En analysant à distance un échantillon de surface martienne recueilli par le rover Curiosity en 2017, une équipe de la NASA a récemment identifié de nouvelles molécules organiques. Ces dernières n’avaient en effet jamais été détectées jusqu’à présent à la surface de Mars. Les détails de l’étude sont rapportés dans la revue Nature.
Une découverte passionnante
Les expériences de chimie humide sur l’instrument d’analyse d’échantillons du rover Curiosity ont été conçues pour faciliter les analyses de spectrométrie de masse par chromatographie en phase gazeuse de molécules polaires telles que les acides aminés et les acides carboxyliques.
Dans le cadre d’une nouvelle étude, une équipe s’est concentrée sur l’analyse de plusieurs échantillons prélevés dans les dunes de « Bagnold » en 2017. Placés dans une coupelle préalablement remplie de réactifs chimiques, ces échantillons n’ont révélé aucun dérivé d’acide aminé. En revanche, les chercheurs ont isolé de l’acide benzoïque et de l’ammoniac, deux indicateurs possibles de la vie ancienne. Sur Mars, c’est une première.
Bien qu’il s’agisse d’une découverte passionnante, celle-ci ne peut en revanche démontrer avec certitude que des formes de vie à base de carbone vivaient autrefois à la surface de la planète rouge. L’équipe souligne en effet dans son article que ces molécules pourraient également être le résultat de processus géologiques. Toutefois, c’est toujours ça de pris.
« Cette expérience est définitivement un succès« , s’enthousiasme Maëva Millan, du Goddard Spaceflight Center de la NASA et principale auteure de ces travaux. « Bien que nous n’ayons pas trouvé ce que nous cherchions, des biosignatures, nous avons montré que cette technique était vraiment prometteuse« .
Ce n’est pas la première fois que Curiosity détecte des molécules organiques dans le sol martien. Cette nouvelle découverte élargit donc cette liste.
Origine biologique ou abiotique ?
En mars 2020, Curiosity s’était également illustré en isolant un groupe intrigant de composés organiques : les thiophènes. Sur Terre, ces derniers se produisent généralement dans le kérogène, le charbon, le pétrole brut, les stromatolites, les microfossiles et, assez curieusement, dans les truffes blanches.
Constitués de quatre atomes de carbone et d’un atome de soufre, les thiophènes peuvent se former dans le cadre d’un processus de réduction des sulfates qui peut être déclenché de deux façons.
La première n’implique pas la présence de vie. Dans ce cas précis, pour obtenir des thiophènes, les composés précurseurs doivent être chauffés à 120°C. Sur Mars, ces conditions peuvent se présenter lorsque des météorites viennent frapper la surface (ce qui se produit souvent).
Toutefois, des bactéries pourraient également enclencher ce processus de réduction des sulfates. Pour ce faire, les conditions environnementales doivent être plus douces qu’elles ne le sont aujourd’hui sur la planète rouge. Il y a un peu plus de trois milliards d’années, Mars paraissait en revanche beaucoup plus accueillante. Son atmosphère était en effet plus épaisse, permettant des températures plus chaudes et la présence d’eau liquide en surface.
Tout comme l’acide benzoïque et de l’ammoniac, ces thiophènes pourraient donc avoir une origine biologique ou abiotique. En espérant que le rover Perseverance, équipé différemment de son homologue, pourra un jour fera la lumière sur ces molécules.