Lâuranium (lâĂ©lĂ©ment radioactif qui alimente les centrales nuclĂ©aires et qui se trouve naturellement dans la croĂ»te terrestre) est gĂ©nĂ©ralement extrait de grands dĂ©pĂŽts de grĂšs enfouis en profondeur. Pendant de nombreuses annĂ©es, les chercheurs ont pensĂ© que dans ces dĂ©pĂŽts, lâuranium sâĂ©tait formĂ© pendant des millions dâannĂ©es par le biais de rĂ©actions chimiques de soufre et dâautres composĂ©s non biologiques.
Les scientifiques ont rĂ©cupĂ©rĂ© des Ă©chantillons de noyaux de sĂ©diments Ă prĂšs de 200 m sous terre Ă partir de dĂ©pĂŽts dâuranium sur le site du Wyomingâs Smith Ranch Highlands. En caractĂ©risant la composition minĂ©ralogique et microbienne des Ă©chantillons, ils ont dĂ©couvert une nouvelle forme d’uranium biologiquement produite.
Thomas Borch, professeur de sciences de la terre et des cultures et gĂ©nie civil/environnemental, et Amrita Bhattacharrya, ancienne chercheuse postdoctorale du laboratoire de Borch, offrent des preuves d’une nouvelle alternative concernant l’uranium piĂ©gĂ© sous terre. Il a toujours Ă©tĂ© dit que dans les gisements de minerai, l’uranium se retrouve surtout sous forme d’uraninite (principal minerai d’uranium). Depuis peu, les scientifiques ont dĂ©couvert de nouvelles preuves que les bactĂ©ries pourraient gĂ©nĂ©rer un autre type d’uranium prĂ©sentant des propriĂ©tĂ©s chimiques et physiques diffĂ©rentes. Borch, Ă©tudiant la composition de l’uranium dans les sites minĂ©s (sauf au Wyoming) a estimĂ© que cet uranium biologique pourrait se produire naturellement dans les dĂ©pĂŽts de minerai.
LâĂ©quipe de Borch a analysĂ© des Ă©chantillons des dĂ©pĂŽts du Wyoming en utilisant de nouvelles techniques, y compris la spectroscopie Ă base de rayonnement synchrotron et lâempreinte isotopique. Ils ont constatĂ© que jusquâĂ 89 % de lâuranium rĂ©cupĂ©rĂ© Ă 200 m de profondeur nâĂ©tait pas une uraninite cristalline, mais plutĂŽt un uranium non cristallin liĂ© Ă de la matiĂšre organique. Lâuranium trouvĂ© dans ce site est estimĂ© comme Ă©tant vieux de 3 millions dâannĂ©es et a Ă©tĂ© formĂ© grĂące Ă une rĂ©duction par micro-organismes, câest-Ă -dire qui ne respirent pas lâoxygĂšne, mais de lâuranium. Pour vĂ©rifier les rĂ©sultats, lâĂ©quipe sâest associĂ©e Ă des experts de la US Geological Survey, Institute for Mineralogy at Leibniz University en Allemagne et le Swiss Federa Institute of Technology de Lausanne.
Lâabondance de cet uranium biologique non cristallin a des implications pour lâassainissement environnemental des sites miniers et pour les pratiques miniĂšres en gĂ©nĂ©ral. Par exemple, lâuranium biologique non cristallin est beaucoup plus susceptible de sâoxyder dans une forme hydrosoluble, que ses homologues cristallins. « Cela pourrait avoir une incidence sur la mobilitĂ© environnementale du complexe et sa probabilitĂ© Ă contaminer un aquifĂšre (roche poreuse permettant la contenance dâeau) », dĂ©clare Borch.
Le professeur rappelle que la plupart des Ătats exigent que les mines usĂ©es soient restaurĂ©es dans des conditions prĂ©miniĂšres. « Pour revenir aux conditions prĂ©miniĂšres, nous devions mieux comprendre ces conditions prĂ©miniĂšres. Nous avions peut-ĂȘtre vu faux Ă ce sujet. »
Bien quâil y ait maintenant de fortes preuves des origines microbiennes de lâuranium, ce qui est moins clair câest si les microbes qui font de lâuranium ce quâil est aujourdâhui sont les mĂȘmes que ceux qui lâont formĂ© dans la croĂ»te terrestre il y a 3 millions dâannĂ©es. « Nous savons grĂące aux empreintes isotopiques que lâuranium sâest formĂ© par une rĂ©duction microbienne. » LâĂ©quipe de Borch va dĂ©sormais explorer dâautres sites miniers, afin de rĂ©aliser les mĂȘmes expĂ©riences et consolider les preuves pour lâorigine de lâuranium.