Bizarrement, la nicotine améliorerait la productivité des abeilles

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Une nouvelle étude réalisée par le corps scientifique de la Queen Mary University of London (QMUL) vient de démontrer que la nicotine agirait favorablement dans l’apprentissage des couleurs de fleurs pour les abeilles. Cette découverte peut s’avérer importante pour la coévolution entre les plantes et ces insectes pollinisateurs.

Pour résoudre l’expérience, les chercheurs britanniques ont implanté des fleurs artificielles dans un environnement restreint pour les abeilles. La surveillance de ce lieu d’expérimentation va permettre d’observer de quelle façon ces plantes artificielles vont imiter les vrais végétaux, employer les abeilles comme transporteurs de pollen et les récompenser avec des sucres.

Pour faire suite à cette expérience, les scientifiques ont voulu savoir si la nicotine avait un effet sur la capacité d’apprentissage des couleurs des fleurs sur les abeilles. 60 insectes ont été mobilisés et devaient choisir entre des fleurs qui offraient du sucre (une « récompense ») et une fleur avec de la nicotine dans le nectar (la fleur serait différenciée par sa couleur). Les abeilles ont appris rapidement à butiner les fleurs avec récompense, si elles avaient déjà été en contact avec les fleurs lacées de nicotine, même à très faibles doses. En retirant la récompense (le sucre), les abeilles ont tout de même continué à butiner, car elles venaient d’acquérir un comportement de dépendance, grâce à la nicotine.

Le nectar lacé de nicotine peut permettre une efficacité remarquable dans l’apprentissage des couleurs de fleurs pour les abeilles/Crédits : D.Barrachi-QMUL

Le professeur Lars Chittka de la QMUL’s School of Biological and Chemical Sciences déclare que « les fleurs récompensent les pollinisateurs de façon “honnête” avec des ressources comme le nectar […] cependant certaines plantes ont un avantage sur les autres espèces, en ajoutant à leur nectar des substances additionnelles, comme la nicotine dans les fleurs de tabac. » La nicotine aurait donc des effets notables sur les abeilles. Chittka ajoute que « les abeilles ne font pas que se souvenir mieux des fleurs, elles continuent d’y retourner même quand celles-ci perdent en apports nutritifs comme si les abeilles étaient véritablement attachées à ces fleurs. » Comme pour l’être humain, la nicotine ajoute une dépendance qui va les pousser abeilles à consommer une fleur en particulier et favorise alors leur apprentissage.

Les recherches effectuées au Royal Holloway, University of London, ont aussi prouvé que les abeilles infectées par un parasite vont chercher à butiner des fleurs contenant de la nicotine dans le nectar en pensant pouvoir combattre l’infection. La nicotine permettrait de ralentir l’infection pour des abeilles malades, mais combine en revanche des effets graves pour une abeille saine.

Les résultats actuels suggèrent que les plantes peuvent manipuler le comportement des pollinisateurs à leur guise en utilisant des substances psychoactives comme la nicotine. L’un des piliers de l’étude, le docteur David Baracchi, basé à l’Université de Toulouse, indique que « les plantes pourraient avoir des centaines de métabolites (produit du métabolisme) dans leur nectar, et il est possible que la plupart d’entre eux aient une propriété psychoactive presque semblable. »

Mais la nicotine a quand même un inconvénient, car cette substance agit sur le système nerveux des abeilles comme un néonicotinoïde (un insecticide répandu pour rendre certaines fleurs très attractives pour les abeilles), bien que celui-ci soit nocif pour l’insecte.