Pourquoi ce neurochirurgien faisait-il des transplantations de tĂȘtes chez les singes ?

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Robert J. White Ă©tait un neurochirurgien connu pour avoir effectuĂ© des transplantations de tĂȘte sur de nombreux singes. Un rĂ©cent ouvrage raconte l’histoire de ce scientifique et relate ses folles expĂ©riences.

Une histoire vraie

L’ouvrage M. Humble and Dr Butcher de Brandy Schillace est disponible depuis dĂ©but mars 2021. Ce livre raconte l’histoire de Robert J. White (1926-2010), un neurochirurgien Ă©tasunien dont la nature des recherches fait froid dans le dos. Le lendemain de la parution de l’ouvrage, le magazine Wired a interviewĂ© l’auteur. Si son contenu rappelle le Frankenstein de Mary Shelley (1818), l’histoire de Robert J. White ne relĂšve absolument pas de la fiction. AprĂšs une longue sĂ©rie d’expĂ©rimentations, le scientifique effectue la premiĂšre transplantation d’une tĂȘte de singe sur le corps d’un autre dans les annĂ©es 1970. L’animal mutilĂ© avait alors survĂ©cu quelques jours. Robert J. White nourrissait ainsi l’espoir de transfĂ©rer l’Ăąme du singe.

AprĂšs un perfectionnement progressif des opĂ©rations, il devint possible de faire en sorte qu’une tĂȘte survive indĂ©finiment sur un nouveau corps. En revanche, personne ne savait rĂ©parer les dommages causĂ©s au niveau des nerfs. Ainsi, le corps recevant la tĂȘte restait totalement paralysĂ© en dessous du cou. Si le cerveau continuait de fonctionner normalement et parvenait Ă  contrĂŽler les fonctions de la tĂȘte, celui-ci se trouvait incapable de prendre possession du nouveau corps.

ouvrage transplantation tĂȘte
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Un surnom effrayant : Dr Butcher

Brandy Schillace a rappelĂ© qu’il est tout Ă  fait possible de transplanter une tĂȘte. En revanche, il est question d’un taux de rĂ©ussite extrĂȘmement bas, ce qui en fait une opĂ©ration non viable. Des centaines de singes ont effectivement perdu la vie lors des expĂ©riences de Robert J. White. MĂȘme les singes dont la tĂȘte survivait subissaient finalement l’euthanasie. Sans surprise, le chercheur  s’Ă©tait attirĂ© les foudres des dĂ©fenseurs des animaux qui le surnommaient « Dr Butcher » (Docteur Boucher).

MalgrĂ© la morbiditĂ© de ses expĂ©riences, Robert J. White a mis au point des procĂ©dures encore prĂ©sentes dans la mĂ©decine moderne. Une publication dans la revue Nature datant de 1966 donne des prĂ©cisions Ă  ce sujet. Par ailleurs, il a Ă©tĂ© nominĂ© pour le prix Nobel grĂące Ă  ses dĂ©couvertes. Il a Ă©galement Ă©tĂ© assez proche du pape Jean-Paul II (1920-2005), conseillant ce dernier sur les questions d’Ă©thique mĂ©dicale.

Sauver les Ăąmes humaines grĂące aux transplantations

Le plus frappant rĂ©side sans conteste dans le fait que le scientifique espĂ©rait Ă  terme rĂ©aliser des transplantations de ce type chez les humains. Et il a toujours trouvĂ© facilement des fonds afin de mener ses recherches en temps de guerre froide. Toutefois, il n’a jamais rĂ©ussi Ă  franchir une barriĂšre qui semble encore aujourd’hui insurmontable. En effet, lorsque l’on sectionne une tĂȘte, la moelle Ă©piniĂšre subit le mĂȘme sort causant une inĂ©vitable paralysie malgrĂ© le fait que la tĂȘte ait quelques chances de survivre.

RĂ©aliser une telle opĂ©ration sur des humains soulevait donc des questions Ă©thiques encore plus importantes. Cependant, ceci a failli se faire via l’impulsion de Craig Vetovitz, un homme quadriplĂ©gique de 45 ans. Ce dernier est allĂ© Ă  la rencontre de Robert J. White aprĂšs avoir compris que ses organes allaient inexorablement dĂ©faillir. Emprunt d’un catholicisme Ă  toute Ă©preuve, le chercheur n’aura donc jamais pu rĂ©aliser son rĂȘve : transplanter une Ăąme et prouver par la mĂȘme occasion que cette derniĂšre existe et qu’il Ă©tait possible de la sauver.