Partageant leurs objectifs avec le MIT Technology Review cette semaine, les architectes informatiques de Microsoft Research ont affirmé leur intention de proposer d’ici trois ans un système de stockage opérationnel basé sur l’ADN et fonctionnant dans un centre de données.
Stocker des données dans l’ADN n’est pas une idée nouvelle. Des travaux sont menés en ce sens depuis des années puisque comme vous le savez, l’acide désoxyribonucléique est une molécule qui « stocke » et transmet naturellement les instructions génétiques encodées dans la célèbre double hélice de la molécule permettant le développement des organismes vivants. Techniquement, le concept est applicable à l’informatique et c’est pourquoi Microsoft œuvre en ce sens en ouvrant de vraies pistes sur le stockage pérenne d’informations. Les lecteurs à bande (le format le plus commun utilisé pour l’archivage des données) rencontrent en effet aujourd’hui de vraies limites physiques face à la masse de données générées chaque jour dans le monde. L’ADN pourrait quant à lui stocker des données avec des densités record.
« L’ADN est le support de stockage connu le plus dense de l’univers », explique Victor Zhirnov, de Semiconductor Research Corporation. « Le problème que nous résolvons est la croissance exponentielle de l’information stockée ». Il y a quelques mois, un groupe de chercheurs franchissait un cap en réussissant à stocker une grande quantité d’informations dans des brins d’ADN, en atteignant une densité théorique record de 215 pétaoctets par gramme. En juillet dernier, Microsoft annonçait avoir stocké 200 mégaoctets de données dans des brins d’ADN (une vidéo musicale). Pour la firme américaine, le prochain objectif sera de concevoir un « système protocommercial d’ici trois ans stockant une quantité de données sur l’ADN dans l’un de nos centres de données, pour au moins une boutique d’applications », explique Doug Carmean, architecte chez Microsoft Research.
Un matériau biologique tel que l’ADN pourrait sembler être un choix étrange pour sauvegarder de grandes quantités d’informations numériques, mais les avantages sont nombreux. L’ADN se révèle d’une part bien plus résistant que le silicium avec une durée de vie estimée à de cent à mille fois plus longue qu’un dispositif réalisé avec du silicium. Quant à sa capacité de stockage, l’ADN pourrait contenir 1.000.000.000.000.000.000 (c’est-à-dire un quintillion de bits de données dans un millimètre cube). Le problème principal reste le coût qui reste pour l’heure exorbitant en raison du processus chimique utilisé pour fabriquer des brins d’ADN. Les 200 premiers mégaoctets de données stockés il y a quelques mois avaient coûté pas moins de 800 000 dollars américains. Le processus devra donc être des milliers de fois moins cher pour en faire une option concurrentielle.
En ce sens, Microsoft collabore notamment avec Twist Bioscience, un fabricant d’ADN situé à San Francisco. Une des possibilités serait de remplacer le processus chimique vieux de quarante ans utilisé pour fabriquer de l’ADN par un procédé qui utilise des enzymes comme le fait notre propre corps. La société serait en discussion avec des studios de cinéma pour stocker des films avec cette méthode.
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