Une équipe de chercheurs du Centre Charles Perkins, en Australie, a découvert des preuves que les insectes sont capables de ressentir une douleur chronique après une blessure.
Nous savons depuis quelques années que les insectes sont capables de ressentir des douleurs physiques. Ce que nous apprennent ces nouvelles recherches menées par des scientifiques de l’Université de Sydney, c’est que les insectes – en l’occurrence ici les mouches des fruits – seraient également capables de souffrir de douleurs chroniques longtemps après la guérison de leur blessure. La découverte est importante, puisqu’elle pourrait déboucher sur la mise en place de nouveaux traitements plus efficaces chez l’Homme. Les détails de l’étude sont publiés dans la revue Science Advances.
« Les gens ne savent pas vraiment que les insectes peuvent ressentir la douleur, explique Greg Neely, principal auteur de l’étude. Mais il a déjà été démontré que de nombreux animaux invertébrés peuvent effectivement détecter et éviter les stimuli dangereux que nous percevons comme douloureux. Chez les non-humains, nous appelons ce sens la “nociception”, qui permet la détection des stimuli potentiellement nocifs, explique-t-il. Nous savions donc que les insectes pouvaient ressentir la “douleur”, mais ce que nous ne savions pas, c’était qu’une blessure pouvait entraîner une hypersensibilité durable aux stimuli normalement non douloureux, de la même manière que l’expérience d’un patient humain ».
Test de la douleur chez la mouche
La douleur chronique se définit comme une douleur qui persiste après la guérison de la blessure initiale. On distingue la douleur inflammatoire et la douleur neuropathique. Cette étude, menée sur les mouches des fruits, portait ici sur la douleur neuropathique, qui survient après une lésion du système nerveux.
Pour ces recherches, Greg Neely et son équipe ont donc volontairement blessé plusieurs mouches, en s’attaquant au nerf de l’une de leurs pattes. Une fois la blessure complètement guérie, ils ont alors découvert que chez tous les spécimens, les autres pattes étaient soudainement devenues hypersensibles. Autrement dit, « une fois que l’animal a été blessé une fois, il est hypersensible et tente de se protéger pour le restant de ses jours, explique le chercheur. Ce qui est plutôt cool et intuitif ».
Vers de nouveaux traitements pour l’Homme
Partant de ce constat, les chercheurs ont ensuite voulu comprendre les procédés génétiques permettant cette hypersensibilité. « La mouche reçoit des messages de douleur de son corps qui passent ensuite par des neurones sensoriels vers le cordon nerveux ventral, la version de notre moelle épinière chez la mouche, poursuit Greg Neely. Dans ce cordon nerveux se trouvent des neurones inhibiteurs qui agissent comme un portail pour autoriser ou bloquer la perception de la douleur. Ce qu’ont relevé les chercheurs, c’est qu’une fois blessé, le nerf fait en sorte que ces neurones inhibiteurs ne bloquent plus jamais la perception de douleur. Autrement dit, le seuil de douleur change et se met en mode hypervigilant ».
Chez l’Homme, ce serait donc la perte de ces « freins anti-douleurs » qui rend la vie des concernée·e·s très compliquée. Pour éviter les douleurs chroniques, nous devons faire en sorte de pouvoir récupérer ces « freins ». Le fait de le comprendre, grâce à la mouche, permettra aux chercheurs de se concentrer sur la création de nouveaux traitements permettant de cibler la véritable cause sous-jacente de ces douleurs. Plutôt que de simplement traiter les symptômes.
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