Phobos : ce qu’il faut savoir de cette lune de Mars déjà condamnée

Crédits : NASA

Phobos est l’une des deux lunes de Mars. Très proche de sa planète, elle n’orbite qu’à 6000 km de la surface martienne – à comparer avec les 384.000 kilomètres séparant la Lune de la Terre. Sa proximité avec la planète rouge est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles les astronomes étaient incapables de voir le satellite jusqu’à la fin du 19e siècle. Phobos, qui réalise trois révolutions autour de Mars chaque jour, se rapproche inexorablement de la planète Rouge sous l’effet des forces de marées, à raison d’environ deux mètres en moyenne tous les cent ans. Condamné, Phobos devrait s’écraser sur Mars dans 30 à 50 millions d’années approximativement. Mais selon de nouvelles modélisations, elle pourrait aussi se disloquer.

Découverte et nom

Comme Galilée avait découvert en 1610 quatre satellites à Jupiter et comme la Terre n’en possédait qu’un seul, il en fallait deux à Mars – qui se trouve entre ces deux planètes – pour que l’harmonie du Monde soit préservée. C’est ainsi que l’allemand Johannes Kepler voyait les choses au début du XVIe siècle. Sur le papier, c’est peut-être un peu tiré par les cheveux, mais l’homme en était convaincu. Le 11 août 1877, après des années de recherches sans succès, il faillit abandonner. Mais sa femme, Angelina, le poussa à continuer. La nuit suivante, le 12 août 1877, il découvrit la lune qui serait connue plus tard sous le nom de Deimos. Six jours plus tard, il fit la découverte de Phobos. Les deux lunes orbitent si près de leur planète qu’elles étaient cachées par l’éclat de Mars. Elles sont aujourd’hui deux des plus petites lunes du Système Solaire. Merci qui ? Merci madame. Le bougre avait donc raison. Mars possède bien deux satellites, dont l’existence avait été suspectée totalement par hasard, bien avant leur découverte.

Nasa
Crédits : NASA

Exploration

Il a fallu presque un siècle pour que les scientifiques commencent à comprendre ces deux petites lunes. En 1971, le Mariner 9 de la NASA devient alors le premier satellite artificiel en orbite autour d’une autre planète. Les images de l’engin révélèrent que Phobos et sa soeur Deimos sont de formes grumeleuses, sortes de pommes de terre célestes, plutôt que sphériques, comme la plupart des autres lunes. Mais les observations de Phobos ont été limitées par la rotation synchrone de la lune par rapport à sa planète, entraînant toujours la même face vers l’extérieur.

Plus tard, l’exploration se poursuivit. Le Programme Viking, à la fin des années 70, Phobos 2, la sonde soviétique, le Mars Global Surveyor, de la NASA, ou encore l’European Mars Express nous ont fourni toujours plus d’indices sur les deux lunes. Plus récemment, c’est le Rover Curiosity qui nous a fourni des images à partir du sol. Le MAVEN, de la NASA – Mars Atmosphere and Volatile Evolution mission – a également imagé la lune pour essayer d’en savoir plus sur sa composition.

Formation et composition

L’examen de Phobos et de son compagnon a donc révélé plus que leurs formes étaient étranges, non-sphériques. Les deux lunes sont de couleur gris foncé, sont fortement cratérisées, et comptent aujourd’hui parmi les objets les plus sombres et moins réfléchissants du système solaire. Après analyses, les scientifiques ont conclu qu’elles étaient composées de chondrites carbonées type I ou II, ce matériau qui compose les astéroïdes et les planètes naines. La composition et la forme étrange a également conduit certains scientifiques à conclure que Phobos et Deimos provenaient de la ceinture d’astéroïdes. La gravité de Jupiter aurait ensuite poussé les deux lunes en orbite autour de Mars.

Néanmoins, tous ne sont pas d’accord. Les deux lunes ont une orbite presque circulaire, ce qui est inhabituel pour des objets capturés. La mince atmosphère de Mars aurait du mal à fournir le freinage nécessaire pour les régler dans leurs orbites actuelles. De plus, les lunes ne sont pas aussi denses que les objets dans la ceinture d’astéroïdes. Au lieu de cela, les deux lunes auraient pu se former autour de Mars, victimes de la gravité. Une naissance plus violente aurait aussi pu se produire par collision. Un grand impacteur aurait percuté la planète rouge, envoyant des morceaux et poussières de roche dans les airs, avant de se rapprocher sous l’effet gravitationnel. Une lune existante aurait également pu avoir été détruite, créant ainsi des décombres qui formeraient plus tard Phobos et Deimos.

Comme vous pouvez le voir, les incertitudes quant à l’histoire de ces deux lunes demeurent.

À la surface

La plus grande des deux lunes, Phobos, a un diamètre de 17 par 22 par 18 km. La surface est recouverte d’une poudre poussiéreuse d’un mètre d’épaisseur, probablement causée par un bombardement de météorites. Au sol, un grand cratère d’impact domine la lune – Le Stickney Crater mesure près de 9,5 km de diamètre. La lune est marquée par de longues rainures. En 2015, une étude de la NASA suggérait que ces rainures étaient en fait les premiers signes de brisure de la lune, dues aux contraintes de marée induites par la gravité de Mars. Sous leur effet, la lune se déforme et finira par craquer dans quelques dizaines de millions d’années, car sa structure interne est très fragile. La lune martienne éclatera alors probablement en morceaux qui s’écraseront sur Mars. Ou bien elle se disloquera avant. Quoi qu’il arrive, Phobos est d’ores et déjà condamnée.

Quant aux températures, elles varient, atteignant des sommets de 25 degrés Fahrenheit (moins 4 degrés Celsius) pendant la journée, alors que les nuits peuvent descendre à moins 170 degrés F (moins 112 degrés C). Bref, ça caille sur Phobos.

Et l’avenir ?

Sachez que la NASA n’en a pas encore fini avec Phobos. L’agence spatiale envisage le déploiement de petites sondes hérisson, comme à la surface de la lune. Une autre idée suggère d’explorer directement les deux lunes martiennes. Baptisé PADME (Phobos and Deimos Mars Environnement),  un vaisseau spatial serait envoyé pour tenter de comprendre d’où les lunes sont originaires (ceinture d’astéroïdes, formées autour de Mars, ou d’autres scénarios). Si elle est sélectionnée, cette mission pourrait être lancée en 2020 et arriver en 2021.

Certains partisans des vols habités ont également suggéré à la NASA de faire atterrir des gens sur Phobos avant Mars ; La NASA, elle, espère envoyer une mission humaine sur place, là-bas, dans les années 2030…

Source