Comment le manteau terrestre garantit que nous aurons toujours des océans

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Le niveau des ocĂ©ans terrestres a peut-ĂŞtre montĂ© et baissĂ© au cours des millĂ©naires, mais il est restĂ© relativement stable sur des milliards d’annĂ©es. Selon deux chercheurs français, l’Ă©quilibre du cycle des eaux profondes (l’Ă©change d’eau entre la surface de la Terre et son intĂ©rieur) jouerait un rĂ´le important dans le maintien de cette stabilitĂ©.

Sous la surface de la Terre se trouve un autre ocĂ©an gigantesque, pas au sens strict du terme, mais au sens le plus lâche. Les atomes composites d’hydrogène et d’oxygène y sont en effet liĂ©s chimiquement Ă  la roche environnante. Or, des travaux rapportĂ©s par Hakai magazine montrent qu’une grande partie de cette eau est plus en transit qu’on ne le pensait auparavant.

Concrètement, lorsque la roche solide du manteau (la couche de la planète entre la croĂ»te et le noyau) devient saturĂ©e en eau chimiquement dissociĂ©e, celle-ci peut se transformer en boue liquide avant de remonter en surface et d’imprĂ©gner nos ocĂ©ans.

Le cycle des eaux profondes

Les scientifiques savent dĂ©jĂ  que l’eau peut ĂŞtre entraĂ®nĂ©e vers le manteau par la subduction des plaques tectoniques et ramenĂ©e Ă  la surface par les Ă©ruptions volcaniques et autres Ă©vents hydrothermaux par exemple. Si ce cycle de l’eau profonde entre le manteau et la surface est en Ă©quilibre, le niveau de la mer terrestre reste stable Ă  son tour. L’habitabilitĂ© de la Terre a d’ailleurs grandement bĂ©nĂ©ficiĂ© du fait que le niveau de la mer sur Terre soit restĂ© relativement stable pendant des milliards d’annĂ©es.

Cependant, les estimations basĂ©es sur les mĂ©canismes prĂ©cĂ©demment compris du cycle des eaux profondes suggĂ©raient que près de deux fois plus d’eau Ă©tait transportĂ©e dans le manteau qu’elle n’Ă©tait relâchĂ©e en surface. Et jusqu’Ă  prĂ©sent, nous pensions qu’une grande partie de cette eau restait sous terre pour toujours. Si cela avait Ă©tĂ© le cas, l’eau de surface de la Terre aurait alors lentement diminuĂ©.

Dans le cadre d’une Ă©tude, Denis Andrault et Nathalie Bolfan-Casanova, gĂ©oscientifiques Ă  l’UniversitĂ© de Clermont Auvergne, montrent qu’une rĂ©intĂ©gration de cette eau profonde suffirait Ă  maintenir l’Ă©quilibre.

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Une « pluie » venant d’en bas

Les chercheurs ont ici utilisĂ© des modĂ©lisations pour examiner ce qui se passe lorsqu’une dalle de subduction de roche imprĂ©gnĂ©e d’eau dissociĂ©e s’enfonce profondĂ©ment dans le manteau. Ils ont alors constatĂ© qu’Ă  mesure qu’elle descend, l’augmentation des tempĂ©ratures et des pressions fait fondre les roches, libĂ©rant alors son eau. « Imaginez un mĂ©lange pâteux de grains de sable collĂ©s les uns aux autres avec de la boue entre eux« , dĂ©taille le Dr Andrault.

Au fur et Ă  mesure que de plus en plus de roches fondent et que plus d’eau est libĂ©rĂ©e de la roche, la matière finit par devenir suffisamment lĂ©gère pour commencer Ă  remonter. Ce faisant, l’eau se lie aux minĂ©raux du manteau supĂ©rieur (entre la surface et 670 km de profondeur) et abaisse leur point de fusion, provoquant plus de fusion qui libère plus d’eau, et ainsi de suite.

Ces travaux soulignent qu’il pourrait donc y avoir un moyen supplĂ©mentaire de transporter l’eau vers la surface, et notamment dans nos ocĂ©ans. Ce modèle note Ă©galement que le manteau supĂ©rieur contiendrait aujourd’hui l’Ă©quivalent du volume total des ocĂ©ans sur Terre, de quoi garantir qu’il y aura toujours de l’eau Ă  la surface de la Terre.

Les chercheurs insistent nĂ©anmoins sur le fait que davantage de recherches seront nĂ©cessaires pour comprendre ce phĂ©nomène. « Nous avons encore beaucoup Ă  apprendre sur le cycle des eaux profondes« , note Yoshinori Miyazaki, du California Institute of Technology, qui n’a pas participĂ© Ă  l’Ă©tude. « Cependant, un fait certain est qu’il a fonctionnĂ© d’une manière Ă©tonnante pour maintenir le niveau moyen de la mer sur Terre relativement constant au cours des cinq cents derniers millions d’annĂ©es, et probablement plus longtemps, pour maintenir un environnement habitable pour que la vie continue« .