Pour la première fois, des travaux ont signalé la présence de microplastiques dans la couche de neige du continent le plus isolé et le plus inhospitalier du monde, l’Antarctique. Les résultats ont été publiés dans la revue scientifique The Cryosphere le 8 juin dernier.
La découverte a été faite suite à l’analyse d’échantillons de neige prélevés en 2019 par une doctorante de l’Université de Canterbury (Nouvelle-Zélande) au niveau de la barrière de glace de Ross. « Lorsqu’Alex s’est rendue en Antarctique en 2019, nous étions optimistes sur le fait qu’elle ne trouverait pas de microplastiques dans un endroit aussi vierge et éloigné », relate Laura E. Revell, coauteure de l’étude.
Une observation majeure
Or, les analyses chimiques et spectroscopiques ont révélé la présence d’une pollution plastique évaluée à 29 microparticules par litre de neige fondue. Il s’agit cependant d’une moyenne qui cache des variations notables selon les sites de prélèvements. Par exemple, cette valeur peut être jusqu’à trois fois plus élevée à proximité des stations de recherche scientifiques. Il reste que même les endroits les plus éloignés contenaient une proportion significative de particules.
« C’est incroyablement triste, mais la découverte de microplastiques dans la neige fraîche de l’Antarctique met en évidence l’étendue de la pollution plastique, même dans les régions les plus reculées du monde », rapporte Alex Aves, auteure principale de l’étude. « Nous avons collecté des échantillons de neige sur dix-neuf sites de la région de l’île de Ross et avons trouvé des microplastiques sur chacun d’eux ».
Des sources de microplastiques plus ou moins proches
Les plastiques identifiés se composent de fibres appartenant au morphotype le plus courant et d’un des polymères les plus communs, le polyéthylène téréphtalate. « La modélisation atmosphérique suggère que les microplastiques ont pu parcourir des milliers de kilomètres dans les airs, mais il est tout aussi probable que la présence humaine en Antarctique ait établi une empreinte microplastique », résument les auteurs dans leur étude.
Parmi les sources locales de microplastiques, on trouve les équipements, vêtements et autres matériels mobilisés par les chercheurs. Les apports extérieurs au continent proviendraient quant à eux des mers de Ross, d’Amundsen et de Weddell connues pour être des sources potentielles en raison de la mauvaise gestion de certains déchets dans les océans. Or, cette pollution affecte non seulement les organismes qui peuplent le continent blanc, mais aussi le rythme de fonte des glaces. En effet, en diminuant l’albédo, les particules augmentent la part de rayonnement solaire absorbée en surface et tendent à accélérer le dégel.
« Les recherches d’Alex et de ses collègues permettent aux parties du traité sur l’Antarctique de prendre des décisions fondées sur des preuves concernant la nécessité urgente de réduire la pollution plastique à l’avenir », rapporte Natasha Gardiner, chercheuse en glaciologie qui n’a pas participé à l’étude. « Nous pouvons utiliser ces informations pour réduire la pollution plastique à sa source et orienter nos pratiques de gestion environnementale dans un sens plus large ».