Manger de la viande produite en laboratoire, ça vous tente ?

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Alors qu’une grande part des quantités de viande consommée est issue de l’industrie de l’élevage intensif, la question de la viande « in vitro » se pose de plus en plus. Il semble que cette chair animale obtenue artificiellement ne plaît pas à beaucoup de consommateurs potentiels outre les arguments écologiques. Il faudra sûrement trouver mieux !

Le tout premier hamburger 100 % artificiel a été fabriqué en 2013 dans un laboratoire, le Future Food Studio, et consommé lors d’un événement médiatique à Londres. Cette nouvelle ayant fait le tour du monde avait laissé croire que ce genre de produit allait envahir les magasins et les restaurants.

Le 15 mars 2017, une annonce a été faite par une start-up basée dans la Silicon Valley : Memphis Meats. Cette société est parvenue à recréer de la viande de poulet et de canard à partir de cellules souches. Cependant, une question se pose : comment séduire le consommateur qui n’est visiblement pas prêt à avaler une viande n’ayant appartenu à aucun animal vivant ? Ceci s’apparente presque à de la science-fiction !

Alors que les arguments écologiques avancés par les nouveaux industriels de la viande in vitro avaient pris pour cible les mangeurs de viande, ces derniers ne font pas effet. Nous sommes en 2017 et malgré plusieurs années de dénonciation de l’industrie agroalimentaire, nous savons que les habitudes alimentaires des consommateurs sont difficiles à changer, en tout cas en ce qui concerne la viande. Les arguments écologiques sont d’ailleurs les mêmes utilisés par les vegans et autres végétariens, ainsi que les personnes pensant que les insectes sont l’avenir.

La société Memphis Meats tente de vanter les qualités de ses produits dont l’aspect, l’odeur, la consistance et la saveur sont pratiquement identiques à de la viande de poulet bien réelle !

« Nous ne nous souhaitons pas demander aux gens de changer entièrement leur régime alimentaire. Nous nous contentons de proposer un produit que les gens consomment depuis des millénaires en utilisant un processus alternatif qui est meilleur pour l’environnement, le bien-être animal et la santé publique. Nous pensons qu’en communiquant plus efficacement sur ce sujet, les consommateurs auront enfin la curiosité de goûter nos produits et seront immédiatement convaincus »,
avait alors déclaré David Kay, analyste pour la start-up californienne.

Il s’avère que produire artificiellement du muscle et de la graisse à partir de cellules souches fait un peu peur malgré le fait que ce procédé bénéficie effectivement d’une empreinte écologique plus faible. Malgré le côté Frankenstein de la viande in vitro, aucun animal ne meurt, des surfaces moins importantes sont nécessaires, moins d’eau est utilisée et il y a moins de rejet de GES dans l’atmosphère. De plus, la pratique in vitro permet un contrôle des propriétés nutritives de la viande en modifiant sa composition en graisses, vitamines et protéines. Enfin, aucun produit chimique tel que les antibiotiques actuellement administrés aux animaux d’élevage malades de leurs conditions de détention n’est utilisé.

Force est de constater qu’en général, les consommateurs ne parviennent toujours pas à comprendre (ou à s’intéresser) réellement l’impact environnemental de la viande industrielle. Pratiques sociales, traditions, plaisir culinaire, autant de notions qu’aucun régime alternatif ne pourra éradiquer, qu’il s’agisse de végétarisme, d’entomophagie (consommations d’insectes) et évidemment, de viande artificielle.

Pour Suzanne Lipton, experte en alimentation durable et chef de projet à l’Institut de la Terre de l’Université Columbia, les arguments écologiques ne pourront jamais séduire les consommateurs :

« Lorsque l’on songe à la viande in vitro, notre première pensée est de se dire qu’elle est nécessairement répugnante, sans saveur parce qu’elle n’est pas “naturelle” — mais en quoi l’élevage industriel l’est-il davantage ? Si la viande produite en laboratoire était moins grasse, plus protéinée, moins calorique et moins chère que la viande animale, peut-être arriverait-on à convaincre les consommateurs de l’essayer. Les arguments diététiques et économiques seront toujours plus forts que les arguments écologiques. »

Quoi qu’il en soit, la start-up Memphis Meats a également déclaré être en mesure de commercialiser des produits bon marché pour 2021, et qu’à partir du moment où une production de masse sera établie, les prix seront plus abordables que ceux de la viande classique.

Sources : The Guardian – Motherboard – Hitek