Les expériences de mort imminente (EMI) fascinent depuis des siècles, souvent décrites comme des moments de conscience intense où l’on peut voir une lumière au bout d’un tunnel, avoir la sensation de quitter son corps ou encore ressentir une paix absolue. Longtemps considérées comme des phénomènes mystiques ou paranormaux, elles sont aujourd’hui étudiées par les neurosciences, qui tentent d’en percer les mécanismes. Alors, que sait-on vraiment de ces expériences ?
Qu’est-ce qu’une EMI ?
Les EMI surviennent généralement lorsque la vie d’une personne est en danger : arrêt cardiaque, coma, accident grave, AVC… Pourtant, bien que l’activité cérébrale soit fortement altérée dans ces moments critiques, ceux qui en ont fait l’expérience décrivent des souvenirs d’une clarté exceptionnelle. Parmi les éléments les plus communs, on retrouve :
Une sensation de détachement du corps : certaines personnes rapportent s’être vues allongées sur un lit d’hôpital, comme si elles flottaient au-dessus de leur propre corps.
Une lumière intense : beaucoup décrivent un tunnel de lumière ou une sensation de chaleur enveloppante.
Une revue de vie : certains témoignages font état d’un défilement rapide des souvenirs marquants de leur existence.
Une rencontre avec des êtres lumineux : que ce soit des proches disparus, des figures religieuses ou des présences bienveillantes.
Mais comment expliquer scientifiquement ces phénomènes ?
Une question de chimie et d’électricité cérébrale
Les neuroscientifiques se penchent sur ces expériences en analysant ce qui se passe dans le cerveau lors de situations critiques. Une des premières hypothèses repose sur les neurotransmetteurs, ces substances chimiques qui transmettent les signaux entre les neurones. Lorsqu’une personne est en détresse vitale, son cerveau libère en grande quantité des substances comme la sérotonine, la dopamine ou les endorphines. Ces molécules pourraient expliquer la sensation de bien-être et d’euphorie souvent rapportée.
Par ailleurs, certaines études ont montré que le cerveau mourant connaît une activité électrique anormale et hyper-synchronisée. Dans une étude menée sur des rats en 2013, des chercheurs ont observé que, juste après un arrêt cardiaque, l’activité cérébrale devenait plus intense qu’en état de veille. Cette hyperactivité pourrait expliquer la vivacité et la clarté des souvenirs rapportés lors des EMI.

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Crédits : Lidiia Moor/istockL’influence des psychédéliques
Une piste intéressante dans l’étude des expériences de mort imminente est leur comparaison avec les effets des substances psychédéliques comme la kétamine, le DMT (diméthyltryptamine) ou le LSD. Ces substances altèrent profondément la perception et induisent souvent des sensations similaires à celles rapportées par ceux qui ont vécu une EMI : des sorties du corps, des visions lumineuses, et un sentiment d’unité avec l’univers.
Les chercheurs pensent que les psychédéliques modifient les réseaux cérébraux d’une manière semblable à la déconnexion observée lors d’une EMI. Cela suggère que ces expériences pourraient être le résultat de modifications neurochimiques dans le cerveau, plutôt que d’être le signe d’une transition vers une autre dimension. Par exemple, en agissant sur certaines zones du cerveau liées à la perception de soi et à l’environnement, ces substances peuvent créer des états de conscience altérés, semblables à ceux vécus dans les EMI.
Les recherches récentes sur les psychédéliques montrent qu’ils provoquent des changements dans la manière dont le cerveau traite les informations, ouvrant potentiellement la voie à des expériences mystiques. En perturbant les systèmes sensoriels habituels, ces substances permettraient au cerveau d’explorer des états de conscience modifiés, créant ainsi une déconnexion similaire à celle observée lors des EMI. Cependant, la question demeure : ces expériences sont-elles purement neurochimiques ou révèlent-elles une connexion avec une dimension spirituelle plus profonde ?
Une perspective évolutive
Une autre explication des EMI vient des théories évolutionnistes. Certains chercheurs suggèrent que ces expériences pourraient avoir servi un but adaptatif en aidant les individus à surmonter la peur de la mort et à accepter des situations de grande détresse. En d’autres termes, les EMI auraient pu jouer un rôle protecteur en favorisant la résilience psychologique lors d’événements extrêmes.
L’argument est renforcé par le fait que les récits d’EMI présentent des similitudes frappantes à travers des cultures et des époques différentes, indiquant un phénomène universellement humain. Ce phénomène aurait pu servir à apaiser les individus en crise, leur permettant de vivre leur expérience de manière plus sereine et d’accepter leur destin, un mécanisme qui aurait renforcé la survie individuelle et collective dans des moments de danger imminent.
Ainsi, les EMI pourraient offrir un réconfort psychologique face à la mort imminente, apaisant l’anxiété et permettant aux individus de mieux gérer des situations de stress extrême. En ayant moins peur de la mort, les personnes pourraient mieux s’adapter aux défis de la vie, ce qui serait bénéfique pour leur survie et celle de leur groupe social. Ce processus aurait donc été sélectionné au cours de l’évolution, contribuant à la cohésion sociale et à une gestion plus calme des crises.
Un phénomène encore mystérieux
En somme, bien que des avancées scientifiques permettent d’expliquer certains aspects des EMI, de nombreuses questions demeurent sans réponse. Pourquoi certaines personnes vivent-elles une EMI et d’autres non, même dans des situations similaires ? Comment expliquer les cas où des patients rapportent des détails précis sur leur environnement alors qu’ils étaient en état d’inconscience ?
Si la science n’a pas encore toutes les réponses, une chose est sûre : les EMI continueront de fasciner et de questionner notre rapport à la mort et à la conscience.