Dans les profondeurs des forêts tropicales de Nouvelle-Calédonie, une humble plante dissimule un secret remarquable. Selon des chercheurs des Jardins Botaniques Royaux de Kew et de l’Institut Botànic de Barcelone, la fougère fourche de Nouvelle-Calédonie, scientifiquement connue sous le nom de Tmesipteris oblancolata, détient en effet le record mondial pour la plus grande quantité d’ADN stockée dans le noyau d’un organisme vivant sur notre planète.
Un génome gigantesque
Le genre Tmesipteris, qui a commencé à évoluer il y a environ 350 millions d’années, est un groupe peu étudié composé d’environ quinze espèces, principalement présentes dans diverses îles du Pacifique et en Océanie. Jusqu’à présent, seuls deux membres de ce genre avaient été étudiés pour la taille de leur génome, révélant des génomes gigantesques de 73,19 et 147,29 paires de gigabases (Gbp) respectivement pour T. tannensis et T. obliqua.
Une expédition menée en 2023 par les Drs Jaume Pellicer et Oriane Hidalgo en Nouvelle-Calédonie a cette fois permis de révéler le génome gigantesque de T. oblancolata. Il s’avère que cette petite plante cache un potentiel génétique monumental qui dépasse de loin celui de nombreuses autres espèces. Les chercheurs ont en effet mesuré un record impressionnant de 160,45 Gbp. Cela représente une augmentation de près de 7 % par rapport au précédent record détenu par l’espèce de plante à fleurs japonaise Paris japonica et plus de 50 fois la quantité d’ADN que nous portons.
Pour mieux vous en rendre compte, notez que l’ADN de T. oblancolata mesure plus de 106 mètres de long une fois démêlé. Pour obtenir cette estimation, les chercheurs ont dû isoler les noyaux de milliers de cellules de la plante, les colorer avec un colorant spécifique à l’ADN, puis mesurer la quantité de colorant liée à l’ADN dans chaque noyau.
Défis et diversité génétique
Notez que bien que posséder un génome plus grand puisse sembler être un avantage évolutif, ce n’est pas toujours le cas. En réalité, les plantes avec des génomes plus grands rencontrent souvent des défis majeurs. Par exemple, ces plantes ont tendance à être moins efficaces dans le processus de photosynthèse, crucial pour la production d’énergie à partir de la lumière du Soleil. En raison de leur génome plus important, elles nécessitent également plus de nutriments pour croître et prospérer.
Cependant, malgré ces inconvénients apparents, la diversité génétique observée dans ces plantes aux génomes gigantesques soulève des questions fascinantes sur les limites biologiques de ce qui est possible. La nature a ses propres voies et cette diversité génétique peut offrir des avantages cachés ou des adaptations uniques à des environnements spécifiques.
Par exemple, certaines de ces plantes pourraient avoir développé des mécanismes uniques pour survivre dans des conditions environnementales extrêmes, tandis que d’autres possèderaient des caractéristiques qui les rendent résistantes à certaines maladies ou certains prédateurs. Ainsi, bien que la taille du génome puisse poser des défis, elle peut également être une source de diversité et d’adaptation dans le monde végétal. Cette complexité souligne la nécessité continue pour les scientifiques d’explorer et de comprendre la diversité génétique des plantes, ce qui peut éclairer notre compréhension de l’évolution et de l’adaptation dans le règne végétal.