Imaginez le désastre d’une migraine persistante. Vous fouillez désespérément dans votre armoire à pharmacie pour retrouver un analgésique et découvrez qu’il est périmé depuis deux ans. Vous devez alors quitter le confort de votre maison, affronter les embouteillages et la file d’attente à la pharmacie dans le but d’en racheter une boîte, toujours en pleine crise. Maintenant, transposez ce scénario à un voyage spatial vers Mars où la pharmacie la plus proche est à 240 millions de kilomètres. Des chercheurs de la Duke University School of Medicine ont récemment travaillé sur le défi inattendu inhérent aux futures missions habitées vers la planète rouge qu’incarnent les médicaments périmés.
Les ambitions martiennes
L’exploration de Mars a longtemps été le rêve des scientifiques et des ingénieurs spatiaux, attirant l’attention pour ses promesses de découvertes scientifiques et d’avancées technologiques. De futures missions habitées viseront d’ailleurs à explorer la surface de la planète pour chercher des signes de vie passée ou présente. Une autre ambition est de préparer le terrain pour une éventuelle colonisation humaine. Cela inclut la recherche de ressources locales, telles que l’eau et les minéraux, ainsi que le développement de technologies pour vivre et travailler dans un environnement extraterrestre.
Enfin, les futures missions vers Mars serviront de laboratoire pour tester des technologies avancées, telles que les systèmes de propulsion et les habitats spatiaux, qui seront essentielles pour des missions plus lointaines comme celles vers les lunes de Jupiter ou Saturne.
Les défis liés à l’exploration
Bien qu’excitantes, ces ambitions seront cependant accompagnées de défis complexes qui nécessitent des solutions innovantes. Les astronautes en voyage vers Mars seront notamment exposés à une durée prolongée dans un environnement de microgravité. Or, cela peut entraîner des problèmes de santé tels que la perte de densité osseuse, des modifications musculaires et des troubles cardiovasculaires. De plus, les niveaux élevés de radiation dans l’espace augmentent le risque de cancer et d’autres maladies graves.
L’isolement prolongé et la séparation de la Terre peuvent également avoir des effets psychologiques significatifs sur les membres de l’équipage. Les défis mentaux liés à l’enfermement et à la distance peuvent en effet affecter le moral et la cohésion du groupe, ce qui comporte des risques pour le succès de la mission.
Une autre grande préoccupation plus inattendue sera la gestion des médicaments. Les astronautes devront en effet faire face à des défis de santé variés, tels que des douleurs, des allergies et des troubles du sommeil. Que se passerait-il si ces médicaments devenaient périmés au cours d’un voyage de trois ans vers Mars ? Une étude menée par la Duke University s’est penchée sur le sujet.
Le problème des médicaments
Dans le cadre de leurs travaux, les chercheurs ont analysé les médicaments disponibles à bord de l’ISS pour évaluer combien de temps ils pourraient rester efficaces dans un environnement spatial. Les types de traitements concernés incluaient ceux pour les allergies, comme les antihistaminiques, les gouttes pour les yeux utilisées pour soulager des irritations ou des infections ou encore les comprimés contre les douleurs ainsi que d’autres médicaments courants.
Sur les 106 médicaments répertoriés à bord de l’ISS, les données sur la durée de conservation n’étaient disponibles que pour 91 d’entre eux. Parmi eux, 54 avaient une date de péremption inférieure à trois ans en cas de conservation dans leur emballage d’origine. Des médicaments courants comme les gouttes pour les yeux et les comprimés contre les allergies ont même des dates de péremption qui ne dépassent pas deux ans. Ce constat soulève ainsi une inquiétude majeure pour les missions spatiales : les médicaments périmés, bien que potentiellement encore efficaces, risquent en effet de perdre leur puissance.
Au-delà de la simple question de péremption, les chercheurs s’interrogent également encore sur les effets de la microgravité sur la stabilité des médicaments. Les conditions de l’espace, comprenant des niveaux de radiation élevés et des variations extrêmes de température, pourraient en effet accélérer la dégradation des produits pharmaceutiques. Des études ciblées seront donc également nécessaires pour le comprendre.
Malgré tout, il apparaît d’ores et déjà essentiel que les agences spatiales telles que la NASA développent des stratégies pour gérer les médicaments périmés et explorer des solutions telles que la fabrication de médicaments en orbite ou l’amélioration des formulations pour une durée de conservation plus longue.
L’étude est publiée dans la revue NPJ Microgravity.