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Les humains étaient en Amérique du Sud il y a au moins 25 000 ans. Voici comment nous le savons

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Interprétation d'artiste d'un humain fabriquant un pendentif à partir d'un os de paresseux terrestre géant il y a environ 25 000 ans dans l'actuel Brésil. Crédits : Júlia D'Oliveira

L’analyse des restes osseux d’un paresseux géant éteint transformés en pendentifs suggère que les premiers humains sont arrivés en Amérique du Sud beaucoup plus tôt que prévu. 

Une grotte exceptionnelle

L’abri sous roche de Santa Elina est une célèbre formation géologique située dans la région de l’État de Pará, au Brésil, près du village de Monte Alegre. Imaginez une grande cavité rocheuse située dans une falaise calcaire, sur les rives de la rivière Gurupi. La grotte mesure environ trente mètres de long et dix mètres de haut.

Cet abri est considéré comme l’un des sites archéologiques les plus importants d’Amérique du Sud. Et pour cause, des fouilles archéologiques menées sur place y ont une occupation humaine continue remontant à plusieurs milliers d’années. Les vestiges découverts comprennent des outils en pierre, des artefacts en céramique, des ossements d’animaux et des peintures rupestres. Ces dernières incluent des motifs colorés représentant des figures humaines, des animaux et des symboles abstraits.

Des restes de paresseux travaillés par la main de l’Homme

Plus récemment, des chercheurs de l’Université fédérale de São Carlos, au Brésil, ont identifié trois ostéodermes de paresseux, des dépôts osseux qui forment une sorte d’armure protectrice sur la peau d’animaux, trouvés à proximité d’outils en pierre.

Pour rappel, ces paresseux géants étaient beaucoup plus grands que les paresseux actuels. Les estimations de leur poids varient, mais certaines espèces auraient pu peser jusqu’à quatre tonnes. Ces animaux avaient une morphologie adaptée à leur mode de vie terrestre. Leurs membres antérieurs étaient robustes et puissants, munis de griffes massives, tandis que leurs membres postérieurs étaient plus courts. Ils se déplaçaient en utilisant une démarche quadrupède, mais ils étaient également capables de se tenir sur leurs pattes arrière pour atteindre les feuilles des arbres. L’extinction des paresseux géants à la fin du Pléistocène, il y a environ 11 000 ans est généralement attribuée à des changements environnementaux et à une pression accrue de la prédation humaine.

Les ossements découverts ici arboraient de minuscules trous que seuls des humains auraient pu faire. En utilisant une combinaison de techniques de visualisation microscopiques et macroscopiques, l’équipe de scientifiques a en effet découvert que ces ostéodermes et même leurs minuscules trous avaient été polis. Les chercheurs ont également identifié des traces d’incisions d’outils en pierre et des marques de grattage sur les artefacts. « Ces observations montrent que ces trois ostéodermes ont été modifiés par l’homme pour être transformés en artefacts, probablement des ornements personnels« , écrivent les chercheurs dont les travaux sont publiés dans les Actes de la Royal Society B.

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Des chercheurs brésiliens ont découvert trois ostéodermes géants de paresseux polis et percés de trous. Crédits : Thais Pansani

Une présence de plus en plus précoce

La datation de ces restes suggère qu’ils ont entre 25 000 et 27 000 ans. Si tel est effectivement le cas, alors il s’agirait de l’une des premières preuves de l’existence d’humains dans les Amériques. Pour rappel, il est toujours officiellement admis que le peuplement des Amériques s’est produit bien plus tard, il y a environ 13 500 ans (culture Clovis). Et le scepticisme quant à une occupation antérieure persiste encore. Malgré tout, ces nouvelles dates sont importantes en raison des preuves croissantes, mais toujours controversées d’une occupation humaine plus ancienne en Amérique du Sud, comme en témoignent certains restes isolés datés d’il y a 22 000 ans retrouvés dans l’abri sous roche Toca da Tira Peia, dans l’est du Brésil.

D’ici quelques années, il sera donc probablement admis que la présence humaine dans la région était plus précoce que prévu. Par ailleurs, de nombreux sites d’Amérique du Sud n’ont pas encore été entièrement étudiés, ce qui signifie que le débat sur l’arrivée de l’homme dans les Amériques est loin d’être clos.