La paréidolie est un phénomène où les individus perçoivent des formes, des visages ou des motifs significatifs dans des objets ou des modèles visuels aléatoires. Cela se produit lorsque le cerveau humain tente de donner un sens à des informations visuelles en reconnaissant des motifs familiers, même lorsque ces motifs n’existent pas réellement. Selon de nouvelles recherches, ce phénomène pourrait être exacerbé chez les nouvelles mères à cause d’une hormone très connue : l’ocytocine.
Un héritage évolutif
Les primates, nous compris, ont développé des cerveaux hautement spécialisés (cortex facial) pour la reconnaissance des visages. Cette évolution est le résultat de millions d’années d’adaptation à la vie sociale où cette capacité a joué un rôle crucial dans l’interaction et la communication. La capacité à reconnaître les visages est en effet essentielle pour identifier les membres de leur groupe, lire les émotions, détecter les signes de dominance ou de soumission, et maintenir des liens sociaux.
Considérez ainsi notre tendance à percevoir des visages dans notre environnement visuel comme un héritage évolutif. Cependant, bien que ce phénomène, connu sous le nom de paréidolie faciale, soit une expérience courante, on ne sait pas si son intensité est la même tout au long de notre vie ou si certains facteurs peuvent la faire évoluer.
Une étude concentrée sur l’ocytocine
Compte tenu des preuves selon lesquelles le comportement face aux stimuli du visage est modulé par le neuropeptide ocytocine, il a été avancé que les participants aux étapes de la vie associées à des niveaux élevés de cette hormone pourraient être plus susceptibles de faire face à la paréidolie.
Dans le cadre de ces nouveaux travaux, des chercheurs de l’Université du Queensland, en Australie, ont testé cette hypothèse en évaluant la susceptibilité à la paréidolie chez deux groupes de femmes. Le premier intégrait des femmes enceintes (augmentation progressive des niveaux d’ocytocine), tandis que le second était constitué de nouvelles mères (très haut niveau d’ocytocine) après l’accouchement. Un groupe de femmes non enceintes servait également de groupe témoin.
Les chercheurs ont ensuite montré une collection de 320 images dans un ordre aléatoire à près de 380 de ces participantes. Elles ont ensuite été invitées à les classer sur une échelle de 11 points selon leur capacité à voir ou non un visage. Sur l’échantillon, 32 images représentaient de vrais visages humains, 32 représentaient de simples objets sans aucun visage, tandis que le reste représentait des objets qui semblaient en avoir.
Un phénomène exacerbé chez les nouvelles mamans ?
Dans l’ensemble, toutes les femmes ont facilement identifié les vrais visages humains. Aucune d’entre elles n’a également repéré de visage dans les 32 images qui n’en représentaient pas. La différence n’est apparue qu’avec les images représentant des visages illusoires. Les chercheurs ont en effet constaté que celles qui venaient d’accoucher évaluaient ces objets représentés comme étant plus « ressemblant à des visages » que les autres. Autrement dit, leur expérience de la paréidolie semblait exacerbée.
Les chercheurs, ces résultats pourraient donc bel et bien avoir un lien avec les niveaux élevés d’ocytocine qui régule de nombreux processus corporels impliqués dans la reproduction et le comportement social, dont profitent les jeunes mamans.
« L’ocytocine est connue pour réduire le stress, améliorer l’humeur et favoriser les comportements maternels comme la lactation [production et sécrétion de lait maternel]. Elle pourrait donc contribuer à une sensibilité accrue dans la perception des visages dans les objets« , précise Jessica Taubert, principale auteure de l’étude.
Il existe cependant une limite à cette étude. Les chercheurs n’ont en effet pas mesuré directement les niveaux d’ocytocine des participantes. Aussi, il est possible que d’autres facteurs puissent provoquer ces différences entre les groupes.
Les détails de ces travaux sont publiés dans les Biology Letters.