Une étude surprenante menace de bouleverser la physique des particules

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Crédits : bellergy/Pixabay

Des physiciens annoncent avoir effectué la mesure la plus précise de la masse d’une particule clé : le boson W. Or, celle-ci diffère considérablement des prédictions précédentes. En cas de confirmation, ces résultats pourraient bouleverser le modèle standard de la physique des particules.

Développé dans les années 1970, le modèle standard de la physique des particules est un modèle particulièrement rigoureux permettant d’expliquer les interactions des particules et la plupart des forces fondamentales. Il ne couvre pas tout (les principales pièces manquantes incluent la matière noire ou l’énergie noire par exemple), mais ce qu’il couvre tend à résister aux expériences visant à tester les prédictions. Enfin, pas toujours. Une particule, le boson W, menace en effet de percer un trou dans ce modèle soigné.

Une mesure ultra-précise

Les bosons W sont des particules élémentaires porteuses de la force faible, médiatrices de processus nucléaires comme ceux à l’œuvre au cœur des étoiles. Selon le modèle standard, leur masse est liée aux masses du boson de Higgs et d’une particule subatomique appelée quark top.

Dans le cadre d’un nouvel effort, une collaboration de plusieurs centaines de physiciens a voulu effectuer une nouvelle estimation de la masse de cette particule. Pour ce faire, les chercheurs ont passé une décennie à examiner 4,2 millions de candidats collectés au cours de ces vingt-cinq dernières années au Tevatron. Il s’agit d’un ancien accélérateur de particules du Fermilab situé dans l’Illinois (États-Unis).

À partir de ces données, l’équipe a pu calculer la masse du boson W à 0,01 % près, ce qui est deux fois plus précis que les mesures précédentes. D’après ces nouveaux calculs, le boson W aurait une masse de 80 433,5 méga-électronvolts (MeV) avec une incertitude de +/- 9,4 MeV. Or, la mesure prédite par le modèle standard situait cette masse à 80 357 MeV à +/-19 MeV.

Cimentant davantage l’anomalie, la masse du boson W avait également été mesurée au moyen de données collectées au Grand collisionneur de hadrons, le plus grand accélérateur de particules au monde. Cette équipe est quant à elle arrivée à une valeur de 80 354 MeV (+/- 32 MeV), ce qui est proche de celle donnée par le modèle standard.

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Le Collider Detector du Fermilab (CDF). Crédits : Laboratoire Fermi

Des résultats qui interrogent

Naturellement, ces résultats publiés dans la revue Science ont fait beaucoup de remous dans la communauté des physiciens, poussant certains non impliqués dans l’étude à les remettre en cause. Les scientifiques à l’origine de cette nouvelle analyse assurent quant à eux que les procédures utilisées pour atteindre leur chiffre ont été correctement examinées pendant de nombreuses années.

« Le nombre d’améliorations et de vérifications supplémentaires apportées à notre résultat est énorme« , confirme Ashutosh Kotwal, principal auteur de ces travaux. « Nous avons pris en compte notre meilleure compréhension de notre détecteur de particules ainsi que les avancées dans la compréhension théorique et expérimentale des interactions du boson W avec d’autres particules. Lorsque nous avons finalement dévoilé le résultat, nous avons constaté qu’il différait de la prédiction du modèle standard« .

Si elle venait à être vérifiée, cette nouvelle masse pourrait faire allusion à des particules inconnues ou à une nouvelle physique au-delà du modèle standard. Autrement dit, malgré quelques pièces manquantes, ce qui nous permet aujourd’hui d’expliquer le bon fonctionnement de l’Univers pourrait être complètement remis en cause. D’autres investigations seront donc nécessaires pour aider à percer le mystère.