Si la planète se réchauffe dans son ensemble, le déroulé plus local de cette évolution fait intervenir une complexité supplémentaire. En effet, à une accumulation continue de chaleur viennent se superposer des évènements (canicules, inondations, etc.). Ces derniers étant souvent les marqueurs d’une prise de conscience ou d’un rappel du problème pour le grand public. Aussi, appréhender la façon dont le changement climatique se développe à l’échelle d’un pays comme la France et s’y adapter demande d’aller au-delà des seules moyennes. Le présent article se veut contribuer, modestement mais réellement, à une meilleure compréhension de ces enjeux.
Depuis le début de la révolution industrielle, la température moyenne du globe a augmenté de 1 °C. Une hausse qui s’est principalement articulée à partir des années 1970. Notons que cette valeur – indicative – peut sembler faible au premier coup d’œil. Toutefois, il faut réaliser qu’elle est le fruit d’une intégration spatiale et temporelle élargie. Aussi, constater des changements de l’ordre du degré à cette échelle d’intégration est très significatif. À titre de comparaison, les fluctuations glaciaires-interglaciaires sont tributaires d’une variation d’environ 5 °C en moyenne globale.
Un changement climatique moyen…
Pour la France métropolitaine, la hausse moyenne se rapproche des 2 °C, avec une élévation de température de 1,7 °C depuis 1900. En cas de poursuite du réchauffement au rythme actuel, on attend une augmentation avoisinant 3 à 4 °C d’ici à la fin du siècle par rapport à la période 1976-2005. En précisant un peu les choses, on peut noter que c’est la saison chaude qui est la plus fortement affectée. Par ailleurs, le réchauffement se montre plus marqué sur la moitié sud-est du pays et en altitude, mais relativement modéré en allant vers le nord-ouest.
Pour les précipitations, si la moyenne annuelle du pays ne va changer de façon notable selon les prévisions, la répartition spatiale et saisonnière des pluies évolue. En effet, on attend globalement une humidification en saison froide et un assèchement en saison chaude. Une perspective qui devrait surtout s’articuler en seconde partie de siècle (après 2050). Là aussi, il existe des contrastes régionaux appréciables. Le déficit pluviométrique d’été s’annonce par exemple marqué sur la moitié sud mais plus modéré en allant vers le nord.
… rythmé par la complexité du monde réel
Si ce brossage très général du changement climatique a un côté pratique de vulgarisation, il masque néanmoins un fait important : nous n’expérimentons pas directement ces évolutions moyennes qui peuvent seulement être calculées. Leur intérêt étant d’isoler des composantes climatiques plus ou moins lentes afin d’alimenter un cadre de réflexion général. En particulier, pour l’alerte. Mais la façon dont les changements s’imposent et s’imposeront à nous vient de la conjugaison entre une fluctuation dominante – le réchauffement dû aux GES – et toute une série de fluctuations secondaires. Ces dernières pouvant être internes à la machine climatique ou forcées, par exemple par le volcanisme.
Dans nos régions, on peut distinguer quatre régimes climatiques entre lesquels l’atmosphère transite d’une semaine à l’autre (voir ci-dessus). Or, selon le régime en présence, la déclinaison du réchauffement planétaire sur nos territoires variera de façon considérable. Par exemple, en régime NAO+, favorable à un temps sec au sud de la France, le risque de canicules et de manque d’eau sera fortement augmenté. A contrario, en régime NAO –, propice au passage de perturbations sur l’Hexagone, c’est le risque de précipitations intenses et d’inondations qui sera décuplé.
En somme, les errances de la circulation atmosphérique – ou océanique – font que l’évolution des variables climatiques ne se fera jamais de manière aussi simple que le laissent penser les moyennes. Mais plus réalistement sous forme de crises alternées, toujours plus fréquentes et cohérentes avec un monde globalement plus chaud. Par ailleurs, le temps que l’atmosphère passe dans chaque régime peut lui-même changer. À cet égard, on peut voir les bouleversements en route comme une distorsion des statistiques connues.
L’exemple d’AcclimaTerra
Cette évolution complexe qui est et sera celle du monde réel cristallise tout l’enjeu de l’adaptation au changement climatique. En effet, élaborer des mesures visant à protéger les territoires demande d’arbitrer des prises de décisions. La confrontation à la complexité du problème est donc une nécessité et, comme nous l’avons vu, également source de difficultés. Pour ces raisons, le besoin d’éducation et de pédagogie vis-à-vis de ces enjeux est indispensable. Autour d’un tel contexte, l’élan donné par AcclimaTerra en région Aquitaine – et rapidement suivi d’autres initiatives du même type – fait office d’avant-garde dans ce domaine.
Sources : ClimatHD : le climat passé et futur en France/DRIAS les futurs du climat/Les impacts du changement climatique en Aquitaine : un état des lieux scientifique, Le Treut, H. (2013)/Anticiper les changements climatiques en Nouvelle-Aquitaine, Le Treut, H. (2018).