Les chauves-souris peuvent « prédire » la trajectoire de leurs proies

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Crédits : Angeleses/Pixabay

Elles ne vous seront d’aucun secours sur le marchĂ© boursier, mais les chauves-souris sont assez douĂ©es pour prĂ©dire une chose : la trajectoire de leurs proies, d’après une nouvelle Ă©tude.

Nous savons que les chauves-souris s’appuient sur l’Ă©cholocation pour chasser. Autrement dit, elles Ă©mettent par le nez ou la bouche des ultrasons dont elles recueillent l’Ă©cho. Le dĂ©lai entre chaque appel et les Ă©chos qui en rĂ©sultent leur permettent alors de dĂ©terminer Ă  quelle distance se trouve une proie. Elles penchent Ă©galement la tĂªte pour capter l’intensitĂ© changeante des Ă©chos afin de dĂ©terminer oĂ¹ se trouve l’insecte dans le plan horizontal. GrĂ¢ce Ă  ces astuces, les chauves-souris peuvent obtenir une image assez prĂ©cise de leur environnement. Toutefois, est-ce pour autant suffisant pour suivre avec succès une cible en mouvement erratique ?

Les chauves-souris Ă©tant des prĂ©datrices très efficaces, des chercheurs de l’UniversitĂ© Johns Hopkins (États-Unis) se sont demandĂ© si ces mammifères ne profitaient pas d’une astuce en plus. « L’insecte vole. La chauve-souris vole aussi. Dans cet environnement qui change très rapidement, une chauve-souris ne se fiant qu’aux informations obtenues par l’Ă©cho le plus rĂ©cent raterait probablement l’insecte« , observe en effet Cynthia F. Moss.

Et si ces animaux pouvaient, eux aussi, prédire les trajectoires de leurs proies ? Pour tester cette hypothèse, les chercheurs ont conçu une expérience reflétant étroitement la manière dont une chauve-souris chasse dans la nature.

Concrètement, plusieurs chauves-souris brunes (Myotis lucifugus) ont Ă©tĂ© placĂ©es sur des perchoirs, puis des insectes ont Ă©tĂ© lĂ¢chĂ©s. Les chercheurs ont alors enregistrĂ© les appels d’Ă©cholocation des sujets et observĂ© la direction de leur tĂªte alors qu’elles suivaient leurs cibles. En outre, des obstacles ont Ă©galement Ă©tĂ© placĂ©s dans la zone d’Ă©tude. L’objectif Ă©tait de « couper » temporairement les liaisons entre les prĂ©datrices et leurs proies (comme pourraient leur faire des arbres dans la nature, par exemple).

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Une chauve-souris s’apprĂªte Ă  capturer un insecte pendant l’expĂ©rience. CrĂ©dits : UniversitĂ© Johns Hopkins.

Oui, les chauves-souris « prĂ©disent l’avenir »

Les chercheurs ont ensuite conçu des modèles mathĂ©matiques pour tester les donnĂ©es recueillies. RĂ©sultat, il en est ressorti que sans facultĂ© de prĂ©diction, la tĂªte de la chauve-souris aurait toujours du retard sur le vol de l’insecte ou ne coĂ¯nciderait avec la position de l’insecte que de temps en temps, par chance. Or, ce n’Ă©tait pas le cas dans cette Ă©tude. Les rĂ©sultats n’ont en effet montrĂ© « aucun changement dans la prĂ©cision de leur anticipation de la position de la cible avec la tĂªte avec occlusion par rapport Ă  des conditions sans occlusion« , peut-on lire.

Autrement dit, « les chauves-souris accumulent des informations sur le mouvement de la cible Ă  partir d’une sĂ©quence d’Ă©chos et construisent ensuite des modèles internes de prĂ©diction des trajectoires des insectes« , dĂ©taillent les chercheurs. « La question de la prĂ©diction est importante, car un animal doit planifier Ă  l’avance pour dĂ©cider de ce qu’il va faire ensuite. Un animal visuel ou un humain reçoit un flux d’informations, mais pour les chauves-souris, c’est d’autant plus remarquable dans la mesure oĂ¹ elles le font avec seulement de brefs instantanĂ©s acoustiques« .

Les rĂ©sultats bouleversent la notion prĂ©cĂ©demment acceptĂ©e selon laquelle les chauves-souris ne prĂ©disent pas la position future de leurs proies. Il s’agissait pourtant d’une hypothèse Ă©voquĂ©e dans les annĂ©es 1980, avant que les camĂ©ras Ă  haute vitesse ne soient largement disponibles.