Les océans se mélangent de moins en moins et ce n’est pas une bonne nouvelle

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Crédits : Pixnio

L’océan est plus chaud en surface qu’en profondeur, ce qui le rend stable du point de vue de la flottabilité. Or, cette stabilité n’a fait que s’accentuer depuis 50 ans en raison du réchauffement global. De nouveaux travaux montrent que le rythme est même beaucoup plus rapide qu’estimé précédemment. Une évolution aux implications multiples puisqu’elle rend le mélange vertical des océans plus difficile. Les résultats sont publiés dans la revue Nature ce 24 mars.

Contrairement à l’atmosphère, l’océan est une enveloppe fluide chauffée par le haut. Une disposition qui le rend beaucoup plus stable que l’atmosphère qui le surplombe. On dit que l’océan est fortement stratifié, comme de l’huile sur de l’eau. À cet égard, les physiciens tendent à le séparer en deux couches bien différenciées. Une sphère chaude allant de la surface jusqu’à quelques centaines de mètres de profondeur et une sphère froide – beaucoup plus épaisse – située en dessous.

Or, avec le changement climatique, la stratification des océans augmente. En effet, l’accentuation du chauffage par le haut et l’arrivée croissante d’eau douce via la fonte des glaces et la hausse des précipitations crée un arrangement encore plus stable des couches océaniques. Une conséquence anticipée depuis longtemps par les calculs physiques. Cependant, de récentes observations montrent que l’évolution est six fois plus rapide qu’on ne le pensait.

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Représentation schématique de l’océan, avec les sphères chaude de surface et froide des profondeurs. La zone rouge indique la transition entre les deux – appelée pycnocline. Crédits : Jean-Baptiste Sallée & al. 2021.

Océans : un découplage entre surface et profondeur

Les chercheurs impliqués, issus du CNRS, de Sorbonne Université et de l’IFREMER ont étudié l’évolution de la stratification d’été entre 1970 et 2018. La série de 50 ans obtenue couvre une large partie des océans et montre une hausse de stabilité avoisinant les 9 % par décennie. Par ailleurs, la frontière entre la sphère chaude et la sphère froide s’est approfondie de 3 % par décennie. Une valeur qui correspond à quelques mètres tous les 10 ans. En plus des processus évoqués plus haut, l’intensification des vents de surface a participé à cette tendance.

Un océan plus stratifié articule un couplage de moins en moins efficace entre la couche supérieure et inférieure. Autrement dit, la chaleur, le carbone et le dioxygène sont moins facilement transmis vers les eaux profondes. En pratique, c’est comme si la capacité de stockage de l’océan diminuait. Un cercle vicieux qui amplifie encore un peu plus la rapidité du changement climatique. De plus, la profondeur de la couche de mélange « façonne les écosystèmes marins en abritant la majeure partie de la production primaire (…) », note le papier dans son résumé. Ainsi, les résultats ont également des implications fortes pour le domaine du vivant.

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