Une Ă©quipe de chercheurs annonce avoir isolĂ© d’anciens micro-organismes piĂ©gĂ©s depuis 830 millions d’annĂ©es dans des cristaux de sel en Australie grĂ¢ce Ă des moyens non invasifs. Sont-ils morts depuis tout ce temps ou simplement en dormance ? Les chercheurs s’interrogent.
Une découverte exceptionnelle
Il y a plus de 800 millions d’annĂ©es, de petits organismes unicellulaires se sont retrouvĂ©s enfermĂ©s dans de minuscules poches de liquide plus petites que la largeur d’un cheveu humain coincĂ©es elles-mĂªmes dans de l’halite (ou sel). Ă€ l’Ă©poque, cette vie microscopique Ă©voluait au niveau de l’actuelle Australie centrale dans un environnement aqueux peu profond et salĂ©. Des chercheurs de l’UniversitĂ© de Virginie-Occidentale ont fait cette incroyable dĂ©couverte en examinant les cristaux de sel Ă l’aide de la microscopie optique, ce qui signifie que ces organismes anciens n’ont pas perturbĂ© les poches de liquide.
Pour ces travaux, les chercheurs ont prĂ©levĂ© des Ă©chantillons d’halite Ă 1 481 et 1 520 mètres sous la surface de la formation australienne de Browne. Après avoir coupĂ© cette halite en tranches d’un millimètre d’Ă©paisseur, ils ont rĂ©alisĂ© un examen microscopique en utilisant Ă la fois la lumière visible et ultraviolette, grossissant jusqu’Ă deux mille fois le contenu des poches de liquide Ă l’intĂ©rieur et se concentrant sur les cristaux primaires qui se sont formĂ©s il y a 830 millions d’annĂ©es.
Ă€ l’intĂ©rieur, les chercheurs ont alors dĂ©couvert des eucaryotes (algues et champignons avec des noyaux cellulaires distincts) et des procaryotes (bactĂ©ries et archĂ©es sans noyaux). Ces espèces (qui n’ont pas Ă©tĂ© identifiĂ©es) mesurent d’un demi-micron Ă cinq microns de diamètre. Ă€ titre de comparaison, un cheveu humain mesure environ soixante-dix microns de large.
Une seconde vie possible ?
Des micro-organismes anciens ont dĂ©jĂ Ă©tĂ© trouvĂ©s dans des cristaux de sel, les plus anciens remontant Ă la pĂ©riode permienne (environ 250 millions d’annĂ©es). En revanche, la plupart de ces Ă©tudes ont Ă©tĂ© destructrices. Les chercheurs ont en effet extrait les fluides enfermĂ©s Ă l’intĂ©rieur des cristaux soit avec une seringue, soit en broyant ou dissolvant les cristaux pour analyser leur contenu. Ici, la mĂ©thode non invasive utilisĂ©e par l’Ă©quipe signifie que la matière et ce qu’elle contient n’ont pas Ă©tĂ© perturbĂ©s.
Nous savons par ailleurs que les micro-organismes qui aiment le sel sont capables de se mettre en sommeil ou de modifier leur mĂ©tabolisme pour rester en vie pendant de longues pĂ©riodes. En 2000, des scientifiques avaient d’ailleurs affirmĂ© avoir ressuscitĂ© des bactĂ©ries vieilles de 250 millions d’annĂ©es, bien qu’ils n’aient pas pu prouver de manière dĂ©finitive qu’il ne s’agissait pas de contaminants modernes. D’autres micro-organismes très anciens ont par ailleurs Ă©tĂ© ressuscitĂ©s avec plus de certitude en 2020, notamment des bactĂ©ries vieilles de 101,5 millions d’annĂ©es provenant des sĂ©diments des fonds marins.
Les chercheurs n’ont Ă ce stade toujours pas percĂ© les cristaux pour savoir si ces micro-organismes australiens pourraient avoir une chance de vivre Ă nouveau. Leur statut est donc pour le moment inconnu.
Ces travaux pourraient Ă©galement Ăªtre utilisĂ©s pour la recherche extraterrestre. Les roches de la formation de Browne se sont en effet formĂ©es dans un environnement comparable Ă l’environnement qui existait probablement sur l’ancienne Mars. Les mĂ©thodes utilisĂ©es ici pour Ă©tudier les organismes pourraient donc Ă©galement Ăªtre utilisĂ©es pour rechercher des micro-organismes disparus depuis longtemps de la planète rouge.