Mais que se passe-t-il avec le noyau interne de la Terre ?

noyau de la Terre
Crédits : Rostislav Zatonsky

Une analyse de plusieurs milliers de tremblements de terre suggère que le noyau interne a cessé de tourner plus vite que le reste de la planète dès 2009. Cependant, tous les chercheurs ne sont pas d’accord.

La « graine » de la Terre

Nous savons depuis les années 30 que notre planète abrite en son cÅ“ur une énorme « graine » de 7 000 kilomètres de large. Sa présence fut déterminée en étudiant la manière dont les ondes sismiques des tremblements de terre se propageaient à travers la Terre. D’après ces changements de vitesse, ce noyau terrestre se composerait d’un centre solide de 2 400 kilomètres de large composé principalement de fer et d’une coquille de fer liquide (et d’autres éléments). En se cristallisant à la surface du noyau interne, le fer du noyau externe modifie alors la densité du liquide externe, entraînant des mouvements de barattage qui maintiennent le champ magnétique terrestre.

Par ailleurs, nous savons depuis longtemps que la rotation du noyau interne peut aussi bien accélérer que ralentir. Et pour cause, deux forces titanesques semblent se battre pour le contrôle du cÅ“ur du monde. D’un côté, le champ magnétique terrestre, généré par des courants de fer tourbillonnants dans le noyau externe liquide, tire sur le noyau interne, ce qui le fait tourner. D’un autre côté, le manteau, la couche mucilagineuse retrouvée entre la croûte et le noyau externe, ralentit sa rotation.

Cela étant dit, en 1996, une étude révélait que le temps de parcours des ondes sismiques émanant des tremblements de terre avait évolué à partir des années 60. Ces résultats suggéraient alors que le noyau interne tournait plus vite que le manteau de la planète, la couche située juste au-delà du noyau externe. Des études ultérieures ont affiné ces estimations, confirmant que le noyau interne tournait plus vite que le manteau d’environ un dixième de degré par an. Cependant, tout le monde ne s’accorde pas sur ces analyses.

Certains scientifiques pensent en effet qu’il n’existe aucune « super-rotation », arguant que les différences dans les temps de propagation des ondes des tremblements de terre sont plutôt causées par des changements physiques à la surface du noyau interne. D’autres estiment que cette « super-rotation » se produit principalement à des périodes distinctes, rejetant ainsi l’idée d’un phénomène régulier.

Il y a quelques mois, en utilisant des données sur les ondes sismiques générées par les explosions nucléaires américaines en 1969 et 1971, des chercheurs avaient rapporté que le noyau interne de la Terre avait en réalité tourné plus lentement que le manteau durant ce laps de temps, avant d’accélérer sa rotation après 1971.

noyau de la Terre
Crédits : Johan Swanepoel/SPL

Un changement majeur en 2009

Cette étude, basée sur une analyse des tremblements de terre enregistrés principalement entre 1995 et 2021, suggère que cette super-rotation du noyau interne s’était arrêtée entre 2009 et 2011. Les chercheurs affirment avoir observé le changement à divers points du globe, ce qui, selon eux, confirme qu’il s’agit d’un véritable phénomène planétaire lié à rotation du noyau, et pas seulement un changement local sur la surface du noyau interne. Les données suggèrent que le noyau interne pourrait même être en train de revenir à une sous-rotation (tourner moins vite que le manteau).

Si tel est le cas, il se trame probablement quelque chose d’important avec les forces magnétiques et gravitationnelles, qui régissent la rotation du noyau interne. De tels changements pourraient lier le noyau à des phénomènes géophysiques plus larges tels que des augmentations ou des diminutions de la durée d’une journée sur Terre.

Cependant, il ne fait aucun doute que ces travaux feront réagir plus d’un scientifique. Le meilleur moyen d’en être certain serait d’accumuler davantage de données. Des enregistrements continus de données sismiques sur une longue période seraient en effet essentiels pour surveiller le mouvement du cÅ“ur de la planète.

Les détails de l’étude sont publiés dans Nature Geoscience.