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NASA ou SpaceX : qui ramènera des humains vers la Lune en premier ?

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Crédits : NASA/SpaceX

D’un côté la NASA développe sa fusée SLS, la plus puissante jamais construite par l’agence, chargée de renvoyer des astronautes vers la Lune. D’un autre côté SpaceX développe un combo lanceur/vaisseau entièrement réutilisable chargé, lui aussi, d’envoyer des humains dans l’espace. Mais concrètement, en quoi diffèrent ces structures ?

Super Heavy/Starship

Une fois en service, le système de lancement de SpaceX sera composé de deux étages : le lanceur connu sous le nom de Super Heavy, et le Starship.

Le Super Heavy sera propulsé par 28 moteurs Raptor, brûlant une combinaison de méthane et d’oxygène liquides. Pour rappel, le principe de base d’un moteur-fusée à carburant liquide est que deux propulseurs – un carburant (méthane) et un oxydant (‘oxygène liquide) – sont réunis dans une chambre de combustion pour être enflammés. La flamme produit un gaz chaud sous haute pression qui est expulsé à grande vitesse pour produire une poussée.

Ce booster Super Heavy fusée fournira une poussée dans le vide de l’ordre de 3 500 kN, soit environ 357 tonnes (environ deux fois plus que les fusées de l’ère Apollo).

Au sommet du lanceur se trouvera le Starship, lui-même propulsé par six autres moteurs Raptor.

Le Starship est conçu pour fonctionner à la fois dans le vide de l’espace et dans les atmosphères de la Terre et de Mars, en utilisant de petites ailes mobiles permettant de glisser vers une zone d’atterrissage souhaitée. En approche de ladite zone, le vaisseau bascule en position verticale et utilise ses moteurs pour effectuer une descente et un toucher motorisé. Le Starship aura également une poussée suffisante pour se soulever de la surface de Mars ou de la Lune, surmonter leur gravité et revenir sur Terre.

D’une taille de 118 m (63 m pour le lanceur, 55 mètres pour le vaisseau), le combo Super Heavy/Starship sera un mastodonte de 4 400 tonnes. Les deux structures seront entièrement réutilisables et l’ensemble du système est conçu pour soulever plus de 100 tonnes de charge utile. Ce vaisseau proposera également des compartiments pouvant accueillir jusqu’à cent membres d’équipage, ainsi que des réservoirs de carburant supplémentaires en cas de ravitaillement dans l’espace, ce qui sera essentiel aux vols spatiaux humains interplanétaires de longue durée.

Ces structures sont en train de mûrir très rapidement. Alors que les vols des prototypes SN8 et SN9 sont encore frais dans les mémoires, leur successeur, le SN10, se prépare lui aussi à décoller. Les premiers tests du Super Heavy, de leur côté, seront entamés aussi dès cette année.

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Le Starship se sépare du Super Heavy. Crédits : SpaceX

La SLS, le lanceur super-lourd de la NASA

Le Space Launch System (SLS) est un lanceur développé par la NASA depuis 2011 dans le but de propulser des humains vers la Lune. Avec ses 98 mètres de haut, il sera légèrement plus court que les fusées Saturn V de 110 mètres (ère Apollo). En revanche, ce nouveau lanceur sera plus puissant, produisant 15 % de poussée en plus lors du décollage et de l’ascension.

L’étage central du SLS proposera de son côté plus de 3,3 millions de litres d’hydrogène et d’oxygène liquides (l’équivalent d’une piscine olympique et demie). Il sera propulsé par quatre moteurs RS-25, qui sont des versions modernisées des moteurs SSME de la navette spatiale américaine. Leur principale différence avec les Raptors de SpaceX est qu’ils brûlent de l’hydrogène liquide au lieu du méthane, donc.

Ce booster fournira une poussée dans le vide de l’ordre de 2227 kN, soit environ 232 tonnes.

L’étage central de la fusée sera également accompagné de deux propulseurs à propergol solide qui fourniront 80 % de la poussée totale au décollage. Le second étage sera dérivé du second étage du lanceur Delta IV, et sera propulsé par un unique moteur-fusée à ergols liquides RL-10 (plus petit et plus léger que le RS-25 et déjà utilisé par les fusées ATLAS et DELTA). Celui-ci, là encore, brûlera un mélange d’hydrogène liquide et d’oxygène liquide.

Enfin, tout en haut sera coiffé le vaisseau spatial Orion, chargé de transporter des équipages vers la Lune. Cette capsule disposera également de son propre moteur et de son alimentation en carburant, ainsi que de systèmes de propulsion secondaires pour le retour vers la Terre.

La SLS est également conçue pour soulever une cargaison pesant jusqu’à 120 tonnes, soit plus que le Super Heavy/Starship. En revanche, il n’est pas prévu que l’étage central ni les fusées d’appoint soient réutilisables avec la NASA (au lieu d’atterrir, ils retomberont dans l’océan). Autrement dit, il y a donc un coût plus élevé avec le système SLS, à la fois en termes de matériaux et d’environnement.

Enfin, une grande partie de la technologie utilisée avec le SLS est héritée des missions précédentes, ce qui réduit le temps de recherche et de développement. Toutefois, cela ne garantit pas forcément le succès d’un projet. Et le SLS en est le parfait exemple.

À la mi-janvier, la NASA a en effet raté le tir statique de son lanceur. Une défaillance enregistrée sur l’un des quatre moteurs principaux – censés brûler pendant environ huit minutes – a malheureusement contraint l’agence à stopper ce test au bout de 67 secondes. Il est prévu que NASA effectue un second test moteur à la fin du mois de février.

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Crédits : NASA

Deux approches pour un même objectif

En fin de compte, il s’agit d’une compétition entre une agence appuyée par des années de tests et d’expérience, mais qui reste limitée par un budget fluctuant et des changements de politique administrative, et une société relativement nouvelle dans le jeu, mais qui a déjà lancé plus d’une centaine de fusées Falcon 9 avec un taux de réussite de 98 %, et qui dispose d’un flux de trésorerie dédié à long terme.

Alors, qui de SpaceX ou de la NASA est susceptible de renvoyer des humains dans l’espace en premier ? Côté NASA, la mission Artemis 2, qui prévoit le retour des astronautes américains sur notre satellite, est prévue pour le mois d’août 2023. Toutefois, il y a fort à parier que ce calendrier, jugé beaucoup trop ambitieux, soit prochainement assoupli, et donc retardé.

De son côté, SpaceX a communiqué son intention de proposer des premiers vols autour de la Lune dès 2023. Elon Musk a également déclaré qu’une mission martienne avec équipage pourrait avoir lieu dès 2026. Là encore, le calendrier est jugé très ambitieux, mais s’il y a une entreprise capable de nous surprendre, c’est bien SpaceX.

Enfin, il est nécessaire de clarifier une chose. La NASA et SpaceX ne sont pas des concurrents. Si SpaceX en est là où elle est aujourd’hui, vous pouvez remercier la NASA pour cela. L’agence américaine est en effet le plus gros client de la société et son plus grand partisan. Gardons cela à l’esprit.