©s organiques synthĆ©tisĆ©s par les feuilles de nombreuses espĆØces vĆ©gĆ©tales – dont les herbes – qui libĆØrent ce signal chimique dans lāatmosphĆØre en cas dāagression. Il pourrait sāagir de lāattaque dāun insecte, par exemple, ou dāun oiseau, ou encore dāune surcharge de chaleur. Et bien Ć©videmment, en cas « dāattaque de tondeuseĀ Ā». Ces molĆ©cules, trĆØs petites, peuvent alors ĆŖtre dĆ©tectĆ©es Ć des centaines de mĆØtres de distance.
Les plantes fabriquent des formes de GLV lĆ©gĆØrement diffĆ©rentes en fonction des menaces, explique Ian Baldwin, de lāInstitut Max Planck dāĆ©cologie chimique Ć Jena, en Allemagne. Ces « arĆ“mesĀ Ā» fournissent Ć la fois une protection directe, en repoussant les agressions (renforcement des parois, synthĆØse de toxines), mais ils peuvent Ć©galement ĆŖtre un signal dāalerte. Une sorte dāappel Ć lāaide permettant dāattirer les prĆ©dateurs de ces agresseurs. Il a, par exemple, Ć©tĆ© dĆ©couvert que les insectes prĆ©dateurs Geocoris Ć©taient attirĆ©s par les GLV libĆ©rĆ©s par des plantes rongĆ©es par un insecte nuisible appelĆ© le « tĆ©tranyque du tabacĀ Ā».
Une question dāĆ©volution
Concernant les humains, notons que les GLV libĆ©rĆ©s par lāherbe – que nous ne consommons pas – ne sont en rĆ©alitĆ© pas trĆØs diffĆ©rents de ceux des plantes qui figurent Ć nos menus. Cāest pourquoi nous y sommes sensibles. Ā«āQuasiment tous les lĆ©gumes frais offrent un bouquet de GLV, note en effet le chercheur. Les fruits Ć©galement peuvent libĆ©rer des molĆ©cules Ć mesure quāelles se ramollissent et que les membranes qui les composent se dĆ©composent. Tout au long de lāhistoire de lāĆ©volution, nous avons utilisĆ© ces informations pour savoir quand telle ou telle denrĆ©e Ć©tait mĆ»reāĀ».

Sur le papier, lāodeur de lāherbe coupĆ©e nāest pas forcĆ©ment plus agrĆ©able quāune autre. Ce qui la rend irrĆ©sistible, cāest le fait que le volume libĆ©rĆ© est trĆØs important. Lorsque vous tondez la pelouse, des millions de vĆ©gĆ©taux se retrouvent blessĆ©s, ce qui entraĆ®ne la libĆ©ration dāune sorte de nuage concentrĆ© de GLV.
Vous ĆŖtes attendu
Notez au passage que les plantes elles-mĆŖmes peuvent reconnaĆ®tre et rĆ©pondre Ć ces arĆ“mes aĆ©riens. Si une plante se « rend compteĀ Ā» quāune plante voisine dĆ©gage ses propres composĆ©s, elle sera en mesure de se prĆ©parer Ć lāĆ©ventualitĆ© dāĆŖtre Ć©galement touchĆ©e. Une plante, par exemple, pourra alors transporter ses ressources vers ses racines, maximisant ainsi ses chances de repousse.
Cāest Ć©galement le cas de lāherbe. Le chercheur note que cet effet peut commencer quelques minutes Ć peine aprĆØs lāattaque de la premiĆØre plante. En dāautres termes, lorsque vous commencez Ć tondre dāun cĆ“tĆ© de votre pelouse, il y a de fortes chances pour que lāautre moitiĆ© commence dĆ©jĆ Ć se prĆ©parer Ć votre arrivĆ©e.
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