Et si vos défenses immunitaires étaient
réglées… par la lumière du jour ? C’est la découverte fascinante
qu’a faite une équipe de scientifiques de l’Université d’Auckland,
en Nouvelle-Zélande. En étudiant le comportement de cellules
immunitaires chez un petit poisson d’eau douce, le poisson zèbre,
les chercheurs ont mis en lumière un mécanisme insoupçonné : nos
globules blancs sont synchronisés avec les cycles jour-nuit, et la
lumière renforce leur capacité à combattre les
infections.
Quand la lumière devient un
signal pour le corps
Notre organisme fonctionne
selon un rythme circadien, une horloge interne d’environ 24 heures
qui régule des fonctions essentielles : sommeil, digestion,
température corporelle… Ce que montre cette nouvelle étude, publiée
dans la revue Science
Immunology, c’est que ce rythme circadien influence aussi
notre système immunitaire, et notamment l’activité de certaines
cellules de première ligne : les neutrophiles.
Les neutrophiles sont les
globules blancs les plus abondants dans notre corps. Ils
interviennent en urgence dès qu’une infection est détectée,
détruisant les agents pathogènes avant même que les autres défenses
immunitaires ne prennent le relais. Or, selon les travaux de
l’équipe néo-zélandaise, ces cellules seraient particulièrement
efficaces lorsqu’elles sont activées pendant la phase diurne,
autrement dit, lorsqu’il fait jour.
Le poisson zèbre, un modèle
lumineux
Pour observer ce phénomène en
détail, les chercheurs ont utilisé un animal modèle : le poisson
zèbre (Danio rerio). Ce
petit vertébré, très utilisé en biologie, présente plusieurs
avantages. Il partage une grande partie de son patrimoine génétique
avec l’humain, et certains individus peuvent être élevés avec un
corps transparent, ce qui permet d’observer en direct les processus
biologiques internes.
Les expériences ont montré que
les neutrophiles du poisson zèbre étaient bien plus actifs le
matin, au début de leur phase d’éveil. Ce pic d’efficacité semble
être une adaptation évolutive : c’est durant la période active,
quand l’organisme est plus exposé à son environnement, que le
risque d’infection est le plus grand.
Mais ce n’est pas tout. Les
chercheurs ont également découvert que les neutrophiles possèdent
leur propre horloge circadienne, une sorte de chronomètre
biologique interne, synchronisé par la lumière.
Des cellules qui lisent
l’heure grâce à la lumière
La plupart des cellules du
corps humain sont équipées d’une horloge interne, mais celle des
neutrophiles semblait jusque-là mal comprise. L’étude a révélé que
l’exposition à la lumière réinitialise cette horloge, ce qui permet
aux cellules d’adapter leur activité en fonction du moment de la
journée.
Ce lien entre lumière et
efficacité immunitaire pourrait avoir des implications médicales
majeures. Comme l’explique Christopher Hall, chercheur principal de
l’étude :
« Étant donné que les
neutrophiles sont les premières cellules immunitaires à intervenir
en cas d’inflammation, notre découverte a de vastes implications
thérapeutiques. »
Crédit :
iStock
ue microscopique de neutrophiles (globules blancs) en train de
phagocyter des agents pathogènes dans le flux sanguin. Ces
cellules, clés de notre système immunitaire, sont plus efficaces à
la lumière du jour grâce à leur horloge biologique interne. Crédits
: Istock
Vers une médecine de la
lumière ?
Cette découverte ouvre la voie
à de nouvelles approches médicales, notamment dans le traitement
des maladies infectieuses et inflammatoires. En ajustant le moment
de prise de certains traitements à l’horloge interne du patient, on
pourrait maximiser leur efficacité. De plus, cette recherche
suggère que l’on pourrait un jour cibler l’horloge des neutrophiles
directement, pour renforcer leur action de manière plus
précise.
On peut aussi en tirer des
leçons très pratiques : l’exposition régulière à la lumière
naturelle pourrait stimuler notre immunité de façon naturelle, en
boostant notre rythme biologique et l’activité de nos globules
blancs. À l’inverse, le manque de lumière – fréquent en hiver ou
chez les personnes confinées – pourrait affaiblir notre réponse
immunitaire.
Une nouvelle lumière sur
notre santé
En révélant que la lumière du
jour influence directement nos défenses immunitaires, cette étude
éclaire d’un jour nouveau la manière dont notre organisme se
synchronise avec son environnement. Ce n’est plus seulement notre
sommeil ou notre humeur qui sont régis par le cycle
lumière-obscurité, mais aussi notre capacité à combattre les
infections.
Un nouvel argument, s’il en
fallait un, pour sortir prendre l’air (et la lumière) chaque
matin.
Brice est un journaliste passionné de sciences. Ses domaines
favoris : l'espace et la paléontologie. Il collabore avec
Sciencepost depuis près d'une décennie, partageant avec vous les
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