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Cette illustration représente l'évolution de l'univers sur 13,77 milliards d'années. Crédits : NASA, Illustrateur : Britt Griswold (Maslow Media Group)

Comment la mousse quantique aurait pu gonfler l’univers primitif

Au cours de ses premières fractions de seconde, l’univers aurait connu une expansion rapide, quasi instantanée. Ce phénomène, appelé l’inflation cosmique, lui aurait permis de se dilater de manière exponentielle, donnant naissance à l’univers que nous observons aujourd’hui. Mais comment expliquer cette expansion si rapide et quelle en était la cause ? Pendant longtemps, les cosmologistes ont supputé qu’une entité mystérieuse, un champ quantique appelé l’inflaton, était responsable de cette inflation. Ce champ aurait alimenté l’univers en énergie, provoquant son expansion accélérée. Cependant, cette théorie comporte de nombreuses zones d’ombre. Dans ce contexte, de nouvelles hypothèses émergent, dont l’une implique une « mousse quantique ». De quoi parle-t-on précisément ?

L’inflation cosmique : une expansion rapide après le Big Bang

L’inflation cosmique est un concept clé pour comprendre les premiers instants de l’univers. Proposé pour la première fois dans les années 1980 par le physicien Alan Guth, ce modèle postule qu’à peine une fraction de seconde après le Big Bang, l’univers a connu une phase d’expansion ultra-rapide. Cette période d’inflation aurait duré quelques microsecondes, mais pendant ce court laps de temps, le cosmos se serait dilaté de manière exponentielle, passant d’une taille microscopique à des proportions colossales.

Cette expansion fulgurante est essentielle pour expliquer plusieurs caractéristiques fondamentales de l’univers observable. L’un des problèmes qu’elle résout est celui de la « platitude » de l’univers : sans l’inflation, des irrégularités dans la courbure de l’espace-temps auraient dû être visibles à grande échelle, ce qui n’est pas le cas. L’inflation cosmique a permis à l’univers d’atteindre un état presque parfaitement plat, quelle que soit la courbure initiale.

De plus, l’inflation explique l’homogénéité et l’isotropie de l’univers à grande échelle. Des régions extrêmement éloignées sont remarquablement similaires en matière de température et de composition. L’inflation a permis à ces régions de communiquer entre elles avant d’être séparées par l’expansion rapide.

Enfin, l’inflation permet d’expliquer l’origine des structures à grande échelle de l’univers, telles que les galaxies et les amas de galaxies. Les petites fluctuations quantiques dans le vide primordial ont été étendues à des échelles cosmologiques, semant les graines de la structure que nous observons aujourd’hui.

Les défis du modèle inflationniste

Malgré les succès théoriques indéniables de l’inflation cosmique, plusieurs défis demeurent. Le plus important est la question de l’inflaton, le champ quantique supposé être responsable de l’inflation. Si ce concept est largement accepté par la communauté scientifique, l’inflaton n’a pas encore été identifié de manière concluante. Les recherches menées jusqu’à présent n’ont en effet pas permis de détecter de manière directe un champ ou une particule spécifique qui puisse correspondre à cette entité. Cette absence de preuve tangible soulève ainsi des interrogations sur la validité du modèle.

En outre, une interrogation majeure persiste par rapport à l’arrêt de l’inflation : l’univers a cessé de s’étendre rapidement à un moment donné, mais pourquoi cela s’est-il produit et comment l’univers est-il revenu à une expansion plus modérée après cette phase d’inflation ? Les théories actuelles ne parviennent pas à répondre clairement à ces questions. L’univers primitif est un état extrême et encore peu compris, et l’inflation ne nous offre pas de mécanisme satisfaisant pour comprendre son arrêt.

Ces problèmes ont conduit les scientifiques à chercher des alternatives au modèle inflationniste. Si l’inflation reste la théorie dominante, d’autres approches, comme celles basées sur la mousse quantique, commencent à émerger pour expliquer la rapide expansion de l’univers sans nécessiter l’existence d’un inflaton spécifique.

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L’entonnoir d’expansion montre visuellement comment le taux d’expansion de l’univers a augmenté au fil du temps. Crédits : Andreus/istock

La mousse quantique : qu’est-ce que c’est ?

