Une Ă©quipe de biologistes annonce la dĂ©couverte d’une nouvelle espèce de grenouille Ă gorge Ă©pineuse en Tanzanie. Comme ses congĂ©nères du mĂŞme genre, cet amphibien dispose d’un trait inhabituel : il est complètement silencieux. Les dĂ©tails de l’Ă©tude sont publiĂ©s dans la revue PLOS ONE.
Au cours de l’annĂ©e 2019, des biologistes se sont envolĂ©s pour les montagnes Ukaguru, en Tanzanie, dans le but d’identifier la prĂ©sence du crapaud arboricole Churamiti maridadi, un amphibien endĂ©mique de la rĂ©gion qui n’a Ă©tĂ© observĂ© que deux fois Ă l’Ă©tat sauvage. Malheureusement, les chercheurs n’ont repĂ©rĂ© aucun de ces crapauds. En revanche, ils sont tombĂ©s sur une population locale de grenouilles qui Ă©taient jusqu’alors inconnues de la science.
Du braille pour communiquer
Le groupe des grenouilles roseaux Ă gorge Ă©pineuse d’Afrique de l’Est du genre Hyperolius est composĂ© d’espèces morphologiquement similaires de petites grenouilles vert-brun retrouvĂ©es principalement dans les forĂŞts et prairies de montagne de Tanzanie, du Malawi et du Mozambique. Les mâles ont pour la plupart de petites Ă©pines sur leurs plaques gulaires.
Une combinaison d’analyses gĂ©nĂ©tiques et gĂ©nomiques a confirmĂ© que cette grenouille nommĂ©e Hyperolius ukaguruensis Ă©tait distincte des autres membres du genre Hyperolius. Son parent Ă©volutif le plus proche serait Hyperolius ruvuensis, une espèce en danger critique d’extinction. Les mesures ont Ă©galement rĂ©vĂ©lĂ© des proportions corporelles uniques (25 millimètres de long seulement), avec des yeux plus petits par rapport Ă sa tĂŞte en comparaison des autres grenouilles roseaux Ă gorge Ă©pineuse.
Comme ses congĂ©nères, Hyperolius ukaguruensis a la particularitĂ© de ne jamais vocaliser. Mais alors, comment font-elles pour communiquer ? Pour la biologiste Lucinda Lawson, de l’UniversitĂ© de Cincinnati, les Ă©pines sur la gorge des grenouilles mâles pourraient aider leurs homologues femelles Ă reconnaĂ®tre leurs partenaires potentiels par le toucher, un peu comme le braille.
Une espèce menacée
Jusqu’Ă prĂ©sent, ce groupe de grenouilles ne comptait que sept espèces, toutes menacĂ©es. A priori, celle-ci ne dĂ©roge pas Ă la règle dans la mesure oĂą les forĂŞts locales sont de plus en plus fragmentĂ©es. Le changement climatique et les infections par les champignons chytrides sont deux autres menaces importantes. DĂ©crire cette nouvelle population est donc une première Ă©tape vers sa protection.
« En nommant H. ukaguruensis, nous espĂ©rons faire prendre conscience de la valeur d’enquĂŞtes supplĂ©mentaires sur la biodiversitĂ© et d’un examen taxonomique minutieux en Afrique de l’Est afin d’identifier toute l’Ă©tendue des lignĂ©es qui s’y trouvent« , concluent les auteurs. « Ceci est particulièrement critique pendant la crise actuelle d’extinction des amphibiens« .