Récemment, des universitaires espagnols ont mis en garde contre les missiles antisatellites. Selon eux, la moindre erreur avec ce type de missile pourrait en effet rendre l’orbite terrestre basse inutilisable en moins de quarante ans seulement. Comment cela est-il possible ?
Chaque essai avec ce type de missile génère 100 000 nouveaux déchets
À bord de la Station Spatiale internationale (ISS), l’une des hantises des astronautes n’est autre que les débris spatiaux. En 2019, l’Inde avait détruit un satellite en orbite basse à l’aide d’un missile. Cet essai avait alors fait entrer le pays dans le cercle très fermé des puissances spatiales. En fin 2021, la Russie avait quant à elle mené un nouvel essai en détruisant un vieux satellite soviétique. Ces événements avaient alors fait craindre le pire à l’ISS. En effet, les débris satellitaires résultant de ces destructions représentent un danger.
Deux chercheurs espagnols ont publié une étude dans la revue Defence and Peace Economics en avril 2023. Le sujet abordé est plutôt brûlant. Selon ces travaux, un seul missile antisatellite peut potentiellement rendre l’orbite terrestre basse inutilisable en moins d’une quarantaine d’années. En effet, chaque essai de ce type génère plus de 100 000 nouveaux déchets de plus d’un centimètre. Or, leurs effets prendront environ un millénaire pour disparaître en raison de l’altitude élevée à laquelle sont effectués les essais. Le fait est que chacun de ces déchets peut avoir des effets catastrophiques en cas de collision.

Le risque d’une cascade de collisions
La principale crainte exprimée dans l’étude n’est autre qu’une cascade de collisions, plus communément nommée syndrome de Kessler. Imaginé en 1978, ce scénario implique un volume des débris spatiaux en orbite basse devenu si important qu’ils pourraient heurter les objets en orbite. Ces objets peuvent alors se briser et devenir à leur tour des débris spatiaux, augmentant le nombre de déchets de manière exponentielle. La crainte de ce phénomène tout à fait plausible a poussé les États-Unis à annoncer en 2022 la fin de leurs essais anti-satellitaires. La même année, la France a pris la décision de ne jamais construire de missiles antisatellites. Soulignons également le fait que le Traité sur l’Espace de 1967 interdit déjà le déploiement d’armes dans l’espace.
Toutefois, les missiles antisatellites n’ont pas besoin de stationner en orbite pour détruire un objet se trouvant lui-même en orbite. Depuis 2022, les États-Unis espèrent donc que le reste des états suivront cette recommandation. Cependant, les derniers événements laissent peu de place à l’optimisme. Outre la Russie et l’Inde, la Chine fait par ailleurs partie du trio de pays ayant pratiqué des essais avec ce genre de missiles depuis 1957.
Néanmoins, il faut savoir que désormais, chaque satellite de type Rendezvous and Proximity Operations (RPO) peut également devenir une arme en soi et menacer ainsi l’ensemble des satellites. En cas de guerre spatiale, les adversaires d’une ou plusieurs nations seraient donc également perdants puisque l’orbite basse pourrait devenir inutilisable pour tout le monde.