Les pigeons marchent en balançant leur tĂȘte en avant. Dâautres oiseaux le font, comme les poules. Mais pour quoi faire, exactementâ? Si la dĂ©marche paraĂźt comique au premier abord, elle rĂ©sulte en rĂ©alitĂ© dâun processus Ă©volutif trĂšs intelligent.
La premiĂšre fois que lâon sâest rĂ©ellement posĂ© la question, câĂ©tait en 1978. Des chercheurs de lâUniversitĂ© Queenâs, au Canada, avaient placĂ© des pigeons dans une cage en Plexiglas avec un tapis roulant Ă lâintĂ©rieur. Le but Ă©tait de pouvoir analyser la dĂ©marche de ces oiseaux. En examinant les images au ralenti, ils ont dĂ©couvert que ces mouvements de tĂȘte se dĂ©composaient en deux parties : une phase de « poussĂ©e » et une phase de « retenue ».
«âDurant la phase de poussĂ©e, la tĂȘte est avancĂ©e dâenviron 5 centimĂštres par rapport au corps, explique Michael Land, biologiste Ă lâUniversitĂ© de Sussex au Royaume-Uni. Elle est suivie dâune phase de maintien pendant laquelle la tĂȘte reste immobile dans lâespace, ce qui signifie quâelle recule par rapport au corps en mouvementâ».
La tĂȘte part donc vers lâavant, et attend que le corps la rattrape. Mais pourquoiâ? Ce comportement tient en rĂ©alitĂ© Ă la façon dont ces oiseaux voient le monde.
Traitement visuel
Les chercheurs de lâexpĂ©rience de 1978 ont en effet dĂ©couvert que les pigeons ne balançaient pas leur tĂȘte lorsque leur environnement visuel restait immobile. Câest cette observation qui a permis de comprendre que le fait de mouvoir leur tĂȘte permet Ă ces oiseaux de stabiliser leur vision du monde en mouvement qui les entoure.
Le fait de maintenir la tĂȘte fixe durant la phase de maintien donne en effet aux pigeons un moment pour traiter visuellement leur environnement en attendant que leur corps ne la rattrape. Câest cette «âpauseâ» dans la dĂ©marche qui permet Ă ces oiseaux dâĂ©valuer la prĂ©sence de prĂ©dateurs, de voitures ou de nourriture, par exemple.
«âSi la tĂȘte des pigeons bougeait au mĂȘme rythme que leur corps, ils auraient du mal Ă conserver une image stable du monde sur leur rĂ©tine, poursuit le chercheur. La scĂšne serait constamment floueâ».
Notez, comme expliquĂ© en intro, que les pigeons ne sont pas les seuls Ă Ă©voluer comme ça. Les poulets, les hĂ©rons, les cigognes ou les grues en sont de parfaits exemples. Nous utilisons de notre cĂŽtĂ© la mĂȘme astuce visuelle, Ă la diffĂ©rence quâau lieu de bouger notre tĂȘte, nous utilisons des mouvements rapides et saccadĂ©s de nos globes oculaires pour nous aider Ă amĂ©liorer notre vision lorsque nous nous dĂ©plaçons dans lâespace.
«âNos yeux ne bougent pas de façon fluide et continue. Ils sautent en rĂ©alitĂ© dâun endroit Ă un autre, note en effet le chercheur. Une fois que lâĆil atteint le point final dâune saccade, il reste collĂ© pendant une courte durĂ©e, suffisamment longtemps pour stabiliser lâimage du monde sur la rĂ©tine afin que nous puissions la traiterâ».
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