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Pourquoi le « pourrissement cérébral » est devenu le symbole de 2024

Chaque année, le dictionnaire Oxford sélectionne un terme ou une expression qui reflète les préoccupations sociétales. Pour 2024, le choix s’est porté sur le terme « Mind Rot », traduit en français par « pourrissement cérébral ». Cette expression illustre un phénomène bien connu de nombreux utilisateurs de smartphones et de réseaux sociaux, souvent victimes d’une surconsommation de contenus numériques de faible qualité.

Qu’est-ce que le « pourrissement cérébral » ?

Imaginez-vous dans votre lit, prêt à vous endormir, lorsque vous commencez à faire défiler des vidéos sur TikTok ou Instagram. Quelques minutes se transforment en heures, et vous vous retrouvez à regarder des contenus sans réel intérêt. Ce comportement, caractérisé par une consommation excessive de contenus numériques répétitifs ou inutiles, est précisément ce que décrit le « pourrissement cérébral ».

Selon Oxford University Press, cette expression a connu une popularité fulgurante avec une hausse de 230 % de son usage entre 2023 et 2024. Bien que le terme soit entré dans le dictionnaire cette année, il trouve ses racines dans des critiques plus anciennes sur la banalisation des idées complexes. Dès le XIXe siècle, des penseurs dénonçaient déjà la diffusion de contenus jugés appauvrissants pour l’esprit.

Une tendance révélatrice de notre époque

Pour le psychologue Andrew Przybylski, interviewé par la BBC, l’adoption de ce mot témoigne des préoccupations croissantes liées à l’utilisation des réseaux sociaux. Ces plateformes, conçues pour maximiser l’engagement des utilisateurs grâce à des algorithmes sophistiqués, encouragent la consommation passive de contenus.

Ces cycles de dopamine — hormone associée à la récompense — rendent difficile de s’arrêter, même lorsque les contenus visionnés ne stimulent ni l’esprit ni l’imagination. Ce phénomène est amplifié par la prolifération des vidéos courtes, souvent dépourvues de profondeur, qui captivent les utilisateurs dans des moments d’ennui ou de fatigue.

Quels sont les impacts sur la santé mentale ?

Bien que le concept de « pourrissement cérébral » ne soit pas encore validé scientifiquement comme un trouble, il est lié à plusieurs problèmes de santé mentale et cognitive observés chez les personnes passant trop de temps sur les réseaux sociaux. Des études ont mis en lumière plusieurs risques potentiels :

  • Fatigue mentale : la consommation excessive de contenus rapides entraîne une surcharge cognitive, rendant difficile la concentration sur des tâches plus complexes.
  • Anxiété et dépression : l’exposition constante à des comparaisons sociales sur les réseaux peut aggraver le mal-être psychologique.
  • Troubles du sommeil : l’utilisation des écrans avant de dormir, souvent associée au « pourrissement cérébral », perturbe la production de mélatonine, essentielle à un sommeil réparateur.
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Une expression au cœur des évolutions linguistiques

Le choix du dictionnaire Oxford met également en lumière l’évolution des mots liés au numérique et aux médias sociaux. Depuis l’introduction de termes comme « selfie » en 2013 ou même d’un émoji comme mot de l’année en 2015, l’influence du monde digital sur notre langage est indéniable.

Chaque année, des milliers de votants participent à la sélection du « mot de l’année », une distinction qui ne garantit pas forcément l’ajout immédiat de l’expression au dictionnaire officiel. Cependant, ce processus souligne les préoccupations collectives face à des phénomènes contemporains comme l’impact des réseaux sociaux sur nos comportements et notre santé mentale.

Comment réduire l’effet du « pourrissement cérébral » ?

Si cette tendance semble alarmante, des solutions existent pour retrouver un usage équilibré des technologies numériques :

  1. Limiter le temps d’écran : définir des plages horaires sans smartphone, notamment avant le coucher.
  2. Favoriser des contenus de qualité : s’abonner à des créateurs inspirants ou éducatifs plutôt qu’à des sources de divertissement passif.
  3. Pratiquer des activités hors-ligne : lecture, sport, ou activités créatives pour rééquilibrer le temps passé devant les écrans.
  4. Activer des outils de contrôle : la plupart des smartphones proposent des fonctionnalités pour surveiller et limiter le temps passé sur certaines applications.

Une réflexion collective pour mieux consommer le numérique

Le « pourrissement cérébral » est plus qu’un simple mot à la mode : c’est un miroir de nos usages numériques et des défis qu’ils posent. Alors que le monde digital continue d’évoluer, il est crucial de repenser notre relation aux réseaux sociaux pour préserver notre bien-être mental. Une prise de conscience collective, associée à des pratiques individuelles saines, pourrait permettre de réduire l’impact de ce phénomène sur notre quotidien.

Rédigé par Alexis Breton