Nous pourrions bientôt assister à la naissance d’un mammouth

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Illustration de plusieurs mammouths des steppes. Crédits: Beth/Zaiken/Centre for Palaeogenetics

Le projet historique de désextinction de Colossal promet la résurrection du mammouth laineux (ou plutôt la naissance d’un éléphant résistant au froid avec tous les traits biologiques fondamentaux du mammouth laineux). Cet animal, qui ressemblera à un mammouth et barrira comme tel, pourrait « travailler » le même écosystème que ses prédécesseurs.

Le retour d’un géant

La plupart des mammouths laineux (Mammuthus primigenius) ont disparu il y a environ 10 000 ans. Certains ont tout de même persisté dans ce qui est maintenant le Yukon, au Canada, jusqu’à il y a environ 5 000 ans. Quelques populations ont également continué à prospérer sur l’île Saint-Paul, au large de l’Alaska, jusqu’à il y a environ 5 700 ans. Enfin, nous savons que leur tout dernier bastion se trouvait sur l’île Wrangel, au nord de la Russie, où ils se sont éteints il y a environ 4 000 ans.

Toujours est-il que l’espèce est aujourd’hui éteinte, mais peut-être plus pour très longtemps. Colossal, une société de biotechnologie américaine, travaille en effet activement à redonner vie à l’ancien pachyderme. Les cofondateurs de l’entreprise sont Ben Lamm et George Church, un professeur de Harvard qui a une solide expertise dans le domaine d’édition de gène. L’année dernière, l’entreprise, qui possède des bureaux à Boston, Dallas et Austin, a obtenu un financement supplémentaire de 60 millions de dollars pour poursuivre le travail d’édition titanesque entamé en 2021.

Pour opérer, les chercheurs utilisent de l’ADN de mammouth laineux trouvé dans des projets de recherche antérieurs. Cet ADN n’est pas complet, mais le génome de ces anciens géants correspond à 99,6 % à celui de l’éléphant d’Asie. L’ADN de cette espèce est donc utilisé pour combler les manques grâce à la technologie CRISPR.

Point intéressant : les scientifiques transféreront ensuite l’embryon de l’éléphant d’Asie dans le ventre d’un éléphant d’Afrique. La raison en est que les éléphants d’Afrique sont plus grands que leurs cousins asiatiques, ce qui leur permet de donner plus facilement naissance à une espèce hybride. Ces travaux de manipulation sont déjà en cours. Colossal pense même que le mammouth laineux éteint depuis longtemps fera son retour dès 2027.

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Crédits : Lou. gruber / Wikimédia Commons / Domaine public

Pourquoi vouloir le retour du mammouth ?

Les humains et les mammouths laineux ont longtemps coexisté. La plupart des preuves en attestant proviennent de grottes en Angleterre, en Espagne et en France.

L’exemple le plus notable d’interaction entre le mammouth et l’homme est préservé à l’intérieur de la grotte de Rouffignac, dans le sud-ouest de la France. À l’intérieur se trouvent plus de 250 peintures et représentations gravées dans la pierre au cours du Magdalénien moyen, du Mésolithique, du Tardenoisien, du Sauveterrien et du Néolithique. Les paléontologues ont également retrouvé des os et des défenses de mammouth façonnés dans un certain nombre d’utilisations, notamment des outils, des objets d’art, des meubles et des objets funéraires.

De manière générale, nous savons que nos ancêtres comptaient sur les mammouths pour leur survie. On chassait ces animaux pour consommer leur viande, et on utilisait leurs os et leurs défenses pour l’art et pour la construction de structures d’habitation. Malgré tout, les humains (et les Néandertaliens) ont probablement contribué à accélérer leur extinction. De fait, les avantages écologiques auxquels contribuaient ces énormes pachydermes ont disparu avec eux.

Les mammouths parcouraient en effet jadis les vastes toundras, broutant différentes plantes et arbres de la prairie. Leurs schémas de migration favorisaient également la perturbation du manteau neigeux et la dispersion des graines, permettant ainsi la repousse des plantes. Depuis leur extinction, aucune autre espèce n’a pris le relais. Cet écosystème autrefois florissant, qui absorbait des quantités folles de carbone, a donc été perdu. Avec la réintroduction du mammouth laineux, les chercheurs veulent « redonner vie » à cet environnement, en commençant par le Pleistocene Park, en Sibérie.

D’après Colossal, réintroduire le mammouth laineux pourrait également ralentir le dégel du pergélisol arctique, et donc empêcher l’émission de gaz à effet de serre piégés à l’intérieur (jusqu’à 600 millions de tonnes net par an). Ramener l’animal à la vie peut donc avoir un impact bénéfique sur la santé de l’écosystème mondial.