Cette plante médicinale aurait évolué pour échapper aux humains

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Crédits : Yang Niu

Les plantes à fleurs ont évolué pour afficher des pétales aux couleurs vives et développer des parfums enivrants. Le but : attirer un maximum d’insectes pollinisateurs dans le but d’être fécondées. Cependant, le fait de rester discrète peut également être une stratégie de survie efficace. Demandez à la Fritillaria delavayi.

La Fritillaria delavayi, retrouvée sur les pentes rocheuses des montagnes du Hengduan, en Chine, est une plante connue dans la médecine traditionnelle chinoise. Ses bulbes séchés sont en effet utilisés pour traiter les maladies cardiaques et pulmonaires. Depuis plusieurs années, la demande pour la poudre fabriquée à partir de ses bulbes n’a en revanche cessé d’augmenter, si bien que la plante est devenue plus rare, et donc plus chère. À titre d’information, un kilogramme de poudre coûte aujourd’hui environ 400 euros et nécessite la récolte de plus de 3500 spécimens individuels, qui ne commencent à fleurir qu’à leur cinquième saison.

Vous l’aurez donc compris, cette plante subit une énorme pression humaine. Néanmoins, il semblerait que la Fritillaria delavay n’ait pas dit son dernier mot. Dans la revue Current Biology, une équipe de chercheurs souligne en effet que cette plante aurait évolué pour devenir moins visible aux yeux des humains. Auparavant, elle n’était pas difficile à trouver, ses brins verts jaillissant systématiquement de la roche grise et brune environnante. Désormais, elle affiche régulièrement une teinte brune s’intégrant parfaitement dans son environnement.

« Comme d’autres plantes camouflées que nous avons étudiées, nous pensions au départ que l’évolution de la Fritillaria delavayi pouvait avoir été motivée par des herbivores, mais nous n’avons pas trouvé de tels animaux dans les environs« , explique Yang Niu, botaniste à l’Institut de botanique de Kunming et co-auteur de l’étude. « Ensuite, nous avons réalisé que les humains pouvaient être la raison« .

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Dans cette image se cache une petite Fritillaria delavayi de couleur brune. Crédits : Yang Niu

Une stratégie efficace

Dans le cadre de ces travaux, les chercheurs ont utilisé un spectromètre pour mesurer à quel point la couleur des plantes correspondait à leur environnement. Ils se sont également appuyés sur des registres conservés pour déterminer les différents endroits où les bulbes de cette plante étaient le plus souvent récoltés. En recoupant ensuite les lieux de récolte les plus investis avec les différents niveaux de camouflage, les chercheurs ont alors remarqué que les sites les plus recherchés étaient également les endroits où la coloration de la plante imitait le plus la toile de fond.

« Il est remarquable de voir comment les humains peuvent avoir un impact aussi direct et dramatique sur la coloration des organismes sauvages. Non seulement sur leur survie, mais sur leur évolution elle-même« , explique Martin Stevens, écologiste à l’Université d’Exeter et co-auteur de l’étude. « De nombreuses plantes semblent utiliser le camouflage pour se cacher des herbivores qui peuvent les manger, mais ici, nous voyons le camouflage évoluer en réponse aux collectionneurs humains« .

Et ça fonctionne ! En marge de leur étude, les chercheurs ont en effet mené une expérience informatique au cours de laquelle des participants essayaient d’identifier les plantes sur des photographies. Il en est ressorti que plus une plante affichait une teinte similaire à son environnement rocailleux, plus les participants avaient du mal à les distinguer.