Les matériaux quantiques sont au cœur de la recherche scientifique et technologique. Une étude récente menée par des chercheurs de l’Université Rice vient de révéler une nouvelle classe de métaux critiques. Cette découverte pourrait bien ouvrir la voie à des appareils électroniques beaucoup plus performants, capables de détecter des variations infimes dans leur environnement. Explications.
Les matériaux quantiques : de quoi s’agit-il ?
À l’échelle subatomique, les lois de la physique classique que nous connaissons ne s’appliquent plus. Les particules, comme les électrons, se comportent de manière bien plus complexe et suivent les règles de la mécanique quantique. Elles permettent, par exemple, aux électrons d’être à plusieurs endroits à la fois (superposition) ou d’être « connectés » instantanément, peu importe la distance qui les sépare (intrication).
Les matériaux quantiques exploitent ces propriétés particulières pour présenter des comportements électroniques et magnétiques que l’on ne retrouve pas dans les matériaux classiques. Ils sont au cœur de nombreuses technologies émergentes, notamment l’informatique quantique, qui promet de révolutionner des secteurs comme la cryptographie ou la simulation scientifique.
Une nouvelle classe de métaux critiques quantiques
Dans le cadre de leurs travaux, des chercheurs de l’Université Rice, en collaboration avec une équipe de l’Université technique de Vienne, ont découvert une nouvelle classe de métaux dits « critiques quantiques ». Ils présentent des propriétés fascinantes et sont très sensibles aux changements de leur environnement.
La criticité quantique, un concept clé dans cette étude, se produit lors d’une « transition de phase quantique ».
Concrètement, tout comme l’eau passe de l’état solide à l’état liquide ou gazeux en fonction de la température, les matériaux quantiques subissent aussi des transitions de phase. Cependant, au lieu d’être causées par des changements de température, ces transitions sont dues à des fluctuations quantiques (des variations dans les états des particules qui persistent même à des températures très basses, proches du zéro absolu).
Dans ces conditions, les électrons peuvent alors changer de phase, passant d’une organisation à une autre, ce qui provoque des changements dans les propriétés du matériau. Cependant, contrairement à l’eau, ces changements sont beaucoup plus complexes, car ils obéissent aux lois de la mécanique quantique.
Ces transitions de phase quantiques créent alors des matériaux très spéciaux appelés métaux critiques quantiques qui se situent à la limite entre plusieurs états électroniques. Ce sont ces transitions que les chercheurs ont réussi à observer et à étudier de manière plus précise.
L’importance de la topologie et de l’effet Hall
L’un des aspects les plus intéressants de cette découverte concerne un phénomène appelé « topologie électronique ».
Dans le contexte de la physique quantique, la topologie est une branche des mathématiques qui étudie la manière dont les électrons s’organisent et interagissent dans un matériau. Ce concept est crucial pour comprendre pourquoi certains matériaux, comme ces nouveaux métaux critiques quantiques, ont des propriétés inhabituelles.
Un exemple frappant de cette influence topologique est l’effet Hall. Normalement, lorsqu’un courant électrique traverse un matériau et qu’un champ magnétique est appliqué, le courant dévie de sa trajectoire. Dans ces nouveaux matériaux, les chercheurs ont découvert que cet effet Hall est fortement influencé par la topologie électronique, c’est-à-dire la façon dont les électrons sont organisés dans le matériau.
Ce qui est surprenant, c’est que cet effet se produit avec des champs magnétiques très faibles, beaucoup plus faibles que ce que l’on observe habituellement. Cela pourrait être très utile pour concevoir de nouveaux types de capteurs ultra-sensibles.
Des applications potentielles dans les technologies du futur
Cette nouvelle classe de métaux critiques quantiques ouvre la porte à des avancées technologiques dans le domaine de la détection et de la mesure de signaux faibles. Les capteurs basés sur ces matériaux pourraient être utilisés dans une multitude de domaines, allant de la surveillance environnementale à la médecine, où une sensibilité extrême est souvent nécessaire pour détecter des anomalies subtiles.
Par exemple, un capteur basé sur ces propriétés quantiques pourrait être capable de détecter des changements infimes dans les champs électriques ou magnétiques, ou de mesurer de très petites variations de température. Cela pourrait également conduire à des progrès dans les technologies de stockage et de transfert d’énergie en optimisant la manière dont l’électricité circule dans les matériaux.
Bien que nous soyons encore au stade de la recherche fondamentale, ces découvertes posent ainsi les bases pour de futures innovations.