Pourquoi les supporters de foot ont-ils une telle différence de point de vue sur un match ?

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Des scientifiques ont analysé le cerveau de différents supporters de foot, afin de déterminer pourquoi des supporters d’une équipe rivale n’ont pas du tout la même vision du match. Cette étude a été relayée par l’Université York et est parue dans la revue Cerebral cortex ce 1er octobre 2018.

Un constat chez les supporters de foot

Nous avons quasiment tous suivi la coupe du monde de foot 2018, qui a animé notre début d’été. À la fin des matchs, les supporters des équipes différentes donnaient leur point de vue sur le match, leur avis et leurs critiques. Et entre les supporters d’équipes rivales, l’avis sur le match était très différent. Ce n’est pas une chose nouvelle. En effet, lors de matchs tels que OM-PSG, OL-OM et bien d’autres, les fans des équipes se déchaînent de tous bords, en remettant souvent en cause l’arbitrage, les fautes commises non sifflées – ou les fautes sifflées non commises -, des conditions de match déplorables… Bref, de quoi alimenter les rivalités avec l’équipe adverse.

Durant le mondial de cet été, après le match Angleterre-Colombie, les Anglais se sont plaints des nombreuses fautes colombiennes qu’ont subies leurs joueurs. En même temps, les Sud-Américains se soulevaient en créant une pétition avec des milliers de signatures, contre le manque de partialité de l’arbitre qui favorisait l’équipe d’Angleterre. Ils demandaient ainsi une revanche du match. Scène incroyable, digne des films les plus absurdes, et pourtant les supporters des deux pays avaient bien vu le même match.

Des chercheurs de l’Université York (Canada) se sont donc posé la question de savoir pourquoi des personnes peuvent avoir des points de vue si différents sur un même match.

supporter football
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Comment s’est déroulée l’expérience ?

L’expérience a nécessité la présence de différents amateurs de foot. C’est pourquoi des supporters de l’équipe de Chelsea et de Manchester United ont subi l’expérience. Ils soutenaient tous leur équipe depuis 15 ans en moyenne, et ils l’avaient vue jouer plus de 25 fois. Ensuite, ils ont cartographié et comparé l’activité cérébrale des différents supporters pendant qu’ils regardaient un match Chelsea-Manchester. Pour pouvoir observer le cerveau, les participants se trouvaient dans un appareil IRM.

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Ce que montrent les résultats sur les supporters de foot

Les scientifiques ont montré que tous les supporters – toutes équipes confondues – voient le match du même point de vue visuel. En effet, les parties du cerveau qui jouent un rôle dans la vision ont eu pour chacun d’entre eux une activité semblable.

Tim Andrews, professeur au département de psychologie de l’Université York indique ceci : « Lorsque nous avons comparé l’activité cérébrale des supporters de la même équipe et des supporters des équipes adverses, nous avons constaté que l’activité dans les régions sensorielles du cerveau était alignée chez tous les participants, c’est-à-dire qu’ils ont tous vu et entendu le même match ».

Toutefois, de grandes différences sont apparues dans l’activité des régions supérieures du cerveau, nécessaires pour la cognition. Cela a permis de montrer que les mêmes informations visuelles étaient traitées différemment. Tim Andrews ajoute que « dans les régions frontales et sous-corticales du cerveau – y compris les zones connues pour être actives dans la récompense, l’identité personnelle et le contrôle du mouvement – il y avait une corrélation entre les supporters d’une même équipe, mais des différences significatives entre les groupes. C’est ce qui permet aux fans d’équipes rivales de développer une compréhension différente du même jeu ».

Andrews explique : « Les résultats de notre étude offrent un nouvel aperçu de la base neuronale des préjugés de groupe et de la tendance humaine à se sentir à l’aise et rassuré lorsqu’on fait partie d’un groupe, tout en se méfiant des étrangers et des rivaux ».

De plus, «les régions du cerveau qui présentaient les plus grandes différences entre les groupes de supporters – les régions sous-corticales situées au milieu du cerveau – sont censées avoir été conservées pendant l’évolution – ce qui soutient l’idée que la mentalité de groupe peut refléter un des instincts humains les plus primitifs ».

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