Il y a quelques années, les autorités australiennes avaient signalé un changement dans la description des rencontres entre les requins et les humains. Dès lors, il n’était plus question « d’attaques », mais de » rencontres » ou de « morsures », si tant est qu’il y ait blessure. Il n’empêche que si ces attaques, ou rencontres, sont extrêmement rares, beaucoup ont eu des issues tragiques. Mais laquelle est considérée comme la plus meurtrière ?
Une torpille japonaise
Nous sommes en juillet 1945. L’USS Indianapolis est en route pour la base navale de l’île pacifique de Tinian dans le but de livrer de l’uranium et d’autres composants nucléaires. Ces derniers seront utilisés pour créer la bombe atomique « Little Boy » qui sera ensuite larguée sur la ville japonaise d’Hiroshima.
Après avoir livré sa cargaison, l’USS Indianapolis repart alors pour les Philippines. Peu après minuit, le 30 juillet, le navire est torpillé par un sous-marin japonais. Durement touché, le bateau coule en moins de quinze minutes, emportant avec lui environ 300 membres d’équipage. Les près de 900 autres sont alors laissés à la dérive en pleine mer. Beaucoup mourront de déshydratation et d’empoisonnement à l’eau salée (hypernatrémie), mais plus d’une centaine d’entre eux seront la cible des requins.
Des requins océaniques
Pour chasser, les requins utilisent leur sens de la vue et de l’odorat, mais aussi leur capacité à capter les vibrations de l’eau. C’est probablement ce qui coûta la vie à ces hommes qui se débattaient pour rester à flot.
De nombreuses victimes auraient été ciblées près de la surface de l’eau, conduisant certains experts à suggérer que des requins océaniques (Carcharhinus longimanus) ont été impliqués. Cette espèce, également suspectée dans plusieurs décès suite au naufrage du RMS Nova Scotia en 1942, est en effet connue pour être persistante et imprévisible. Elle n’est pas non plus très farouche, ce qui rend la rend particulièrement dangereuse pour les humains. Il est néanmoins également possible que d’autres espèces aient également participé.
Les survivants de l’USS Indianapolis ont décrit ces attaques de requins comme étant constantes et particulièrement brutales. « Vous entendiez un cri à glacer le sang. Et puis le corps s’enfonçait, et le gilet de sauvetage remontait« , s’était un jour le caporal survivant Edgar Harrell. Certains avaient également trop peur de bouger, de peur d’être ciblés. Selon le rapport d’un autre survivant, l’un des hommes, affamé, aurait également ouvert une boîte de Spam (la ration principale à l’époque), entraînant finalement une « frénésie alimentaire » autour de lui, avant de finir lui-même au menu.
Quatre jours d’enfer
Il aura fallu attendre quatre jours avant que les secours n’arrivent sur place. La marine américaine avait appris la nouvelle beaucoup plus tôt, mais le message d’alerte avait été considéré comme un faux. Les autorités pensaient en effet qu’il s’agissait d’une tentative japonaise d’attirer les bateaux de sauvetage américains dans un piège.
Un avion de la marine volant au-dessus de la zone avait finalement repéré les derniers survivants. Certains ont ensuite été repêchés par un hydravion piloté par le lieutenant Adrian Marks, tandis que d’autres ont été sortis de l’eau par l’USS Cecil J. Doyle. Seuls 316 hommes ont survécu.
L’histoire de l’USS Indianapolis avait ensuite été rendue célèbre par le film « Les Dents de la mer » de Steven Spielberg dans lequel le personnage de Quint, interprété par Robert Shaw, raconte son expérience alors qu’il était à bord de l’USS Indianapolis. Bien que le film ne soit pas complètement fidèle à l’histoire réelle, il a définitivement contribué à populariser la tragédie.