Un examen des photos de plusieurs squelettes enterrés il y a 8 000 ans au Portugal prises il y a environ soixante ans suggère que les plus anciennes momies humaines ne viennent pas d’Égypte. En réalité, elles viennent d’Europe. Les détails de l’étude sont publiés dans l’European Journal of Archaeology.
Il y a quelques années, trois rouleaux de film provenant de la fouille de deux sites funéraires mésolithiques dans la vallée du Sado, au sud-ouest du Portugal, ont refait surface. Les deux sites, Arapouco et Poças de S. Bento, avaient été fouillés dans les années 1960 par l’archéologue portugais Manuel Farinha dos Santos. La redécouverte de ces clichés a donc été une occasion unique d’enrichir notre connaissance des pratiques mortuaires de cette époque, il y a environ 8 000 ans.
Dans le cadre d’une recherche, une équipe dirigée par l’archéologue Rita Peyroteo-Stjerna, de l’Université d’Uppsala (Suède), a développé ces images et découvert de nouveaux indices sur treize de ces sépultures. Bien que certains documents et cartes dessinées à la main du site aient été conservés au Musée national d’archéologie de Lisbonne, ces photographies étaient auparavant inconnues.
La plus vieille momie du monde
Après avoir utilisé ces photographies pour reconstituer les sépultures sur les deux sites, les chercheurs ont observé que les os de l’un des squelettes étaient « hyperflexibles ». Autrement dit, ses bras et ses jambes avaient été déplacés au-delà de leurs limites naturelles. Pour les auteurs, cela laisse entendre que le corps avait été attaché avec des liens maintenant désintégrés qui ont été resserrés après la mort de l’individu.
Les chercheurs ont également souligné que les os du squelette étaient toujours articulés (maintenus ensemble) après l’enterrement, en particulier les très petits os des pieds. Or, nous savons que ces ossements se désagrègent généralement complètement lorsqu’un corps se décompose.
Enfin, les chercheurs n’ont décelé aucun signe que le sol de l’ancienne tombe s’était déplacé au fur et à mesure que les tissus mous du corps se décomposaient. Ce processus, qui rétrécit le volume du corps, entraîne en effet normalement le remplissage des sédiments environnant. Ici, ce n’était pas le cas, suggérant qu’il n’y avait pas eu de telles décompositions.
Sur la base de tous ces indices, les chercheurs pensent que ce corps a donc bien été momifié. Jusqu’à présent, nous pensions que les procédures élaborées de momification les plus anciennes étaient utilisées dans l’Égypte ancienne, il y a un plus de 4 500 ans.
Faciliter le transport du corps
Concernant la procédure, l’équipe s’est basée sur les résultats d’expériences de décomposition humaine menées au Forensic Anthropology Research Facility, de la Texas State University sur des cadavres récents.
D’après ces analyses, il semblerait que la personne décédée ait été ligotée et probablement placée sur une structure surélevée. Selon les auteurs, cela aurait permis aux fluides de décomposition de s’écouler loin du corps. Il semblerait également que la procédure de momification comprenne l’utilisation du feu pour assécher le cadavre et que les liens se soient resserrés progressivement au fil du temps, conservant son intégrité anatomique tout en augmentant la flexion des membres.
Pour les auteurs, ce processus de momification aurait permis de faciliter le transport du corps avant son enterrement. Plusieurs signes laissent à penser que d’autres corps enterrés sur le site pourraient également avoir été momifiés (même si tous ne montrent pas la même combinaison de preuves), ce qui suggère que la pratique aurait pu être répandue dans cette région à cette époque.