Lorsque les temps étaient durs, il y a environ 2,5 millions d’années, les mères australopithèques n’hésitaient pas à nourrir de nouveau leurs enfants au sein. Alors même que ces derniers étaient sevrés.
Les habitudes d’allaitement d’Australopithecus africanus – qui vivait il y a plus de deux millions d’années en Afrique australe – avaient jusqu’à présent toujours été très floues. Nous savions en revanche que les longues périodes d’allaitement étaient courantes chez les grands singes. Il faut compter environ cinq ans pour les chimpanzés, ou encore quatre ans pour les gorilles. C’est généralement plus court chez les humains modernes. Pour nos ancêtres, il y a quelques milliers d’années, il fallait compter environ trois ans. Nous pensions alors que pour Australopithecus africanus, c’était à peu de chose près la même chose.
Un sevrage complet au bout d’un an seulement
Une récente analyse de quatre dents, publiée dans la revue Nature, suggère en effet le contraire. Ces dernières, découvertes dans la grotte de Sterkfontein en Afrique du Sud, sont datées entre 2,6 et 2,1 millions d’années. Nous savons que les dents – à la manière des arbres – conservent les traces de leur croissance. En les disséquant (pour en évaluer la concentration de baryum), une équipe de chercheurs de la Southern Cross University (Australie) a ainsi pu rendre compte des habitudes alimentaires des nourrissons de cette espèce.
Cette analyse nous révèle alors des choses étonnantes. « L’allaitement d’Australopithecus africanusétait inhabituel, explique Renaud Joannes-Boyau, principal auteur de l’étude. Nous nous attendions à quelque chose d’assez long, semblable à ce que nous voyons chez les grands singes modernes, comme les chimpanzés ». Bien au contraire, il est ressorti que les mères australopithèques introduisaient dès 6 à 9 mois, peu à peu, les aliments solides. De manière générale, les nourrissons étaient complètement sevrés à l’âge d’un an.

Allaiter de nouveau en cas de besoin
Par ailleurs, les analyses nous révèlent également que lorsque les conditions l’exigeaient, les mamans allaitaient de nouveau leur petit. En cas de pénurie alimentaire, par exemple. Et ce pendant les 4 à 5 premières années de vie des enfants.
« Il pouvait parfois arriver que la mère comble une grande partie de la carence en calories par le lait maternel, poursuit en effet le chercheur. Pour la première fois, nous avons acquis de nouvelles connaissances sur la manière dont nos ancêtres élevaient leurs petits. Ces découvertes suggèrent pour la première fois l’existence d’un lien de longue durée entre la mère et le bébé chez les australopithèques. Cela nous oblige à repenser les organisations sociales de nos ancêtres les plus anciens ».
Les chercheurs ont formulé la stratégie suivante : au lieu de se déplacer d’un endroit à l’autre pour tenter de se nourrir toute l’année, nos ancêtres privilégiaient le fait de rester sur place, préférant survivre dans des conditions difficiles, mais avec moins de prédateurs. De ce fait, les mères devaient alors investir beaucoup plus dans leur unique progéniture, plutôt que de faire de nombreux enfants.
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