Mission DART : une (petite) frappe préventive pour se préparer au pire

dart astéroïdes
Crédits : Ron Miller

Dans un peu plus d’un an, après avoir parcouru plus de sept millions de kilomètres, un petit vaisseau de la taille d’un lave-vaisselle se jettera sur un petit astéroïde, lui-même en orbite autour d’un plus gros dans le cadre de la mission DART. Si tout se passe comme prévu, la trajectoire de la petite lune aura suffisamment dévié pour être détectable depuis la Terre.

En mars 1989, (4581) Asclépios, un astéroïde mesurant environ 700 mètres de large, s’est approché de la Terre à seulement 700 000 km de distance, attirant à l’époque l’attention des médias. Et pour cause, en cas d’impact, l’objet aurait percé un trou dans la croûte terrestre avec la force de 20 000 bombes à hydrogène, creusant un cratère de quinze kilomètres de large. Toute vie postée à 60 km à la ronde aurait été effacée, tandis que la poussière aurait affecté plusieurs mois durant la croissance des cultures. En cas d’impact en mer, des millions de personnes évoluant près des côtes auraient de leur côté essuyé d’importants tsunamis.

Peu de temps après ce « flirt » que personne n’avait vu venir, le Congrès américain a chargé la NASA de détecter et de suivre tous les astéroïdes susceptibles de menacer notre planète. Aujourd’hui, l’agence a localisé plus de 90% de tous les astéroïdes de plus d’un kilomètre de diamètre et s’efforce toujours de localiser toutes les roches de plus de 140 mètres de diamètre. Toutefois, notre planète n’est pas à l’abri d’une mauvaise surprise. Aussi, nous devons également envisager des moyens de nous défendre.

La mission DART

Cela nous amène à la mission DART, dont le lancement est prévu en novembre au moyen d’une fusée Falcon 9 de SpaceX. Son objectif sera de frapper un astéroïde pour dévier sa trajectoire.

Andy Cheng, l’un des responsables de cette mission, a réalisé que nous aurions besoin d’un système d’astéroïdes binaires pour analyser l’effet de l’impacteur : le vaisseau frappe l’un des deux objets, puis les scientifiques observent le changement de trajectoire du corps frappé autour de l’autre.

Cheng et son équipe ont rapidement jeté leur dévolu sur un système d’astéroïdes appelé Didymos. Il sera en effet plus proche de la Terre l’année prochaine qu’à n’importe quel moment au cours des cinquante prochaines années. L’astéroïde principal a été découvert en 1996, tandis que sa petite lune, plus tard nommée Dimorphos, ou Didymoon, a été repérée en 2003. Le système tourne autour du soleil à environ trente kilomètres par seconde. Concrètement, DART n’aura qu’un seul essai pour décaler cette vitesse d’environ un millimètre par seconde.

Sept jours plus tôt, l’équipe de mission aura mis en marche le système de guidage du vaisseau, construit à l’aide de la technologie de missiles guidés APL, permettant à ce dernier de viser lui-même Dimorphos. DART ne verra clairement sa cible que quatre minutes environ avant l’impact, et devra s’écraser à moins de quinze mètres de son point de visée.

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Illustration de la mission DART. Crédits : Ted Lopez / Johns Hopkins APL

Détecter l’infime changement de trajectoire

Les deux objets sont si éloignés qu’ils ne pourront pas être vus directement. Aussi, les astronomes détecteront tout changement orbital en mesurant la luminosité de Didymos. Lorsque sa lune se déplacera devant par rapport à notre position sur Terre, Didymos s’assombrira en effet très légèrement. Si l’astéroïde s’assombrit un peu plus tôt ou un peu plus tard qu’il ne le devrait selon les éphémérides, alors l’équipe DART saura que sa mission aura été un succès.

En outre, DART transportera un CubSat italien appelé LICIA qui se séparera de DART avant l’impact pour capturer des images de la disparition de son vaisseau mère. En 2024, l’Agence spatiale européenne (ESA) lancera également une sonde nommée Hera chargée de cartographier le cratère d’impact de DART.

Naturellement, chaque mission spatiale a sa part d’inconnues, mais celle-ci plus que les autres. Qu’il s’agisse de la nature exacte de la paire d’astéroïdes, du changement potentiel d’orbite de la plus petite ou encore de la taille et du type de cratère que DART laissera derrière lui, toutes ces données restent encore mystérieuses. Les astéroïdes sont en effet souvent imprévisibles. Cependant, ce type de missions préventives sert justement à répondre à toutes ces questions.