Pacifique : l’apparition du ‘Blob’ attribuĂ©e au rĂ©chauffement climatique

Crédits : NASA Physical Oceanography Distributed Active Archive Center.

Une étude publiée le 21 juin 2022 dans la revue scientifique Communications Earth and Environment a confirmé la contribution majeure du réchauffement climatique au phénomène dit du « Blob » qui affecte de façon récurrente le nord-est du Pacifique depuis une dizaine d’années.

De 2013 à 2016, une zone d’eau anormalement chaude occupait le nord-est du Pacifique. La vague de chaleur marine a pris naissance fin 2013 au niveau de la baie d’Alaska, puis s’est étendue jusqu’à la péninsule de Basse-Californie au cours des mois suivants. Des températures de 2 °C à 4 °C supérieures aux normales étaient alors observées sur plus de quatre millions de kilomètres carrés. Plusieurs répliques du phénomène sont survenues, dont une notable entre 2019 et 2021.

The Blob, un tueur silencieux

Cette anomalie climatique a été surnommée The Blob par Nick Bond, un climatologue de l’Université de Washington aux États-Unis, en référence à la créature d’un film d’horreur de 1958 et de son remake en 1988. Rapidement, le Blob a attiré l’attention, et ce, pas seulement à cause de son nom sordide, mais aussi et surtout en raison des impacts écologiques et économiques qui lui étaient associés.

En effet, la chaleur et le dĂ©ficit en nutriments des eaux de surface ont fortement limitĂ© la production de plancton, organismes situĂ©s Ă  la base du rĂ©seau trophique marin. Par consĂ©quent, la perturbation biologique a remontĂ© la chaĂ®ne alimentaire et a entraĂ®nĂ© un vĂ©ritable dĂ©sastre Ă©cologique. En outre, le Blob et la circulation anticyclonique qui l’accompagne ont amenĂ© un temps anormalement sec sur l’Ouest amĂ©ricain.

La contribution essentielle du réchauffement global

Dans une Ă©tude, des chercheurs ont montrĂ© que la survenue du Blob ne relève pas de la simple fluctuation naturelle du climat, mais porte une marque claire du rĂ©chauffement global dĂ» aux activitĂ©s humaines. En effet, les rĂ©sultats obtenus Ă  l’aide d’une mĂ©thode d’analyse causale contrefactuelle et d’une analyse univariĂ©e indiquent que l’épisode de 2019-2021 avait moins de 1 % de chance de se produire dans un monde non affectĂ© par les Ă©missions anthropiques de gaz Ă  effet de serre et d’aĂ©rosols.

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Le Blob tel qu’observĂ© en 2019-2021 (contours blancs) et les tendances de tempĂ©ratures Ă  la surface de la mer entre 1996 et 2021 (Ă©chelle de couleurs, en °C par dĂ©cennie). CrĂ©dits : A. Barkhordarian & coll. 2022.

« Cette piscine chaude continuera d’Ă©lever la tempĂ©rature de l’eau Ă  l’avenir, augmentant Ă  la fois la frĂ©quence et l’intensitĂ© des vagues de chaleur marines locales », note Armineh Barkhordarian, auteure principale de l’étude. « La forte augmentation de la tempĂ©rature moyenne de l’eau pousse les Ă©cosystèmes Ă  leurs limites ».

Avec un rĂ©chauffement des eaux du Pacifique nord-est de 0,5 °C par dĂ©cennie au cours des vingt-cinq dernières annĂ©es, les conditions typiques de l’étĂ© se sont Ă©tendues et allongĂ©es de près d’un mois. Aussi, on ne sera pas Ă©tonnĂ©s de constater une multiplication par trois de l’occurrence des vagues de chaleur marines entre les pĂ©riodes 1982-1999 et 2000-2020.

La chercheuse souligne que ces dernières sont « un lourd fardeau pour les Ă©cosystèmes touchĂ©s, car elles reprĂ©sentent non seulement une menace Ă©norme pour la biodiversitĂ©, mais peuvent Ă©galement pousser ces Ă©cosystèmes marins au-delĂ  d’un point de bascule, après quoi ils ne peuvent plus se rĂ©tablir ». Or, au rythme actuel, ce phĂ©nomène continuera Ă  gagner en frĂ©quence, en intensitĂ© et en durĂ©e, Ă  l’image de nos vagues de chaleur atmosphĂ©riques.