La mousse quantique est un concept de la physique quantique qui fait référence aux fluctuations spontanées de l’espace-temps à très petite échelle. Contrairement à l’espace vide que nous connaissons dans notre quotidien, le vide quantique est une mer agitée où des particules apparaissent et disparaissent en permanence. À des échelles subatomiques, ces fluctuations, bien que de faible amplitude, ont un effet significatif sur la structure même de l’espace-temps.

Imaginez l’espace comme une mer calme à l’échelle cosmique. Toutefois, à des échelles infinitésimales, l’eau de cette mer est bouillonnante, remplie de vagues minimes. Ces vagues représentent la mousse quantique. Ces fluctuations sont omniprésentes et influencent la dynamique de l’univers à un niveau fondamental.

L’une des propriétés intéressantes de cette mousse est qu’elle peut créer des ondulations dans le tissu de l’espace-temps, appelées « ondes gravitationnelles ». Il s’agit de petites déformations qui se propagent à travers l’univers. Bien que ces oscillations soient faibles à l’échelle de notre expérience quotidienne, elles ont un impact énorme sur l’évolution de l’univers.

Mais pourquoi ces fluctuations quantiques sont-elles si importantes pour comprendre l’expansion rapide de l’univers ? Cela nous amène à la théorie alternative qui repose sur la mousse quantique.

Le modèle d’inflation sans inflaton : la mousse quantique comme moteur

Traditionnellement, l’inflation cosmique repose sur l’idée d’un champ quantique spécifique (l’inflaton) qui serait responsable de l’expansion rapide de l’univers. Cependant, une équipe de chercheurs a récemment proposé un modèle alternatif qui permettrait d’expliquer cette inflation sans recourir à l’inflaton.

Dans cette nouvelle approche, l’univers primitif aurait d’abord été soumis à une constante cosmologique. Celle-ci serait similaire à l’énergie noire qui est responsable de l’expansion accélérée de l’univers aujourd’hui. Cette constante cosmologique aurait lancé une phase d’expansion rapide. Toutefois, dans ce scénario, ce sont les fluctuations de la « mousse quantique » qui auraient joué le rôle de moteur de l’inflation. En effet, ces fluctuations quantiques ont créé des ondulations dans l’espace-temps, générant des vagues gravitationnelles qui ont amplifié cette expansion à leur tour.

Les déformations générées par ces fluctuations quantiques ont également semé les graines des structures à grande échelle de l’univers, comme les galaxies et les amas de galaxies. En d’autres termes, la mousse quantique a joué un rôle similaire à celui de l’inflation traditionnelle en donnant naissance à des perturbations gravitationnelles qui se sont ensuite développées pour former la toile cosmique observée aujourd’hui. Cette approche surprenante permet de reproduire les effets de l’inflation sans nécessiter un champ spécifique comme l’inflaton.

Les défis du modèle sans inflaton

Bien que prometteur, ce modèle alternatif présente certains défis. En premier lieu, il reste nécessaire d’expliquer pourquoi l’univers primitif était soumis à une constante cosmologique suffisamment puissante pour provoquer une expansion rapide. De plus, ce modèle n’explique pas complètement la planéité de l’univers, ni pourquoi des régions apparemment éloignées de l’univers présentent des caractéristiques similaires.

Les chercheurs qui ont proposé cette idée admettent qu’il y a encore des questions sans réponse, notamment concernant la nécessité d’une constante cosmologique forte pour alimenter l’expansion rapide. Cependant, leur modèle reste une piste intéressante, car il montre que des mécanismes complexes pourraient être responsables de l’inflation, même sans faire appel à des hypothèses supplémentaires telles que l’inflaton.

L’un des aspects les plus intrigants de ce modèle est qu’il pourrait nous offrir une autre manière de comprendre les premiers instants de l’univers tout en repoussant les limites de la cosmologie actuelle.

Brice Louvet

Rédigé par Brice Louvet

Brice est un journaliste passionné de sciences. Ses domaines favoris : l'espace et la paléontologie. Il collabore avec Sciencepost depuis près d'une décennie, partageant avec vous les nouvelles découvertes et les dossiers les plus intéressants.