Les épisodes de pluies extrêmes à différents endroits du monde sont en fait interconnectés !

pluies éclair orage
Crédits : Wikimedia Commons.

En analysant la répartition spatio-temporelle des extrêmes de pluie à l’échelle du globe, des chercheurs ont mis en évidence le fait que ces événements météorologiques étaient en fait  interconnectés – ou téléconnectés. C’est la première fois que cette caractéristique est démontrée au niveau planétaire. L’étude a été publiée le 30 janvier dernier dans la revue scientifique Nature.

En sciences atmosphériques, une téléconnexion peut être définie comme « une relation entre des anomalies météorologiques se produisant dans des régions très éloignées du globe ». D’un point de vue dynamique, une téléconnexion reflète la présence d’un mode de circulation organisé à l’échelle hémisphérique ou planétaire.

Bien que des liens entre des épisodes de pluies extrêmes aient été démontrés à l’échelle régionale, cela n’avait encore jamais été entrepris au niveau global. Les processus physiques en jeu étant par ailleurs sensiblement différents. Dans l’étude discutée dans cet article, les extrêmes ont été définis comme le 95e percentile des jours avec occurrence de pluie. L’analyse se concentre sur la saison estivale (juin, juillet et août).

Des anomalies connectées entre elles par une même structure atmosphérique

Pour aboutir aux résultats présentés en introduction, les scientifiques se sont basés sur les données de précipitations fournies par la mission spatiale TRMM (acronyme anglais de Tropical Rainfall Measuring Mission). Les observations recouvrent la surface terrestre de 50° N à 50° S et remontent jusqu’en 1998. Ils ont ensuite appliqué une méthode basée sur la théorie des réseaux complexes. Ceci afin de déterminer le degré de synchronicité entre les différents événements identifiés.

Au terme de cette procédure, une structure pour le moins surprenante est révélée. « Par exemple, les extrêmes de la mousson d’été en Asie du Sud sont – en moyenne – liés à ceux des régions d’Asie de l’Est, d’Afrique, d’Europe et d’Amérique du Nord », indique Brian Hoskins, co-auteur de l’étude. « Bien que les pluies en Europe ne provoquent pas les pluies au Pakistan et en Inde, elles appartiennent au même schéma de circulation. Les pluies européennes étant déclenchées en premier », poursuit-il.

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Connexions entre les pluies extrêmes en Asie du Sud et celles ailleurs le globe. Les lignes rouges matérialisent des connexions régionales et les lignes bleues, des connexions d’échelles supérieures (>2500 kilomètres). Les contours bleus représentent la projection de ces liens sur la carte. Crédits : Boers & al. 2019.

La configuration de l’écoulement atmosphérique impliquée dans ces téléconnexions est contrôlée par les ondulations du courant-jet. Ces méandres ayant la propriété de pouvoir se propager autour du globe. Ainsi, elles peuvent connecter des régions distantes de plusieurs milliers à une dizaine de milliers de kilomètres. Une propagation qui ressemble – toute proportion gardée – à celle des ondes sur une corde.

Toutefois, les découvertes ne s’arrêtent pas là. Tandis que les extrêmes pluvieux européens précèdent en moyenne ceux en Asie du Sud (de 4 à 5 jours), il existe également une relation inverse dans laquelle ce sont ces derniers qui précèdent les extrêmes en Europe. En effet, l’information transportée peut se propager dans le sens du courant moyen d’ouest, mais aussi le remonter. Il s’agit donc d’une voie de communication à double sens.

Une piste pour améliorer les modèles météorologiques

« La découverte de ce schéma de téléconnexions dans les données pourrait améliorer les modèles météorologiques et climatiques. Elle pourrait également nous aider à comprendre les liens existant entre les différents systèmes de mousson et les événements extrêmes qui les composent », précise Niklas Boers, auteur principal du papier.

« J’espère que nos résultats aideront, à long terme, à prévoir les précipitations extrêmes, les crues éclair et les glissements de terrain associés dans le nord-est du Pakistan, le nord de l’Inde et le Népal. Ces dernières années, plusieurs catastrophes de ce type ont eu des conséquences dévastatrices dans ces régions – telles que les inondations au Pakistan en 2010 », continue-t-il.

Enfin, concluons en mentionnant que le lien entre la mousson d’Asie et les précipitations en Amérique est bien moins clair. Il mettrait en jeu la formation des cyclones tropicaux et leur déplacement jusqu’à la côte est américaine. Cependant, les auteurs précisent que cette explication reste spéculative et devra faire l’objet de futures recherches. Par conséquent, il reste encore du travail à faire pour tout comprendre !

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