En avril dernier, des chasseurs d’aurores amateurs peinaient à expliquer l’origine d’une étrange lumière dans les cieux nordiques, qui était un peu différente des rideaux de couleurs chatoyants habituels. Ils l’ont nommée STEVE.
Techniquement – et parce que les scientifiques adorent les acronymes – STEVE signifie Strong Thermal Emission Velocity Enhancement. Cet étrange phénomène atmosphérique a été découvert il y a quelques mois grâce au travail des amateurs d’aurores et de scientifiques spécialisés dans l’étude de l’atmosphère. Ce curieux ruban violet et vert fut en effet observé pour la première fois en 2016 par le groupe Facebook Alberta Aurora Chasers. Depuis, plus de cinquante rapports d’observateurs ont été publiés, qui ne font état ni d’une aurore boréale ni d’une aurore photonique. Mais alors, de quoi s’agit-il exactement ?
Certains ont tout d’abord pensé à une aurore à protons, qui, bien que n’étant généralement pas considérée comme visible, a été suggérée pour expliquer certaines des caractéristiques étranges de STEVE. Le physicien Eric Donovan, de l’Université de Calgary au Canada, n’était cependant pas convaincu, préférant accorder une attention particulière à la mission Swarm de l’ESA. Cette dernière vise à étudier le champ magnétique terrestre pour étudier ces phénomènes plus en détail. Alors que le satellite volait tout droit sur STEVE, les données de l’instrument ciblant le champ électrique ont alors enregistré une hausse de température de 3 000° Celsius ! Les relevés ont également révélé que le ruban mesurait 25 kilomètres de large et accélérait vers l’ouest à une vitesse de 6 kilomètres par seconde.
Il y a quelques mois, Donovan avait laissé entendre qu’il avait une idée de ce qui se cachait derrière STEVE, tout en refusant de commenter et préférant attendre que lui et son équipe aient publié leurs résultats – ce qu’ils viennent de faire. Il se trouve que STEVE est une DID : une dérive ionique sub-aurorale. Précédemment décrits comme des jets de polarisation, ces phénomènes sont en fait connus par les astronomes depuis au moins 40 ans. Il s’agit ici de flux supersoniques à courte durée de vie constitués de particules chargées. Ils se forment lorsque les lignes du champ magnétique de notre planète se reconfigurent soudainement, envoyant des averses de particules chargées d’énergie élevée s’écraser dans notre atmosphère. Dans ce cas précis, l’angle de ces particules frappant l’atmosphère crée la mince bande de champs électriques intenses qui se déplace à grande vitesse.
Ce genre de phénomène n’avait pourtant jamais été vu à l’œil nu auparavant. « Maintenant, nos caméras sont suffisamment sensibles pour les détecter », explique le chercheur. « Et les yeux et l’intellect des gens sont aujourd’hui assez critiques pour en remarquer l’importance ». Finalement, il s’avère ainsi que STEVE est remarquablement commun. Il est aujourd’hui reconnu grâce aux observations terrestres, aux satellites, à l’accès facilité aux données et à une armée de scientifiques citoyens aujourd’hui en mesure d’appréhender le phénomène.
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