La Voie lactée ne garde pas toutes ses étoiles. Certaines sont en effet parfois éjectées dans l’espace intergalactique et entament un périple imprévisible. Une équipe d’astronomes a récemment entrepris une étude approfondie de ces objets en fuite pour tenter de comprendre les mécanismes de ces rejets.
Lorsque les astronomes étudient un ensemble d’étoiles au sein de la Voie lactée, l’un des paramètres qu’ils analysent est la distribution de leur vitesse. Elle donne en effet des indications sur la manière dont les étoiles se déplacent au sein de la galaxie par rapport à un point de référence. La distribution globale de la vitesse de ces objets dans une population stellaire donnée est par ailleurs fortement influencée par la rotation de la galaxie. Ainsi, une étoile qui ne suit pas cette harmonie attire forcément l’attention des astronomes.
Deux types d’étoiles
Dans le cadre de ces travaux, des chercheurs ont entrepris une étude en se basant sur deux catalogues d’étoiles massives, à savoir le Galactic O-Star Catalog (GOSC) et le Be Star Spectra (BeSS). Ces derniers répertorient différents types d’étoiles massives, telles que les étoiles de type O et les étoiles de type Be, ainsi que leurs sous-types respectifs.
Dans le détail, les étoiles de type O sont parmi les étoiles les plus massives et les plus chaudes de l’univers. Ces objets sont relativement rares, mais ils jouent un rôle crucial dans la formation stellaire et la dynamique des galaxies. En raison de leur masse importante, ils ont une durée de vie relativement courte et peuvent se terminer par une supernova.
Les étoiles de type Be, aussi massives et lumineuses, sont quant à elles caractérisées par la présence d’émissions spectrales spécifiques liées à la présence de certaines lignes d’absorption dans leur spectre. Le terme « Be » provient du mot allemand « B-emission, » indiquant ces lignes d’émission. Ces objets ont généralement des taux de rotation élevés, provoquant un amincissement de leur équateur. Ils sont par ailleurs souvent entourés d’un disque de matière en rotation.
De nombreux objets en fuite
Les chercheurs ont également croisé ces données avec celles de données de Gaia, un satellite de l’Agence spatiale européenne (ESA) qui mesure les positions, les distances et les mouvements d’un grand nombre d’étoiles.
En analysant les données, les chercheurs ont identifié 417 objets de type O et 1 335 de type Be présentes à la fois dans les catalogues et dans les observations de Gaia. Parmi ces étoiles, ils ont repéré 106 de type O en fuite, représentant ainsi 25,4 % des étoiles répertoriées dans le catalogue GOSC. Sur cet échantillon, 42 étaient jusqu’alors inconnues.
En ce qui concerne les étoiles de type Be, ils en ont identifié 69 en fuite, constituant 5,2 % des objets du catalogue BeSS, avec 47 nouvelles identifications. De manière générale, les étoiles de type O ont montré des déplacements plus rapides que les autres. Toutes ces étoiles se dirigent apparemment vers une trajectoire qui les mènera à l’extérieur de la galaxie.
Notez que cette étude se concentre uniquement sur deux catalogues. Personne ne sait réellement combien d’objets en fuite sont sur le point de quitter notre Galaxie. Cependant, certaines estimations indiquent qu’il y pourrait y en avoir plus de dix millions actuellement.
Deux mécanismes proposés
Pour expliquer ces résultats, les chercheurs avancent deux scénarios concurrents : celui de l’éjection dynamique et celui de la supernova binaire.
Dans le premier scénario, les étoiles, souvent formées en paires binaires, subissent des interactions gravitationnelles dans des environnements denses. Ces interactions peuvent résulter de rencontres entre étoiles binaires et simples, produisant ainsi des objets en fuite. Les associations OB, où les étoiles de type O et de type B ont tendance à se former, représentent des environnements denses propices à ce processus.
Le scénario alternatif implique qu’une étoile explose en supernova, affectant son partenaire binaire. Si les conditions sont favorables, l’objet survivant reçoit une impulsion suffisante pour échapper à son lien avec son partenaire. Il peut alors parfois échapper à l’attraction gravitationnelle de la Voie lactée et entamer un voyage intergalactique.
Le fait que les étoiles de type O aient une vitesse plus élevée suggère que le premier scénario est plus probable. Néanmoins, d’autres travaux seront nécessaires pour le confirmer.
Les détails de l’étude sont publiés dans la revue Astronomy & Astrophysics.