Les lions ont tendance à devenir agressifs lorsqu’ils sont rencontrent leurs congénères, mais selon une étude, un jet d’ocytocine dans le nez peut rendre ces présentations un peu moins mortelles. Ces travaux ont pour but de faciliter l’intégration de nouveaux groupes dans le cadre de projets de conservation.
L’ocytocine est un neuropeptide sécrété par l’hypothalamus et excrétée par l’hypophyse postérieure (neurohypophyse). Cette hormone agit principalement sur les muscles lisses de l’utérus et des glandes mammaires. Chez les humains, elle favorise également la confiance, l’empathie, la générosité et la sexualité. Pour cette raison, l’ocytocine est souvent appelée l’hormone « de l’amour », du « bonheur » ou encore de « l’attachement ».
Chez les animaux, des recherches précédentes ont montré que l’ocytocine pouvait aussi jouer un rôle dans le lien social. Dans le cadre de nouveaux travaux, le biologiste animalier Craig Packer et la neuroscientifique Sarah Heilbronner, de l’Université du Minnesota, se sont penchés sur le cas des lions. Leur étude vient d’être publiée dans la revue iScience.
Une espèce en danger
Le nombre de lions est actuellement en chute libre. On ne dénombre aujourd’hui plus que 20 000 individus, peut-être moins, à l’état sauvage. Ces prédateurs sont en effet souvent tués par les humains en représailles aux attaques contre le bétail. Ils sont également ciblés par les chasseurs de trophées.
Les efforts de conservation des lions impliquent souvent de relocaliser des individus dans des réserves clôturées. Alors que ces structures permettent de maintenir les animaux en sécurité, elles impliquent également une certaine proximité entre les individus. Or, les lions sont des prédateurs agressifs et très territoriaux. Ainsi, placer un ou plusieurs spécimens dans une zone déjà fréquentée par un autre groupe de lions peut mener à des conflits, ce qui n’est pas non plus dans l’intérêt de l’espèce.
Dans le cadre de ces travaux, les scientifiques ont voulu voir si l’ocytocine favoriserait les liens sociaux entre les lions « rivaux ». Pour ce faire, ils ont attiré plusieurs individus avec de la viande dans une réserve faunique sud-africaine, avant de vaporiser de l’ocytocine directement dans leurs narines.
« Ce faisant, nous savions que l’ocytocine remonterait le nerf trijumeau et le nerf olfactif avant d’arriver directement dans le cerveau« , détaille Jessica Burkhart dans un communiqué. « Autrement, la barrière hématoencéphalique aurait pu la filtrer« .
Des lions moins agressifs (sauf quand ils ont faim)
Les résultats ont montré que les vingt-trois lions impliqués dans l’étude étaient effectivement plus tolérants les uns envers les autres. « Vous pouviez voir leurs traits s’adoucir immédiatement. Ils passaient de ridés et agressifs à ce comportement totalement calme« , poursuit la chercheuse. « Ils se détendaient totalement. C’était incroyable« .
Pour mesurer l’étendue de cette tolérance, les chercheurs ont ensuite introduit un jouet dans la cage. Alors que les lions garderaient normalement une distance d’environ sept mètres avec les autres, ceux traités avec de l’ocytocine se rapprochaient souvent à moins de 3,5 mètres les uns des autres.
Cette nouvelle tolérance s’est cependant évaporée en présence de nourriture. Placez un morceau de viande au milieu et ocytocine ou non, les lions redeviennent intolérants aux intrus s’approchant trop près de leur pitance. Malgré tout, cette expérience s’est révélée très encourageante.
Le fait de proposer de l’ocytocine aux lions n’est pas vraiment contre nature dans la mesure où ces prédateurs sont de loin l’espèce féline la plus sociable, montrant une affection évidente envers leurs compagnons en grande partie motivée par les dangers posés par les groupes voisins. Or, ces comportements sociaux entre membres du même groupe sont très susceptibles de libérer une impulsion d’ocytocine. Ce que démontre cette nouvelle étude, c’est que cette réponse territoriale aux étrangers diminue considérablement avec davantage d’ocytocine.