Pompéi : après 2000, une petite maison et ses fresques érotiques enfin découvertes

maison à Pompéi Nymphe et Satyre peinture fresque
Crédits : Parc archéologique de Pompéi

La ville romaine anciennement prospère de Pompéi et la campagne environnante dans le sud de l’Italie ont été submergées par les cendres volcaniques lorsque le mont Vésuve a explosé en l’an 79. L’éruption a alors tué des milliers de Romains qui n’avaient aucune idée qu’ils vivaient à l’ombre de l’un des plus grands volcans d’Europe. Elle a alors enseveli la ville sous une épaisse couche de cendres. Bien que cataclysmique, cet évènement a alors préservé de nombreux habitants et bâtiments en l’état. C’est ce qui a permis aux archéologues de mettre au jour une maison inhabituellement petite richement décorée de fresques incroyablement bien conservées… et très coquines. Les fresques somptueuses de cette modeste maison rivalisent avec celles des demeures plus imposantes.

Une minuscule maison plutôt remarquable

Cette maison a été découverte dans le site d’Insula dei Casti Amanti à Pompéi, un groupe de bâtiments ouvert au public cette année et facilement accessible grâce à des passerelles suspendues qui permettent de regarder les archéologues pendant leur travail de fouille. Les experts y ont découvert de nombreux objets et éléments qui révèlent des informations précieuses sur le quotidien des habitants de l’époque.

Ils ont notamment découvert les dernières offrandes rituelles laissées avant l’éruption du Vésuve dans le sanctuaire familial, connu sous le nom de ‘lararium’. Parmi ces objets se trouvait un brûleur d’encens en céramique incolore avec des trous anciens et une lampe, tous deux portant des traces évidentes de brûlure. Des analyses en laboratoire ont par ailleurs permis d’identifier des restes de brindilles d’essences parfumées. Des fleurs avaient aussi été placées en offrande autour de l’autel, par ailleurs peint et décoré de motifs végétaux et animaux sur un fond blanc incluant des rapaces, des moineaux, des serpents et des motifs végétaux.

autel lararium pompéi
Crédits : Parc archéologique de Pompéi

La cour dispose d’une zone couverte qui mène à un grand bassin aux murs peints en rouge, autour duquel un canal permettait d’acheminer l’eau de pluie vers l’orifice d’un puits relié à une citerne située en dessous. Une fenêtre à côté de la petite peinture d’Hippolyte et Phèdre s’ouvre sur cette petite cour où des travaux de construction étaient en cours au moment de l’éruption du Vésuve. Cette représentation a d’ailleurs donné son surnom à cette maison, appelée provisoirement Maison de Phèdre par les chercheurs.

L’absence d’atrium : une caractéristique particulièrement distinctive

Contrairement à de nombreuses maisons fouillées sur le site, cette bâtisse n’a pas été construite autour d’un atrium, une caractéristique pourtant distinctive de l’architecture romaine. Traditionnellement, les grandes résidences présentaient en effet des pièces entourant un espace central en plein air qui entourait un bassin pour recueillir l’eau de pluie. Il s’agit d’une observation significative, car les atriums étaient des caractéristiques clés des grandes maisons dans la Rome antique et des marqueurs de richesse. Cette découverte extraordinaire éclaire ainsi sur l’évolution des styles architecturaux du premier siècle après J.-C. Les experts suggèrent en effet que cette absence d’atrium indique que les familles aisées montraient leur richesse d’autres façons.

« À mesure que Rome entrait dans le deuxième siècle de notre ère, de nombreux esclaves affranchis et marchands d’origine modeste accédaient au statut social, tandis que les vieilles fortunes déclinaient » explique en effet Gabriel Zuchtriegel, le directeur du parc archéologique. « Plus qu’un atrium, ce sont les vêtements et les bijoux qui commençaient à montrer le statut. Ne pas avoir d’atrium devenait un choix et nous voyons cette tendance émerger à Pompéi. » Surtout, ces nouveaux riches misaient comme ici sur de riches décorations murales, qualifiées par les experts comme étant de qualité similaire à celle de maisons bien plus grandes et plus opulentes à proximité de la Maison de Phèdre.

Des peintures murales aux couleurs vives qui montrent que les habitants de Pompéi avaient un goût pour l’art sensuel

Bien que recouverte de cendres depuis 2 000 ans, cette maison ancienne est encore ornée des peintures étonnamment vives qui l’habillaient par le passé. L’une des fresques les plus marquantes représente une Phèdre légèrement vêtue aux côtés d’Hippolyte, illustrant l’amour tragique qu’elle porte pour son beau-fils. Selon la légende grecque, Phèdre est en effet tombée amoureuse d’Hippolyte qui a rejeté ses avances. En réponse, Phèdre l’a accusé de viol après qu’il l’a repoussée, ce qui a conduit à une série d’évènements tragiques.

Pompéi fresque Phèdre et Hippolyte
Fresque de Phèdre et Hippolyte. Crédits : Parc archéologique de Pompéi

Une autre fresque partiellement abîmée montre potentiellement Vénus et Adonis, ce qui fait écho aux thèmes de l’amour, de la beauté et du destin qui résonnent dans le folklore mythologique.

Pompéi possiblement une fresque de Venus et Adonis
Possiblement une fresque de Vénus et Adonis. Crédits : Parc archéologique de Pompéi

Les peintures murales aux couleurs vives incluent également une représentation d’un symplegma, une rencontre sexuelle entre un satyre et une nymphe, un motif fréquent symbolisant les forces naturelles sauvages et débridées dans la mythologie grecque et romaine. D’autres images tirées du vaste répertoire de l’imagerie gréco-romaine se trouvaient également sur les murs somptueusement décorés de la Maison de Phèdre, mettant en valeur l’admiration profonde des Romains pour les récits grecs.

Pompéi fresque Satyre et Nymphe
Le satyre et la nymphe en train de s’acoquiner. Crédits : Parc archéologique de Pompéi

Des fresques aux scènes ardentes loin d’être uniques à Pompéi

Il est important de noter que cette maison n’est pas la seule de Pompéi à contenir de l’art explicite. Une fouille de 2018 avait par exemple révélé un mur peint avec Priape, le dieu de la fertilité, en train de peser son pénis sur une balance. Une autre pièce d’art audacieuse découverte par le passé représentait le dieu Zeus déguisé en cygne alors qu’il séduisait la reine spartiate Léda.

La Maison de Phèdre est ainsi tout simplement une preuve supplémentaire que les habitants de Pompéi avaient un goût pour l’art sensuel. Des scènes osées étaient présentes dans les maisons de toutes les classes sociales et dans les espaces publics de Pompéi et n’étaient en réalité absolument pas considérées comme scandaleuses ou embarrassantes. Les experts pensent en effet que les Pompéiens peignaient ces images coquines autour de leurs maisons comme des porte-bonheur pour attirer richesse et prospérité.

Vous pouvez lire le communiqué de presse du parc juste ici.