La matière noire, cette composante invisible de l’univers qui constitue une grande partie de sa masse, continue de défier les scientifiques. Si son existence est admise, sa nature demeure un mystère. Pour la découvrir, une nouvelle étude propose d’utiliser des détecteurs d’ondes gravitationnelles.
Les ondes gravitationnelles pour traquer la matière noire
Détectées pour la première fois en 2015, les ondes gravitationnelles ont radicalement transformé notre perception de l’univers. Ces ondulations de l’espace-temps, prédites par Albert Einstein il y a plus d’un siècle, permettent en effet aux astronomes d’étudier les phénomènes les plus violents du cosmos, comme la fusion de trous noirs. Ces découvertes ont non seulement validé une prédiction majeure de la relativité générale, mais ont également ouvert de nouvelles perspectives pour explorer les mystères de l’univers.
Cependant, les ondes gravitationnelles pourraient bien nous révéler bien plus que les secrets des trous noirs. En effet, elles pourraient être utilisées pour sonder une autre énigme cosmique : la matière noire.
Cette substance invisible, dont la présence est déduite de ses effets gravitationnels sur la matière visible, constitue environ 85% de la matière totale de l’univers. Malgré de nombreuses recherches, sa nature exacte reste un mystère. Les scientifiques émettent l’hypothèse que la matière noire pourrait être constituée de particules élémentaires interagissant très faiblement avec la matière ordinaire, mais aucune expérience n’a encore permis de le prouver.
Comment ça marche ?
Une équipe de chercheurs, dirigée par le Dr Alexandre Sébastien Göttel de l’Université de Cardiff, s’est concentrée sur une forme particulière de matière noire : la matière noire à champ scalaire.
Contrairement à la matière ordinaire composée de fermions (électrons, quarks…), la matière noire à champ scalaire serait constituée de bosons, des particules qui obéissent à des règles différentes. Ces particules seraient très légères et interagiraient très faiblement avec la matière ordinaire, ce qui expliquerait pourquoi elle est si difficile à détecter directement. L’intérêt de cette hypothèse est qu’elle prédit des interactions spécifiques avec les champs gravitationnels, ce qui en fait un candidat prometteur pour être détecté par les interféromètres comme l’observatoire d’ondes gravitationnelles LIGO.
Pour rappel, les détecteurs d’ondes gravitationnelles sont des instruments extrêmement sensibles, capables de détecter de minuscules variations dans l’espace-temps. Plus précisément, ces installations fonctionnent en envoyant des faisceaux laser le long de bras perpendiculaires de plusieurs kilomètres de long. Lorsqu’une onde gravitationnelle traverse ces instruments, elle déforme légèrement l’espace-temps, ce qui modifie la longueur des bras et donc le trajet des faisceaux laser. En mesurant ces infimes variations, les scientifiques peuvent alors détecter le passage d’une onde gravitationnelle.
Ce que proposent ici les chercheurs, c’est que les variations pourraient être causées non seulement par les ondes gravitationnelles produites par des événements cosmiques violents, mais aussi par les interactions entre les composants du détecteur et la matière noire environnante.
Aucune trace… pour le moment
Dans le cadre d’une récente étude, les chercheurs ont analysé les données collectées par le LIGO en cherchant des signaux caractéristiques de l’interaction entre les ondes gravitationnelles et la matière noire. Ils ont également développé des modèles théoriques pour simuler l’effet de la matière noire sur les instruments et ont comparé ces simulations aux données réelles.
Bien que l’équipe n’ait encore trouvé aucune preuve directe de l’existence de cette matière noire, ils ont réussi à établir de nouvelles limites sur sa nature. En d’autres termes, ils ont pu affiner notre compréhension de ce à quoi la matière noire ne ressemble pas.